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>N’investissez pas en France ! L’État s’en charge…  - Sylvain Charat - Jean de Selzac
Car, pour la gauche purificatrice, il ne fallait pas se tromper de cible. L’ennemi, le vrai, le seul, n’était autre que le capitalisme agonisant et l’Amérique déliquescente.

Mais voilà que des revendications d’un nouveau type vinrent gâcher la fête des protestations de gauche. Les peuples d’Europe de l’Est se mirent à chanter d’autres antiennes, à exprimer d’autres doléances. Eux, qui avaient dégusté le socialisme réel des décennies durant, rêvaient de liberté. A la planification d’Etat, ils préféraient les lois du marché. Et s’ils demandaient quelque chose aux Américains, ce n’était pas de partir d’Europe, mais de soutenir leur lutte.

L’issue est bien connue. Au grand étonnement des « forces progressistes », ce ne fut pas le capitalisme, mais le socialisme, qui s’effondra comme un château de cartes.

La gauche ne prit cependant pas longtemps pour réajuster son logiciel de contestation. Au tournant du siècle, les altermondialistes firent leur apparition, suivis des « Indignés » de Stéphane Hessel. Puis, la crise des subprimes et la récession économique qui en découla donneraient des ailes à tout ce beau monde – comme l’avait fait dans son temps la stagflation des années 70.

Mais voilà que, encore une fois, d’autres revendications, n’ayant guère ou rien à voir avec celles de la gauche, se font jour. Les régimes ciblés ne sont pas tout à fait ceux contre lesquels la gauche aurait déversé sa colère. Il s’agit en effet de régimes, soit carrément « anti-impérialistes » et donc ayant de la respectabilité aux yeux de la gauche (Kadhafi), soit soutenus par les rivaux des Etats-Unis (par la Russie, la Chine ou l’Iran), suscitant de ce fait la sympathie, ou tout au moins le silence complice, de nos « Indignés » contestataires.

Les Iraniens demandant à Obama de leur venir en aide, Kadhafi tombant par la colère des Libyens avec l’appui de l’OTAN, le « tiers-mondiste » Laurent Gbagbo chassé par son propre peuple avec l’aide de l’ancienne puissance coloniale, Bachar al-Assad massacrant des Syriens par dizaines de milliers avec le soutien diplomatique de tout ce que l’Amérique latine compte d’« anti-impérialistes » au pouvoir (Chávez et les frères Castro en tête), autant de phénomènes qui – à l’instar des manifestations en Europe de l’Est dans les années 80 – ne correspondent pas au schéma bien huilé des protestations de la gauche.

Quant à l’Europe, davantage que les « Indignés » de Hessel, ce sont les mouvements d’extrême droite et de la droite souverainiste, ainsi que des partis idéologiquement flous comme celui de Beppe Grillo en Italie, qui tirent profit de l’impopularité croissante de Bruxelles dans les pays de la zone euro.

Plus gênant encore, les bastions de la gauche latino-américaine sont mis à mal par leurs peuples.

Au Venezuela, ce fut seulement par la mainmise du gouvernement sur les ondes de télévision, par le harcèlement politique et judiciaire contre l’opposition, et finalement par une fraude électorale constatée et dénoncée par des observateurs indépendants (notamment par ceux de l’Institut des Hautes Etudes Européennes[1]), que Nicolas Maduro, successeur désigné par Hugo Chávez et docile allié du régime des frères Castro, a pu être proclamé vainqueur des élections présidentielles d’avril de cette année.

Car n’en déplaise à la gauche pure et dure, celle d’Attac, du Monde diplomatique et autres Mélenchon, les Vénézuéliens désertent le chavisme. Même avec fraude électorale, le chavisme a perdu un million de voix entre les élections présidentielles d’octobre 2012 et celles d’avril 2013, le candidat de l’opposition ayant atteint lors de ces dernières – toujours selon les chiffres officiels, pourtant trafiqués par le pouvoir – un honorable 49,3%.

Rien ne va plus non plus chez une autre coqueluche de la gauche, le Brésil de Lula. Des millions d’hommes et de femmes viennent d’investir les villes de ce pays pour protester contre l’inflation, la corruption et la mauvaise qualité des services publics. Bilan peu réjouissant de la très gauchiste Dilma Rousseff, dont la cote d’approbation a chuté de 57% à 30% en moins d’un mois.

Quant à Cuba, c’est la répression et non pas l’approbation populaire qui depuis belle lurette fait tenir le régime des frères Castro. Comme l’aura constaté la revue The Economist : « Sur une grande partie de Cuba, il est difficile de trouver quelqu’un au-dessous de 40 ans qui parle en bien du système »[2].

Constatant l’effritement de la popularité du chavisme, la fille du Che, Aleida Guevara March, déclara que les Vénézuéliens sont un peuple « ignorant », pas suffisamment « préparé pour valoriser le chavisme »[3].

Voilà exprimé sans nuance le conflit abyssal qui existe entre les incontournables aspirations des peuples au bien-être et à la liberté et les piètres bilans d’une gauche sûre d’elle-même et de ses dogmes.

Fabio Rafael Fiallo


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4150 days ago
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