Mes chères contrariées, mes chers contrariens
!
J’ai emprunté le titre de cet édito à
Barack Obama « himself »
("lui-même" en français, c’est juste pour montrer
que je sais parler anglais et mon anglais est comme la confiture : moins on
en a, plus on l’étale). Donc the president
of the United States a dit lui-même que Wall Street, cette fois,
devrait commencer à avoir peur…
Pour une fois qu’un président est aussi pessimiste que
moi, je ne vais tout de même pas bouder mon plaisir.
Et là, je dois vous avouer que cette nouvelle journée de
blocage a donné lieu à de multiples déclarations toutes
aussi passionnantes les unes que les autres. Je garde évidemment la
meilleure pour la fin, et vous comprendrez pourquoi surtout si vous avez lu
l’édito d’hier intitulé « Le défaut
global a-t-il commencé ? ».
Budget
américain : pas de progrès, Obama se dit
"exaspéré"
John Boehner est le président
républicain de la Chambre des représentants (il tient le
rôle du méchant-méchant dans l’épisode 2 de
la saison 3 de la série « The White House Shutdown
»). Il s'exprimait aujourd’hui après sa rencontre avec le
président Obama.
Selon l’AFP qui nous rapporte ce qui s’est passé, John
Boehner (le méchant-méchant) a dit
que "le président a répété une nouvelle fois
qu'il ne voulait pas négocier" en parlant d’Obama (qui
incarne le gentil-gentil).
Les troupes républicaines (les méchants-méchants
qui veulent attaquer la croissance française, ce qui inquiète
énormément notre Moscovenivedivici
national) s’opposent ouvertement à la réforme de
l'assurance-maladie promulguée par M. Obama et refusent de voter un
budget qui n'en supprimerait pas le financement.
Nouveauté du jour : figurez-vous, et vous allez être
surpris car évidemment on ne pouvait s’y attendre (sauf pour
ceux qui lisent Le Contrarien Matin), que ces
vilains républicains « ont aussi menacé de lier cette
question à celle du relèvement du plafond de la dette,
nécessaire selon le Trésor d'ici au 17 octobre ».
Eh oui mes chers amis, nous y allons tout droit. Comme je
l’écrivais hier, il y a cette fois-ci très peu de chance
que les républicains refusent de voter un budget pour laisser
augmenter le plafond de la dette. Du point de vue des républicains,
accepter l’Obamacare c’est remettre en
cause le fonctionnement des USA… Depuis Roosevelt, les
démocrates essaient de mettre en place un système
général de santé… et depuis les années 30,
ils échouent lamentablement. Une partie non négligeable des
USA… ne veut pas devenir un pays « socialiste ». Comprenez par là que le respect du principe « marche
ou crève » doit être respecté de façon
intangible… Et c’est bien ces fondements-là que l’Obamacare remet en cause (vu d’ici, que l’on
soit pour ou contre n’a aucune importance. Obama n’est pas le
président du monde et c’est un problème de culture
américaine difficilement compréhensible avec notre prisme
européen).
Mais au-delà de la vision politique de ce que doit être
ou ne pas être la société américaine, il demeure
un réel problème économique et c’est un point
d’achoppement majeur. Effectivement, l’Obamacare
va coûter cher, très cher à la collectivité. Cela
va nécessiter de nouveaux impôts, de nouvelles taxes
fédérales. Ces coûts ne feront qu’augmenter au fur
et à mesure que la crise économique s’aggrave et surtout
que la population… vieillit ! Nos anciens coûtent cher,
très cher en soins médicaux. Comme tous les pays, les USA sont
confrontés à ce problème du vieillissement de la
population et donc à cette augmentation des coûts qui,
aujourd’hui, reposent essentiellement sur les gens eux-mêmes.
Soit ils peuvent payer… soit pas. C’est aussi simple que
ça. Toujours cette idée du marche ou
crève et si vous ne pouvez pas payer vos soins et que vos enfants ne
le peuvent pas non plus, ce n’est pas de la faute de
l’État… c’est de votre faute à vous.
C’est une logique. On y adhère ou pas, mais c’est celle
des républicains.
Conséquence : si les républicains laissent passer cette
loi et qu’ils reviennent aux affaires dans trois ans, effectivement la
situation budgétaire américaine se sera considérablement
dégradée. Pas de croissance, moins de rentrées fiscales,
un poids colossal de la dette, des taux d’intérêt qui ne
peuvent à terme que monter rendant la dette impayable et des
coûts de financement de la santé pour tous qui vont
inévitablement exploser avec l’arrivée à la
retraite (donc dans la vieillesse) des classes d’âge les plus nombreuses.
Il y a peu d’intérêt pour les républicains
de se retrouver dans cette situation dans 3 ans. Encore une fois, autant
prendre les devants dès maintenant et mettre Obama devant ses propres
choix.
Les
démocrates inflexibles… pour le moment !
D’après l’AFP, le chef de la majorité
démocrate au Sénat, Harry Reid, a exclu de céder sur la
réforme de la santé et a exhorté les républicains
à adopter une loi budgétaire valable quelques semaines, le
temps de trouver un accord plus large.
Quant au président Obama, il a indiqué devant la
chaîne CNBC : « Évidemment, je suis
exaspéré, parce que cette crise est complètement
superflue et je ne négocierai pas avec mes adversaires sur un
relèvement du plafond de la dette. »
C’est à ce moment-là qu’il a ajouté
que "Wall Street, cette fois, devrait être inquiet" du blocage
actuel. Barack Obama venait de s’entretenir avec ses vrais patrons
à savoir les grands banquiers américains dont le plus grand
chef Lloyd Blankfein, le pédégé
de Goldman Sachs, et Brian Moynihan, le mamamouchi
en chef de Bank of America. On ne sait pas trop ce
qui a pu se dire lors de cette réunion mais comme vous tous,
j’aurais bien aimé être une petite souris pour entendre ce
qui s’est raconté dans le bureau ovale.
Nous saurons juste qu’à la sortie Lloyd Blankfein (le vrai patron du Monde), a indiqué que
« s'il existe des précédents pour une paralysie de
l'État, il n'y a pas de précédent pour un défaut.
On peut discuter à nouveau de ces questions politiques (en parlant
d’Obamacare) mais il ne faut pas avoir
recours à la menace d'un défaut sur la dette comme moyen de
pression ».
Je trouve cela très gentiment dit et, ma foi, somme toute
particulièrement mou si Goldman Sachs était profondément
opposée à une telle situation. Blankfein
n’a pas été vraiment virulent à
l’égard des méchants républicains qui mettent le
monde entier en péril. Il faut dire que lui comme les autres ont de
tels problèmes avec leurs bilans pourris qu’une petite faillite
globale accompagnée de la fermeture des autorités de
surveillance, et le tout avec une utilisation sans limite de la planche
à billets de Ben Bernanke, le patron de la
FED, pourrait bigrement leur être utile… d’où sans
doute ces propos plus que mesurés.
Un indice supplémentaire que la situation pourrait durer nous a
été donné aujourd’hui avec l’annulation
d’une visite prévue de Barack Obama le 11 octobre en Malaisie et
une autre aux Philippines. Sa participation à d’autres sommets
pourrait également être remise en cause.
Le
défaut sur la dette "potentiellement catastrophique" pour le
Trésor
Le Trésor américain avertit mercredi qu'un «
défaut de paiement des États-Unis sur leur dette serait sans
précédent et potentiellement catastrophique, avec un impact
plus grave que la crise financière de 2008 ». Finalement, comme
on a réussi à s’en sortir en 2008, je doute que cela soit
un bon argument pour les républicains jusqu’au-boutistes.
Dans son rapport, le Trésor américain écrit que
« le marché du crédit pourrait se geler, la valeur du
dollar pourrait plonger et les taux d'intérêt américains
pourraient monter en flèche conduisant à une crise
financière et une récession qui pourrait rappeler les
événements de 2008, voire pire ».
Le secrétaire au Trésor Jacob Lew
a rajouté que « comme nous l'avons vu il y a deux ans,
l'incertitude prolongée sur le fait de savoir si notre nation paiera
à temps et en totalité ses obligations financières va
nuire à notre économie. Retarder le relèvement du
plafond de l'endettement jusqu'à la dernière minute est
exactement ce dont notre économie n'a pas besoin ».
Pour notre Christine Lagarde nationale accessoirement directrice
générale du FMI, « la paralysie budgétaire est
déjà assez néfaste mais l'incapacité de relever
le plafond de la dette serait pire encore, et pourrait non seulement
gravement endommager les États-Unis mais également l'ensemble
de l'économie mondiale ».
Enfin, pour notre Mario Draghi
européen (le chef de la BCE), « si cette paralysie se
prolongeait elle représenterait un risque pour les États-Unis
et pour le monde ».
Mais ils me semblent eux aussi avoir presque du mal à cacher
leur joie face à ces Américains dont la politique pourrait bien
servir d’alibi général à tout le monde pour
justifier la catastrophe économique en cours depuis 2007 et dont il
faudra bien sortir par décisions courageuses.
La note du
27 septembre de BNP PARIBAS !
Après ce petit tour d’horizon de la situation de blocage
américaine, je vous ai gardé pour la fin cette note de BNP
Paribas publiée le 27 septembre dernier par Alexandra Estiot, économiste.
Elle y nuançait parfaitement les risques liés à
l’échéance du relèvement du plafond de la dette.
Pour elle, « si le Congrès manque la date du 17 octobre,
date à laquelle le Trésor déclare qu’il arrivera
à court de liquidités, un vote interviendrait peu après.
La période de blocage serait donc trop courte pour
générer des dégâts irréversibles.
Par ailleurs, si le plafond de la dette ne pouvait être
relevé, le Trésor ne ferait pas défaut : pour couvrir
les tombées de dette, il suffirait que les investisseurs acceptent de
renouveler leurs positions, et la FED aurait toujours la possibilité
de se positionner en soutien. »
Voilà qui est extrêmement intéressant car pour la
première fois et ce depuis quelques jours, il est évoqué
dans les milieux financiers que finalement, ne pas relever le plafond de la
dette ne serait pas la catastrophe absolue… Il suffit juste que les
investisseurs acceptent de renouveler leur position… C’est assez
simple, vous en conviendrez.
Sauf que cela reviendrait à obliger les investisseurs et les
épargnants à conserver des obligations dont ils veulent se
séparer. Dans ce cas, il n’y a absolument pas défaut.
Votre argent et votre épargne seront juste pris en otage. En
Argentine, en 2001, cela avait pris le doux nom de « coralito » et ce fut le prélude à
l’effondrement de ce pays… Mais surtout, surtout n’achetez
pas d’or, laissez votre argent à la banque, et souscrivez un peu
plus dans votre contrat d’assurance… Vous pouvez aussi prendre
vos précautions. Il ne vous reste plus que 13 jours pour vous
préparer et vous devez absolument vous demander ce que vous devez
faire pour vous assurer un minimum de confort et de ressources au cas ou… la sagesse tant attendue ne l’emporterait
pas cette fois.
À demain… si vous le voulez-bien !!
Charles
SANNAT
Editorialiste et rédacteur du Contrarien
Matin
Directeur des Études Économiques Aucoffre.com
http://www.lecontrarien.com/
http://www.boursorama.com/actualites/budget-a...f0f5d033fab7310
http://www.bfmtv.com/economie/dette-americ...008-616254.html
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