Aaaaah, enfin ! La France vient d’ajouter un ustensile indispensable à sa boîte à outils pourtant déjà fort pourvue : avec Alain Fischer, nous voilà à présent dotés d’un M. Vaccin ! Il était vraiment temps !
Pensez-donc : tous les autres pays ont déjà amplement discuté des prochaines phases de la crise, et dans celles-ci, l’étape « obtention d’un vaccin » puis « distribution du vaccin » est clairement la suivante dans le plan de route, ce qui impose logiquement une pléthore d’organismes en charge, qu’on qualifiera de « responsables » (même si toute notion de responsabilité s’est déjà totalement évaporée du gouvernement depuis des années).
Et comme on va picouser du Français par trouzaine, il fallait donc absolument nommer une tête bien faite, bien pleine et bien sympathique pour servir de point focal dans les prochains points-presse, communiqués et autres conférences qui ne manqueront pas d’émailler la petite vie sanitaire des Français pour les prochaines semaines.
Or, ça tombe bien : le joyeux gagnant du poste officiel, un certain Alain Fischer, est vraisemblablement compétent et semble même avoir été choisi après mûre réflexion par les instances les plus hautes de notre élite gouvernementale, ce qui n’est vraiment pas peu dire vu l’historique de leurs performances passées.
Et, après deux confinements et quelques couvre-feux, voilà la grosse machine de l’État en marche, sur la base d’une idée simple : on va avoir plein de vaccins conservés dans des gros frigos (qu’on va trouver, ne vous inquiétez pas – et c’est pas cher puisque c’est l’État qui paye), puis on va ensuite distribuer comme des allocations de la dosette vaccinale à chaque Français volontaire et, après un temps indéterminé, plus ou moins long, beaucoup d’entre eux seront vaccinés et tout ira mieux.
Après quoi, on retournera à notre petite vie tranquille du Monde d’Après écologique et syntonisé avec Gaïa, dans laquelle la moitié des commerçants, des artisans et des indépendants sont en faillite, un tiers des Français touche des aides sociales et un quart est au chômage à la recherche d’un poste dans l’un des nombreux secteurs sinistrés.
Enfin en principe.
Parce que lorsqu’on épluche les détails, et notamment lorsqu’on les demande au Dr. Fischer, c’est un peu plus compliqué que ça : rappelant que nous n’avions pour le moment que de lénifiants communiqués de presse des laboratoires (et non de vraies études et résultats), on devait procéder avec précaution d’autant qu’on ne connait toujours pas l’impact de ces vaccins sur les personnes les plus fragiles (celles auxquelles on le destine pourtant en premier lieu). Si l’on ajoute qu’on ne sait pas non plus si le vaccin est efficace pour empêcher la transmission du virus, on aboutit à la conclusion – toujours aussi calme et pondérée – qu’on n’a finalement aucune idée de ce que vaut cette annonce, le vaccin et la campagne de vaccination planifiée.
C’est tout à fait rassurant.
Cependant, sans même présager de l’efficacité du vaccin en question, une chose semble certaine dans cet océan de flou et d’approximations scientifico-journalistiques : comme à son habitude, la communication gouvernementale va être au taquet pour surpasser les sommets déjà élevés qu’elle a atteints lors des phases précédentes de la crise. Comprenant ainsi qu’imposer d’emblée le vaccin pourrait être mal perçu, le chef de l’État a ainsi déclaré :
« Il ne s’agira pas d’une stratégie de vaccination obligatoire mais d’une stratégie de conviction et de transparence »
On peut donc s’attendre à une nouvelle tempête de messages confus et contradictoires, dont certains, rédigés en « français appauvri simplifié », seront destinés à faire de la propag pédagogie en prenant les Français pour de petits mammifères en bas-âge, intellectuellement amoindris.
Cette stratégie, redoutable de pertinence, a amplement démontré son efficacité lors de l’épisode « Des Masques Pour Presque Tous » de la saison 1, et de façon encore plus flagrante lors de l’épisode « Testons Tous Azimuts et Mon Chat Aussi » de la saison 2.
Certes, certes, on peut se rassurer pour le moment en pointant que le gouvernement affiche ne pas vouloir rendre l’opération obligatoire… Ce qui ne veut rien dire puisque, chafouin, il peut aussi choisir de rendre l’absence de vaccination si pénalisante qu’il rend l’injection de facto impossible à refuser.
Quoi qu’il en soit, l’océan d’incertitudes qui s’ouvre maintenant impose la plus grande prudence, d’autant que, parallèlement, on sent déjà les précautions (oratoires et logistiques) du gouvernement pour préparer le terrain à un troisième confinement : les fêtes et les rassemblements familiaux qui les entourent serviront de prétexte pour justifier une nouvelle vague, encore plus bricolée que la seconde, et conserver ainsi un verrou sur toute velléité de la population de reprendre enfin le cours normal de ses activités.
C’est attendu : d’une part, il ne faudrait surtout pas laisser se perdre une telle crise et d’autre part, il faudra continuer à tout faire pour éviter que les Français se rendent compte de l’incompétence abyssale du gouvernement et qu’ils en viennent à se rassembler pour réclamer enfin un État limité, contraint à ses strictes prérogatives régaliennes.
Imaginer qu’on puisse laisser la bride au peuple pour ainsi se rassembler et réclamer enfin un retour de l’ordre et du raisonnable dans le pays, ce serait prendre de gros risques pour nos gouvernants qui ont, on le sait, le cou fragile. Dès lors, on peut garantir que de telles manifestations seraient immédiatement réprimées avec force pour des motifs évidemment sanitaires (« On vous éborgne pour vous éviter de mourir du Covid, voyons, ne râlez pas ! »). Tout le monde sait que les seules exactions permises sont celles des brochettes de brindilles gauchistes qui, au moins, respectent les distanciations socialistes et les gestes barricade.
Bref : tout se met gentiment en place, avec la même méthode finement calibrée, la même précision diabolique, le même soin que les précédentes phases. Il y aura des petites picouses, des incitations, quelques amendes tout de même, et tout ira bien, dans trois mois. Ou six. Ou plus.
Mais à tout hasard, tenez-vous prêts.