|
Ceux qui
rêvent d'une fin extrêmement rapide de la domination du moteur
à explosion dans les transports terrestres verront certainement leur
rêve se réaliser s'ils sont jeunes, mais risquent de devoir
supporter encore quelques années (une à deux décennies
pour le moins, voire plus) les vrombissements des multisoupapes et autres
turbo diesels à rampe commune.
Certes, le
silence d'un moteur électrique, son couple constant, sa
compacité et sa fiabilité mécanique en font une
perspective technologiquement hautement désirable, et j'aimerais,
comme beaucoup, voir apparaître rapidement des véhicules
hybrides pas chers, voire des véhicules électriques abordables
dont l'autonomie et la capacité de dépassement d'un poids lourd
sur route médiocre ne soient pas ridicules.
Mais j'ai peur
qu'il ne me faille attendre pour trouver ce type de véhicules à
prix compétitif sur le marché.
En effet, les
véhicules hybrides, et les principaux prototypes de véhicules
électriques, sont de très gros consommateurs de
matériaux rares sur terre. Ainsi, la Toyota Prius
(photo), première vente des véhicules hybrides, utilise des
quantités "importantes" (à l'échelle de la
dispnibilité des minerais rares) tels que le lanthane (La) et le
néodyme (Nd), au point que si le succès mondial de ce véhicule,
dont la version III est encensée par la critique, venait à
s'accroitre, une
pénurie de ces matériaux n'est pas
inenvisageable.
Le très
(trop ?) médiatisé prototype Nissan
Leaf, voiture 100% électrique en
préparation pour le groupe franco-japonais, commercialisée en
2011 selon le constructeur, souffre du même défaut (sans parler
d'une autonomie qui devra s'améliorer pour que ce type de
véhicule devienne Mainstream).
Je n'ai pas les informations à ce sujet concernant les prototypes
ultra médiatisés Tesla et Fisker, mais je suppose qu'ils se
heurtent aux mêmes barrières technologiques.
Il en
résulte qu'à l'instar de la Prius, pas spécialement
donnée, tous ces véhicules hybrides ou électriques de
première génération seront chers et n'ont pas vocation
à sortir du role de "niche players". Avant que les
véhicules hybrides, et plus encore électriques, ne deviennent
compétitifs, des ruptures technologiques visant à remplacer les
métaux rares par des matériaux de substitution sont
indispensables. Des
essais prometteurs de laboratoire, déjà relatés ici,
ont été effectués sur des polymères capables de
remplacer le platine (Pt, autre métal rare encore plus couteux) dans
les piles à combustible à hydrogène. Mais on en est
encore au stade du laboratoire, et le passage au stade de la grande
production industrielle risque de durer encore "un certain temps",
10 années au bas mot. Peut-être plus, moins probablement un peu
moins, en ce domaine comme en d'autres, la prévision est très
incertaine.
Pourquoi vous
faire partager mon intérêt pour ces questions ? Parce que je
suis prêt à vous parier que les constructeurs, au nom de l'escroquerie
mondiale au CO2, pardon, du développement durable,
vont faire le forcing pour que les états achètent massivement
des véhicules électriques non rentables à l'usage
comparé à un véhicule essence classique rendant les
mêmes services, pour la clientèle des administrations publiques
notamment, dont la plupart des véhicules sont il est vrai
cantonnés à des usages de courte distance.
Or vous savez
combien je considère toute subvention à la commercialisation
d'une technologie non rentable, fut-elle "verte", est un
gâchis éhonté de ressources qui seraient mieux
employées ailleurs (voir détails ici), et notamment
à développer les technologies vertes ET rentables de la
génération suivante. Bref, la subvention à la
commercialisation d'une technologie verte non rentable au nom du
développement durable se révèle... néfaste en
terme de développement durable. C'est une constante de l'intrusion
publique dans les processus de destruction créatrice privés: elle
produit presque toujours des effets contraires aux résultats attendus.
Vous me direz:
"mais le
pétrole n'est il pas une ressource épuisable"
?
Certes, le
pétrole fossile est jusqu'à preuve du contraire fini.
Mais outre que
les réserves connues se maintiennent aux alentours de 30 à 40
ans au fur et à mesure de nouvelles découvertes (il est normal que ce chiffre
n'évolue guère: il n'est pas intéressant de
connaître plus de 40 ans de réserves à l'avance tant la
prospection est coûteuse...), que les techniques de forage
en grande profondeur sont en train de faire de grands progrès (notamment sous l'impulsion de PME
françaises de talent, et oui, il y en a encore !),
que les technologies de transformation du charbon en carburant (Fischer Tropsch, procédé
constamment amélioré et peut être demain remplacé
par de nouvelles alternatives) nous en donnent sans doute pour
100 à 200 ans de plus au bas mot, et que les technologies de production de pétrole de synthèse par des
algues (voire des algues OGM), à défaut
d'être matures, semblent promises à un très bel avenir,
promettant la disponibilité d'un carburant quasi infini, et surtout
dont le prix de revient devrait baisser considérablement avec le
temps, puisqu'il sera "fabriqué" et non pas
péniblement extrait de couches de plus en basses de la croute
terrestre, et que les produits fabriqués voient leur prix de revient
à monnaie constante baisser inexorablement avec le temps.
Ajoutons que les
progrès technologiques du moteur à explosion, fulgurants dans
le domaine du diesel ces trente dernières années, ne se
ralentissent pas. Compression variable (PSA...), moteur à essence
à combustion spontanée (Daimler Benz...) tournent
déjà au banc d'essai et promettent beaucoup. Des applications
concrètes sont attendues entre 2010 et 2015.
Bref, entre la
fin de vie trépidante du bon vieux moteur Otto et la relève que
finira par assurer l'automobile électrique, il n'y pas à
s'inquiéter d'éventuels obstacles à notre
auto-mobilité, économiquement
si essentielle, en termes de ressources
nécessaires. Notre seul ennemi, ce sont des politiciens tantôt
stupides, tantôt cupides, tantôt en lutte contre le
système capitaliste, et leurs alliés, qui voudraient trouver
tous les prétextes pour nous faire abandonner la voie du
progrès technologique, et promulguent à cet effet un agenda
anti-automobile économiquement particulièrement nocif.
Vincent
Bénard
Objectif Liberte.fr
Egalement par Vincent Bénard
Vincent Bénard, ingénieur
et auteur, est Président de l’institut Hayek (Bruxelles, www.fahayek.org) et Senior Fellow de Turgot (Paris, www.turgot.org), deux thinks tanks francophones
dédiés à la diffusion de la pensée
libérale. Spécialiste d'aménagement du territoire, Il
est l'auteur d'une analyse iconoclaste des politiques du logement en France, "Logement,
crise publique, remèdes privés", ouvrage publié
fin 2007 et qui conserve toute son acuité (amazon), où il
montre que non seulement l'état déverse des milliards sur le
logement en pure perte, mais que de mauvais choix publics sont directement
à l'origine de la crise. Au pays de l'état tout puissant, il
ose proposer des remèdes fondés sur les mécanismes de
marché pour y remédier.
Il est l'auteur du blog "Objectif
Liberté" www.objectifliberte.fr
Publications :
"Logement: crise publique,
remèdes privés", dec 2007, Editions Romillat
Avec Pierre de la Coste : "Hyper-république,
bâtir l'administration en réseau autour du citoyen", 2003, La
doc française, avec Pierre de la Coste
Publié avec
l’aimable autorisation de Vincent Bénard – Tous droits
réservés par Vincent Bénard.
|
|