Posséder un bien, en France, fait immédiatement de vous un nanti, un riche, un propriétaire ventripotent. Si, par quelque malice torve d’un destin crapuleux, vous poussez le vice jusqu’à louer votre bien au lieu d’y séjourner, fortes sont les chances que vous ne soyez qu’un de ces méprisables vendeurs de sommeil. Et si ce n’est pas le cas, vous mériterez de toute façon le pal fiscal et la taxe vexatoire.
Ces onctueux présupposés un fois posés, nous pouvons à présent nous atteler à « améliorer » la situation pour les locataires, ces petits mammifères chétifs surexploités que l’État entend protéger de tout contre tous. Or, en République du Bisounoursland, où rien ne doit dépasser, tout doit être rangé bien comme il faut dans des cases, bien régulé, quoi de mieux qu’encadrer les loyers ?
Diable oui, pourquoi n’y avions-nous pas songé plus tôt ? Il a fallu attendre le lancement de cette idée génialissime courant 2015 par la non-moins brillantissime ministre Cosse du formidablissime gouvernement Valls pour enfin encadrer les loyers français afin de les apprivoiser, ces derniers étant retombés dans leurs travers sauvages alors que le régulateur avait le dos tourné.
Cependant, des difficultés apparaîtront assez vite et Valls devra faire marche arrière, n’autorisant finalement sa Cosse de ministre à ne tenter qu’une expérience sur la ville de Paris. Joie, bonheur et petits décrets municipaux bien serrés : l’encadrement des loyers parisiens était en route sous les applaudissements du public en délire. Un an plus tard, le bilan sera cependant violemment tiédasse : encore une fois, et en accord avec une nuée compacte d’économistes expliquant que l’encadrement des loyers est une ânerie olympique, ce fut un échec minable de plus au bilan d’un gouvernement français déjà passablement chargé question médiocrité.
Pompon de l’affaire : dans certains cas, l’encadrement en question aura même permis à certains loyers … d’augmenter. Bien joué, m’ame Cosse.
Une nouvelle année s’est écoulée et, à la faveur du tabassage de plus en plus ferme des propriétaires immobiliers, la hausse des loyers, déjà peu élevée et tournant vaguement autour du 1% par an depuis un moment, a fini par s’épuiser au point que les prix baissent un peu à présent… Comme le nombre de locations : à force d’être un coupable systématique, le propriétaire moyen, lassé de se faire violemment fiscquer, abandonne progressivement l’idée de devenir rentier, bailleur ou même propriétaire.
En somme et comme prévu depuis le départ, le contrôle des loyers ne marche pas plus maintenant qu’avant, pas mieux ici qu’ailleurs. Les effets de bords de l’encadrement, multiples et contradictoires, ne permettent au mieux que de tirer des conclusions négatives de cette expérience foutraque.
Mais lorsqu’on a qu’une idéologie pour toute rigueur intellectuelle, on ne peut pas s’avouer vaincu. Devant l’échec patent, et alors même que la justice vient récemment d’annuler cette idée crétine d’encadrement des loyers à Paris, on ne recule pas (no pasaran !) et il faut toute l’énergie du paléo-communisme assumé de Ian Brossat, l’adjoint au maire de Paris chargé du logement, pour extirper de sa naphtaline les meilleures idées dans le domaine : on va redoubler d’effort, pardi !
Point de surprise ici. Après tout, le collectivisme, c’est à ça qu’on le reconnaît : réclamer encore plus de quelque chose qui ne marche pas, sous le prétexte judicieux que si ça ne marche pas, c’est qu’on n’en a pas fait assez.
Malheureusement pour le petit Ian et sa clique de ponctionnaires avides de tout régenter, tout ne se passe pas toujours comme prévu. Une partie de moins en moins petite de la population commence à se lasser des vilenies et du flicage fiscal permanent que les kapos municipaux entendent faire régner dans la Capitale.
Ainsi, il est normalement obligatoire pour les propriétaires souhaitant louer leur bien de s’inscrire sur le magnifique site web 2.0 mis à disposition gratuitement avec vos sous par la mairie de Paris. Pourtant, sur plus de 100.000 biens en location disponibles dans la capitale, seuls 11.000 propriétaires ont fait la démarche.
Le petit Ian est tout frippé : « Le chiffre est insatisfaisant » maugrée-t-il dans un souffle, tout en pensant très probablement « Mais on les aura, ces gros bourgeois capitalistes ! »…
Ce qui, là encore, pourrait occasionner quelques problèmes puisqu’à mesure que les étatistes de son acabit tentent de nouvelles formes de ponction, le marché et les individus rivalisent d’ingéniosité pour contourner leurs gros doigts trop préhensiles.
Alors qu’AirBnB a déjà joué un rôle certain dans la bousculade des prix immobiliers dans la Capitale, allant jusqu’à remettre les pendules à l’heure en matière de services hôteliers, c’est encore une fois la firme américaine qui provoque des petits hurlements stridents chez les thuriféraires du Consentement À l’Impôt : depuis quelques temps, les bailleurs passant par leur plateforme peuvent disposer d’une carte de paiement Mastercard Payoneer qui fonctionne comme une simple carte de débit avec les loyers collectés, lorsque l’option est ainsi choisie par le bailleur. La carte étant émise hors de France, ceci veut dire qu’une partie de ces loyers et de ces dépenses ne sont pas visibles par l’administration fiscale française ou Ian Brossat qui se rejoignent alors pour entamer un chœur de pleureuses taxatoires maltraitées.
Au demeurant, la firme agit ici comme beaucoup d’autres (Amazon, Alibaba dans le monde et Abritel ou CDiscount en France) qui ne font que proposer un service pratique pour leurs clients. Charge à ces derniers de rester dans la légalité et de déclarer ce qui est dû au fisc. Ce qui, dans la bouche de notre Brossat de combat, se transforme évidemment en :
« Airbnb incite ses hôtes à faire de l’évasion fiscale en localisant leurs revenus dans une banque située à Gibraltar.
(…) Je pense que Bercy gagnerait à regarder tout cela et à vérifier ce qu’il est possible d’entamer comme démarche, parce qu’on parle quand même de milliers et de milliers d’euros, sans doute beaucoup plus, qui échappent totalement au fisc français »
Ben voyons.
Mesure, calme, pondération et précision, toutes qualités dont le collectiviste moyen saura se départir avec rapidité si une belle taxation est à la clé : vite, lançons Bercy sur la piste et tentons de récupérer le magot en utilisant l’excuse facile du « Rassurez-vous, c’est pour votre bien. C’est français, c’est l’Etat français. »
Chaque jour qui passe démontre s’il était besoin le paradigme dans lequel s’est volontairement placé une partie du pays, de ses dirigeants et de son administration : en donnant la parole et – pire ! – le pouvoir à toute une clique de collectivistes à la petite semaine, en fournissant un véritable boulevard au socialisme et à tous ces adeptes d’une redistribution forcée, la France s’écarte tous les jours de la croissance et de l’enrichissement de la population.
On régule, on encadre, on taxe, on traque, on dénonce, on spolie et on se retrouve, après quelques décennies de ce régime stupide, avec un pays en ruine, une classe moyenne percluse d’impôts, un niveau de vie en baisse, un chômage galopant et des créateurs de richesses qui s’expatrient, discrètement, loin de ces tsunamis d’idioties. Et pour lutter contre ces fléaux, que proposent nos élites ? Plus d’impôts, plus de taxes, plus d’encadrements, pardi !
Forcément, ça va bien marcher.