Certes oui, le premier tour des élections régionales vient de s’achever sur une cuisante déroute pour le Parti Socialiste, et pire encore pour les parangons de morale et de vertu qui peuplent ses rangs, par une victoire éclatante du Front National. La semaine d’entre deux tours sera donc entièrement consacrée aux jérémiades plaintives de la classe jacassante, affairée à trouver des raisons de cet énorme camouflet qu’elle persiste à croire immérité. Mais pendant tout ce barouf formidable, le gouvernement, lui, ne s’en fait guère. Il a toujours les mains très très libres.
Et ça tombe bien parce que voyez-vous mes petits amis, la situation française est toujours aussi tendue : des éléments perturbateurs, des individus contestataires, parfois armés, n’hésitent pas à tenir réunions, à manifester voire à s’organiser pour contester le pouvoir en place, et je ne parle pas seulement de ces malheureux citoyens égarés qui votent Front National, mais aussi de ces évidents terroristes qui massacrent par douzaines ou qui tentent l’écologie alternative et le rassemblement interdit place de la République.
Car si la France est toujours en état d’urgence, ce n’est pas pour rien : bien sûr, il y a bien quelques unes de ces personnes radicalisées qui menacent le vivrensemble, mais il y a aussi des douzaines d’autres agités qui, eux, menacent le pouvoir par leur insupportable dissidence. Les perquisitions, les gardes à vue, les interpellations musclées et les descentes de police prennent alors tout leur sens dans un pays qui ne rêve manifestement que d’une chose : de l’ordre, de la sécurité, et pas un papier gras qui dépasse.
Dans ce cadre et à l’évidence, des actions de police de terrain et de longue haleine seraient probablement efficaces. Infiltration, renseignement, recoupage et analyse par des équipes entraînées sont les mamelles naturelles d’un État guidé par sa mission régalienne de sécurisation du cheptel contribuable. Cela entraîne aussi le besoin fort d’un État efficace dans sa justice, qui poursuit les criminels, ceux que la société condamne sans ambiguïté, et ne s’occupe pas des petits fripons que des lois mal torchées produisent à la tonne. Bref, toute une panoplie d’actions concrètes que la fine équipe au pouvoir actuellement fuira avec application.
Privée de toute action opérationnelle réaliste, le gouvernement n’entend cependant pas abdiquer son pouvoir de nuisance. C’est pourquoi les services du ministère de l’Intérieur envisagent avec calme et obstination de nombreuses mesures pour faire semblant de protéger les citoyens, tout en s’octroyant des camions entiers de moyens techniques pour leur sucrer leurs libertés : coupure obligatoire de tout réseau Wifi ouvert, blocage des réseaux d’anonymisation et fourniture des clés de chiffrement des messageries font partie de ces lumineuses idées actuellement en cours d’étude dans la maison Cazeneuve.
Oui parce que vous comprenez, l’état d’urgence, c’est bien joli, mais ça ne suffit pas, et ce, d’autant plus lorsqu’il devient la règle, la norme : moyennant la révision constitutionnelle actuellement dans les tuyaux, on va pouvoir gommer les petits soucis que pourrait créer un assigné à résidence en posant une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil Constitutionnel.
Et une fois ce petit patch posé, on pourra continuer sur la lancée sans plus se faire arrêter par le Conseil Constitutionnel le moindre scrupule. Et en avant pour le GPS obligatoire sur les voitures de location (pas pour aider le client, plutôt pour aider la police, hein). Et en avant pour le croisement de tous les fichiers de données personnelles détenues par l’État, parce que la gestion des données personnelles, c’est vraiment un domaine où il fait référence, le bougre. Et en avant l’interdiction des connexions Wifi libres et partagées, et en avant la fermeture des connexions Wifi publiques parce que tout le monde sait que les terroristes se bousculent sur ces réseaux ouverts ! Et puis surtout, en les fermant ainsi, la police croit forcer les utilisateurs à avoir une identification claire, bien plus facile à tracer comme il faut dans une République où ceux qui n’ont rien à se reprocher n’ont par définition rien à cacher.
Mais on peut aller plus loin : et si on interdisait et qu’on bloquait les communications des réseaux TOR en France ? Peu importe que, techniquement, cela ressemble fort à une gageure à la graisse d’Hadopi mignon, cette mesure enverra un signal fort et clair aux vilains et aux méchants qui, comme tout le monde le sait, se retrouvent sur ces réseaux pour fomenter leurs abominables complots. Bon, cela enverra aussi un autre signal, dans la catégorie « France, Iran, Chine, Corée du Nord : même combat », mais ce message est de toute façon en train de pulser de plus en plus fort à chaque mouvement cadencé du menton de Manuel, à tel point qu’outre-Atlantique, la France passe maintenant pour une des démocraties occidentales les plus avancées dans l’antilibéralisme. Alors finalement, un peu plus, un peu moins, ça ne fera plus guère de différence.
Et puis tant qu’à faire, on peut aussi forcer les éditeurs d’applications Voix sur IP (la téléphonie sur internet) à fournir les clés de déchiffrement de leurs applications, et permettre ainsi aux forces de l’ordre d’espionner vos conversations sans trop vous gêner ni vous extirper de force vos mots de passe personnels, le waterboarding n’étant pas encore cautionné par le vivrensemble républicain (mais le gouvernement y travaille).
Vous voyez, pas de quoi en faire un drame : ce n’est pas parce qu’on est grossièrement incompétent et qu’on n’a finalement aucune idée, même vague, de ce qu’il faudrait faire pour endiguer le terrorisme et répondre aux demandes des Français, qu’on est aussi complètement à cours d’idées idiotes, contre-productives et liberticides ! Comme le font actuellement les membres du gouvernement, on peut fort bien cumuler.
Et à tous ceux qui, naïfs ou idiots, continuent de croire que tout ceci n’est qu’une petite fantaisie passagère, à tous ceux, plus nombreux encore, qui persistent à souscrire à la fadaise pratique du « Il faut bien ça pour lutter contre les vilains », regardez bien la vitesse à laquelle chacune de ces propositions arrive sur la table, celle à laquelle chacune de vos liberté passe à la trappe, celle à laquelle chaque perquisition abusive s’ajoute à la précédente.
Toujours confiant ?
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