C’est atroce, c’est abominable, c’est insupportable, c’est même pire que ça réuni, c’est injuste puisqu’inégalitaire : d’après la presse déchaînée, AirBnB n’a payé que 92.944 euros en France pour l’année 2016. Raaarrghh, mais c’est immoôÔôonde !
C’est le Parisien qui a réussi à dénicher l’information absolument cruciale sur le contribuable en question : pour le quotidien, cette somme (qui représente plus de 60 SMIC mais quand c’est de l’impôt, fopadirsa) représente la totalité des impôts que l’entreprise a payés en France au titre de l’année 2016.
Attention : ce n’est qu’« une obole » selon le courageux scribouillard fièrement lancé dans la traque fiscale du dangereux intermédiaire de locations meublées. Pour ce dernier en effet, aucun doute possible : un tel montant représente à peine ce que paierait une modeste PME, ce qui démontre là un « décalage troublant » entre cette entreprise qui gère 400.000 annonces de logement en France cette année (le deuxième marché après les Etats-Unis, mon brave monsieur !) et les impôts rikikis qu’on lui prélève !
Cependant, notre brave taxophile est obligé de l’admettre : tout ceci est parfaitement légal, crotte et zut et flûte.
Eh oui : grâce à une « optimisation fiscale » absolument diabolique, AirBnB échappe à la juste perception de l’écot national. Et quelle optimisation ! Non seulement son siège fiscal est en Irlande (ce qui est une honte, c’est parfaitement évident, tant l’Irlande est reconnu comme paradis fiscal), mais en plus son siège mondial est-il installé au Delaware (qui est aussi un paradis fiscal, c’est bien connu). Résultat : les factures sont émises depuis l’étranger, et l’Etat français ne touche que les cacahuètes relatives au bureau commercial d’AirBnB installé sur le territoire et dont l’activité est essentiellement marketing (et presque aussi rikiki que son impôt).
À lire les nombreux articles consacrés à la question, tout ceci est absolument intolérable. En cela, ces notules reproduisent de façon aussi mécanique que lassante les mêmes schémas que l’année dernière où le public découvrait les mêmes principes fiscaux et des montants d’impôts à l’époque à peine plus faibles, et de toute façon bien trop petits au regard d’indicateurs divers et variés que les folliculaires jettent au milieu du discours pour illustrer leurs propos. Et pas plus que l’année dernière à la même époque ne sont voilées leurs opinions pro-taxation : pour eux, c’est évident, la foule réclame sa part de viande sur la bête.
Et s’il faut tout mélanger dans une belle soupe de chiffres pour ébaubir le contribuable fiscalement rectomisé, qu’à cela ne tienne : ressortons pour l’occasion une fine analyse de Marianne qui évalue le chiffre d’affaires de la société à plus de 65 millions d’euros ! Alimentons de jolis graphiques où l’on présentera le nombre de locations qui explose d’années en années, sans que les impôts payés suivent le même rythme ! Et quand ce n’est pas le chiffre d’affaires ou le nombre de locations – pourtant sans aucun rapport avec la base imposable – parlons du nombre de touristes complices de ces agissements, faisons pleurer avec les hôteliers qui ferment leurs portes et badigeonnons le tout de cette optimisation fiscale qu’on voudrait écrire « fraude » mais que le risque de poursuites en diffamation n’autorise malheureusement pas au sein de rédactions au budget juridique trop tendu faute de lecteurs.
L’important, c’est de bien faire passer un message indispensable : AirBnB dispose d’une grosse galette et il est intolérable qu’on ne puisse pas croquer dedans, quand bien même la société joue le jeu et respecte les règles en vigueur.
Vous comprendrez qu’ici, peu importent les retombées économiques qu’AirBnB engendre sans le moindre doute par son activité. Peu importent les nuités vendues, peu importent les trajets permis par ces locations d’un autre type, peu importe que des touristes ont pu se permettre de venir dans le pays y dépenser leur argent grâce aux facilités offertes par AirBnB. Peu importe que, de fil en aiguille, ces touristes et ces locataires aient généré des entrées de TVA, des chiffres d’affaires pour les commerçants français par leur location négociée avec la société fiscalement basée en Irlande. Peu importe qu’AirBnB aie permis à certains de se découvrir une vocation dans l’accueil de touristes ou le développement de chambres d’hôtes.
Peu importe surtout que le chiffre d’affaire réalisé par les hôtes affiliés à AirBnB soit fiscalement déclaré et donc ponctionné comme il se doit. Peu importe qu’ainsi, la paperasserie fiscale soit réduite au minimum et chacun renvoyé qui à sa responsabilité d’entremetteur (pour AirBnB), qui de loueur (pour les hôtes) ou qui de consommateur (pour les touristes) payant de la bonne grosse TVA joufflue telle que notre pays la cultive avec amour et générosité.
Oui, vraiment, peu importent les effets bénéfiques indirects déjà palpables, peu importent les rentrées fiscales déjà existantes : puisque AirBnB réalise un chiffre d’affaire, puisque c’est en dehors de France, alors c’est un scandale (ou, du moins, on fera tout pour que c’en soit un). Point.
Ici, nos scribouillards et nos politiciens, jamais en retard d’une ânerie logique, se bousculent pour venir déplorer la fiscalisation d’AirBnB en Irlande plutôt qu’en France. Rappelons d’ailleurs que Macron, tout aussi puissamment « novateur » que Hollande ou Sarkozy sur la question, déclarait pendant sa campagne vouloir absolument lutter contre l’optimisation fiscale ; rien de tel qu’un combat contre la légalité pour gagner un costume de Zorro de Prisunic.
En revanche, il n’y a plus personne pour émettre l’idée révolutionnaire qu’il vaudrait mieux aligner notre fiscalité sur l’irlandaise plutôt que pourchasser les entreprises innovantes ou rémunératrices hors de chez nous. Personne pour noter qu’au train où va la fiscalité française, ce ne sont pas seulement le Delaware ou l’Irlande qui sont des paradis fiscaux en comparaison, mais un nombre croissant de pays sur toute la planète, à l’exception sans doute du Venezuela, de la Corée du Nord et de quelques autres destinations qui ne sont plus vraiment touristiques (mais assez ouvertement socialistes – coïncidence fortuite, n’en doutez pas). Personne pour remarquer que notre pays, par opposition, est devenu un petit enfer fiscal et paperassier.
Personne non plus pour essayer, au contraire du tabassage fiscalo-administratif observé, de capitaliser sur le phénomène et laisser ce domaine se développer : à l’instar des VTC qui, sans le moindre doute, offrent de vraies opportunités de métier à des populations sans diplôme, laisser AirBnB, ses concurrents ou des formules équivalentes se développer, c’est prendre le risque d’offrir de vraies solutions opérationnelles pour tout un pan de population qui n’attend que ça pour s’enrichir enfin.
Non, décidément, il vaut mieux distribuer du kick fiscal massif dans les parties, tant qu’on peut. C’est nettement plus positif, intelligent et si plein de promesses à long terme !
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