La
tragédie est décrite chaque jour par Paul Jorion
et d’autres analystes qui nous donnent par avance les photos de
l’accident à venir. Film noir, tragique. Inéluctable ?
Que
faire ? Le découragement gagne.
Sonne
l’heure de choisir : qui épongera les pertes ? Les citoyens ou
les investisseurs ?
Nous
proposons la signature d’un appel aux citoyens, un appel qui acte un
certain nombre de réalités et demande à notre
gouvernement de voter les décisions qui suivent.
Nous
actons que :
1.
Les pays d’Europe, l’Allemagne refusant de faire marcher la
planche à billet, vont l’un après l’autre vers un
endettement insupportable conduisant inéluctablement à une
faillite ou une insurrection.
2.
La valeur réelle de l’ensemble des banques, cachée par
des règles comptables, est probablement déjà
négative alors que la crise est devant nous.
3.
Les financiers et conseillers écoutés des politiques, aux
commandes avant la crise, le sont toujours.
4.
Etrangement, la crise ne semble pas changer leurs discours et leurs
croyances. Soit leur idéologie les porte à croire que le
« business as usual » sera de nouveau
possible, soit leur cupidité les pousse à amasser avant la
catastrophe et donc empêcher les réformes de fonds.
5.
Leur objectif est de protéger les actionnaires. Pour preuve, en pleine
crise, tout en recevant les aides de l’état, les banques ont
largement continué à distribuer des dividendes.
6.
Leur objectif est de faire porter les factures sur les citoyens en
transférant les dettes bancaires vers les états.
7.
Ils font croire qu’il est plus simple de gérer les faillites des
états que les faillites des banques. Ainsi la garantie par
l’état de l’ensemble du passif des banques (actionnaires,
déposants et créanciers), comme en Irlande, est la voie choisie
par l’Europe.
8.
L’effet domino que l’on veut éviter pour la faillite des
banques sera remplacé par un effet domino sur la faillite des
états.
Nous
proposons ci-dessous une loi d’urgence financière, amortisseur
de l’effet domino puisqu’il permettra suffisamment de marge de
manœuvre au cas par cas pour faire reprendre partiellement et de
façon différenciée le passif des banques :
1.
L’état enclenche, dès que possible, une procédure
de restructuration dans laquelle l’état est le liquidateur. A ce
titre, il valorise les actifs de la banque. En fonction de cela, il
détermine sa stratégie au cas par cas pour le passif. Les
dépôts peuvent être garantis intégralement voir
transférés dans une banque d’état avec le montant
d’actifs correspondant. Les actionnaires n’ont
théoriquement le droit à rien puisque la faillite correspond au
point où les actifs ne suffisent plus à rembourser les
créances.
2.
Soit l’état fixe une décote pour les créances qui
correspond à la valeur réelle des actifs restant et impose aux
actionnaires une valeur proche de zéro pour leurs actions. Il peut
apporter alors de l’argent sous forme d’augmentation de capital.
Il devient ainsi actionnaire ultra-majoritaire de la banque. Il revendra ses
actions éventuellement plus tard et touchera ainsi les justes
bénéfices des risques assumés pour secourir la banque.
Soit l’état impose de transformer une partie des créances
en actions ce qui permettra à la banque d’avoir de nouveau un
ratio de capitalisation suffisant pour absorber les risques.
3.
L’Etat peut décider de verser, à partir du budget de
l’état, dans une procédure à part, une prime
différenciée pour compenser les pertes de certains actionnaires
ou créanciers qu’elle souhaite préserver
jusqu’à un certain montant.
4.
L’état doit poser de façon transparente la
procédure, accessible à chaque citoyen. Des
représentants, spécialistes financiers indépendants,
doivent être désignés par la société civile
pour représenter les citoyens dans les négociations.
La
pression des citoyens peut encore faire éviter le pire.
Il
faut vous engager et signer.
Cet
appel sera donné au Président de la République, à
la ministre de l’Economie à chacun des députés
pour qu’ils initient cette loi d’urgence financière.
Paul Jorion
pauljorion.com
(*) Un « article
presslib’ » est libre de reproduction
en tout ou en partie à condition que le présent alinéa
soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est
un « journaliste presslib’ » qui
vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il
pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui
tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.
Paul Jorion,
sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix
dernières années dans le milieu bancaire américain en
tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié
récemment L’implosion. La finance contre l’économie
(Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La
Découverte : 2007).
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