Ce sont donc de nouveaux attentats, au bilan lourd, qui viennent de frapper Bruxelles. Avec 260 victimes (morts et blessés), nul doute que les événements du 22 mars 2016 laisseront une empreinte durable dans la politique belge et surtout européenne.
Avant tout commentaire, je vous propose le témoignage d’un lecteur, que je remercie au passage, qui a vécu une partie des événements de près :
« Mon bureau est situé très proche de la station Maelbeek. De là où je suis, je vois très bien l’angle que forme la chaussée d’Etterbeek avec la rue Joseph II, et une bonne partie de la rue elle-même. C’est une parallèle à la rue de la Loi, sous laquelle passe le métro qui traverse le quartier européen vers le centre de Bruxelles. L’une des sorties du métro Maelbeek donne sur cette rue.
Vers neuf heures et quart, mon attention a été attirée par l’agitation autour du carrefour formé par Joseph II et la chaussée d’Etterbeek : des gens criaient, les voitures semblaient ne plus savoir quoi faire, et deux flics en civil agitaient les bras pour rediriger le flot de véhicules.
À peu près au même moment, des personnes sont sorties du métro, plusieurs couvertes de sang, les habits déchirés. Certains s’assoient, à même le sol. D’autres s’allongent. Des militaires de patrouille habituellement dans ce quartier assez sécurisé (c’est le quartier européen et les chefs d’états et de gouvernements y passent régulièrement, toutes sirènes et cortèges policiers déployés) sont alors rapidement intervenues pour aider les premières victimes, pendant que leurs collègues s’engouffraient en courant dans la station.
Les informations de collègues de bureau, qui arrivent alors du métro ou qui étaient dans la rue quelques minutes plus tôt, sont encore confuses, mais indiquent une explosion avec beaucoup de fumée, aux sorties de métro du rond-point Schuman, quelques centaines de mètres en amont, ainsi que des blessés et de la fumée, là aussi, directement aux sorties du métro donnant sur la rue de la Loi et sur la chaussée d’Etterbeek.
Pendant ce temps, les premières sirènes de police se font entendre. Les passants, au carrefour, commencent à s’agglutiner aux angles, pendant que les premiers policiers imposent aux voitures de faire demi-tour. Il ne doit pas être plus de 9:30. Les premières ambulances et voitures de pompiers arrivent sur les lieux. Mon bâtiment est évacué, et le personnel de sécurité nous intime l’ordre de nous disperser et de rentrer chez nous.
En traversant la chaussée d’Etterbeek pour m’éloigner, je peux voir un triplet de pompiers disposant un drap blanc sur une civière. Il n’y aura pas que des blessés. Je rentre chez moi. »
Les événements se suivent et se ressemblent un peu, surtout lorsqu’ils sont tragiques.
On pourrait évoquer les récupérations politiques, de chaque côté, quasi-pornographiques dans leur crudité et dans leur rapidité, la fumée des lieux même pas encore partie que déjà les uns dénonçaient les postures des autres empêchant la majorité de faire avancer son petit bout de loi, sa petite révision constitutionnelle…
Attentats terroristes et protection de notre pays, la droite sénatoriale qui bloque la révision constitutionnelle est irresponsable
— Bruno Le Roux (@BrunoLeRoux) March 22, 2016
… Pendant que les autres fustigent l’immobilisme des premiers, ou leurs mesures inadaptées, ou viennent proposer des mesures à la fois super-pratiques et over-opérationnelles. Quant aux remarques condescendantes de politocards français à l’égard des Belges, elles démontrent encore une fois que le socialisme, corollaire inévitable d’une hontectomie pratiquée jeune, entraîne toujours l’atrophie cervicale qui explique à elle seule bien des comportements aberrants de nos dirigeants.
Bref, tous les petits stratèges de la sécurité en kit sont de sortie : vite, renforçons la sécurité ici et là, ajoutons des portiques, des contraintes, des règlements. Et même si c’est grotesque ou inadapté, cela fait bouger les lèvres des politiciens qui sont toujours très heureux quand elles bougent, même pour postillonner devant de bon gros micros mous médiatiques.
Cependant, dans la presse, dans la bouche de ces politiciens avides de micros, peu, cependant, notent que les mesures de sécurité qui furent prises suite aux événements de Janvier 2015, puis suite à ceux de Novembre dernier, n’ont absolument rien empêché.
Combien poseront la question pourtant légitime de savoir s’il n’aurait pas fallu passer au niveau d’alerte 4 avant les attentats, par exemple la semaine passée alors que la traque d’Abdeslam s’intensifiait ?
Combien demanderont des explications sur cette histoire de renforcement de la sécurité dans les aéroports ? Après tout, en France, nous sommes officiellement en état d’urgence depuis quatre mois. Décider de renforcer la sécurité renforcée, c’est mignon, mais ne serait-ce pas admettre qu’elle n’était pas si renforcée que ça ? Et surtout, à quoi ça va bien pouvoir servir, mis à part mobiliser encore du personnel à des tâches d’utilité douteuse sans aucune garantie d’efficacité ?
Et puis tiens, au passage, qui, par exemple, notera la facilité avec laquelle les politiciens arrivent à dégotter des policiers et des gendarmes supplémentaires (Cazeneuve, cette fripouille politicienne sans scrupules, vient d’en trouver 1600 sous le sabot d’un cheval), alors qu’ils devraient tous, déjà, être largement mobilisés pour lutter contre le terrorisme et assurer notre sécurité ?
Et là encore, cette question lancinante, que je repose : pourquoi diable mobilisons nous ces militaires alors que les derniers attentats ont éclaté dans des endroits (aéroport, quartier européen) sensément déjà sécurisés ?
Pourquoi, dans le même temps, a-t-on empilé des lois et des décrets visant à mettre le citoyen sur écoute, sous surveillance rapprochée alors qu’au vu des résultats et de l’aveu même des spécialistes du renseignement, ce flicage massif éparpillé tous azimuts ne sert à peu près à rien ?
Enfin, pourquoi n’hésite-t-on pas à multiplier les moyens (humains, financiers) pour les radars routiers, les contrôles sanitaires, à multiplier le nombre de gendarmes déployés pour débarquer chez des entrepreneurs qui auraient eu l’outrecuidance de ne pas payer leurs cotisations sociales, alors que, de l’aveu même des politiciens, le plus grand danger ne serait ni routier, ni sanitaire, ni fiscal, mais bien terroriste ? Et alors que Valls nous demande vaillamment de serrer les fesses nous habituer au terrorisme, Cazeneuve va courageusement continuer à mobiliser la police pour traquer Uber et les mères de famille en twingo qui frôlent le 59 km/h sur les départementales limitées à 50 en prétendant l’avoir mobilisé pour flasher des terroristes.
Bref.
Dans cette course haletante, personne ne semble vouloir s’arrêter et dire « A-t-on vraiment mis des moyens là où il faut ? » Les politiciens continuent à se moquer de nous en emballant leurs mesures catastrophiques et leurs explications consternantes dans de jolis papiers cadeaux sécuritaires. Les médias, qui devraient, en cette période plus qu’en toute autre, appuyer lourdement là où ça fait mal aux politiciens, aux élus et aux responsables, déroulent au contraire un tapis rouge de complaisance soviétique pour les autorités, roulent sur les mêmes sujets, les mêmes remarques, et personne ne semble avoir trouvé le temps ou le courage de poser les questions ci-dessus.
Le cirque politico-médiatique continue.