Vous
demandez vous pourquoi le monde de la finance s’est mis dans tous ses
états la semaine dernière ? La réponse est pourtant
simple : l’économie globale se disloque, et ses
éléments constitutifs se ramassent la tête la
première sur le chemin en pente d’une vie où le
pétrole est plus cher. Penchons-nous sur les différents cas.
Les
Etats-Unis pataugent dans la paralysie et la décadence et se tiennent
incrédules face au fait que leur exceptionnalisme ne puisse suffire
à renverser les lois thermodynamiques. Ce malaise
général les précipite dans une série
d’embarras spécifiques. Ce que l’on appelle leur économie
dépend de la financiarisation, puisqu’elle n’a plus grand-chose
à voir aujourd’hui avec la production de biens de valeur. Cette
financiarisation dépend du secteur immobilier, et de l’une de
ses branches en particulier : celle des banlieues (et de leurs centres
commerciaux et stands de burgers). Le carburant est devenu trop cher pour que
le système urbain reste
viable. Il n’est plus à la portée de qui que ce
soit. Même si le prix du pétrole baissait, les citoyens des
Etats-Unis n’auraient pas assez de sous pour s’en procurer.
Moralité : le projet suburbain est mort, tout comme
l’économie qui le faisait fonctionner.
Mais
il est de même pour les mégalopoles, ces géantes métroplexes jonchées de gratte-ciels. Ne
supposez pas une seconde que nous puissions transformer l’industrie de
construction de maisons en une industrie de construction d’appartements.
La fin du pétrole peu cher signifie que nous ne pouvons plus faire
tourner les villes à l’échelle du XXe siècle. Cela
inclue la taille des bâtiments aussi bien que l’organisme urbain
dans son ensemble. Mais personne ne semble le comprendre. De deux choses
l’une, tous les secteurs connectés à la financiarisation
offriront de moins en moins d’emplois, parce que cette
‘industrie’ est en pleine implosion. C’est exactement ce
qu’illustre la récente décision de la Réserve
Fédérale. Lorsque Ben Bernanke
remuait les lèvres la semaine dernière, les marchés
financiers ont été pris de convulsions. Il a laissé
entendre que son organisation puisse tempérer ses achats de dette
Américaine et de créances hypothécaires – les
dernières étant principalement de la dette originaire
d’entités et d’agences supportées par le
gouvernement. Voilà à quoi ressemble la ‘monnaie’
qui supporte l’industrie suburbaine.
Si
la Fed réduisait ses achats de dette papier, personne d’autre
n’en achèterait. La raison pour laquelle la Fed en achète
tant (85 milliards de dollars par mois) est que personne d’autre
n’oserait les toucher au taux d’intérêt offert
– zéro. Le Trésor et les vendeurs
d’hypothèques ne pourraient que les vendre à un taux
d’intérêt plus élevé. Mais le gouvernement
s’étoufferait sur des taux d’intérêts
supérieurs à zéro, parce que sa dette est trop
importante et ses futurs paiement si gigantesques qu’une augmentation
d’un moindre pourcent suffirait à détruire même la
fantaisie d’un équilibre économique.
Mis
à part cette équation malheureuse, l’entropie ne dort
jamais. Tout aux Etats-Unis, si ce n’est les Apple Stores et une
poignée de grosses banques, s’effondre –
particulièrement l’habitat humain et les ménages. Les
banlieues ne feront que perdre de leur valeur et de leur attrait. Les grosses
villes devront devenir plus petites (et de beaucoup !). Les sables
pétrolifères, le pétrole et le gaz de schiste ne
pourront pas voler à leur rescousse (ils sont trop chers pour
être extraits du sol). Le gouvernement, qu’il soit
fédéral, d’Etat ou local, n’aura plus assez
d’argent pour réparer les routes et effectuer des transferts
d’argent vers les comptes en banque de leurs indigents. Cette populace
perdra toute confiance en ses institutions… et le désordre
social qui en découlera donnera vie à une organisation
différente de ce qui se trouve sur notre sol. Avec un peu de chance,
cela n’impliquera ni despotisme ni guerre.
Si
le discours autour d’une tempérance des dépenses de la
Fed n’est qu’une rhétorique vide de sens, et qu’elle
continue d’acheter de la dette, elle finira par détruire la
crédibilité de la monnaie qu’elle émet. Ce
n’est rien de plus qu’un autre moyen de sombrer, bien que
celui-ci puisse s’avérer plus rapide pour la perte de
légitimité des gouvernements et des institutions.
Les
jeunes devraient se préparer à faire carrière dans
l’agriculture et les activités qui la supportent.
Considérez un déménagement dans une ville de taille
moyenne où les activités agricoles sont possibles, et
tenez-vous prêts à construire une économie différente.
Répudiez votre dette étudiante, puisque la fantaisie du
remboursement n’est rien d’autre qu’un harnais mental qui
vous empêche de préparer votre futur.
Voici
ce qu’il en est du reste de l’économie mondiale :
L’Europe
n’a pas assez de pétrole et de gaz pour s’auto-suffire.
Ses fournisseurs (la Russie et de nombreux états Islamiques) lui sont
hostiles. Comme pourrait le dire Tony Soprano, ‘fin de
l’histoire’. L’Europe a joué des jeux financiers
contre elle-même cinq années durant, et sa
crédibilité se tarit. Bientôt, elle entamera sa descente
vers une douloureuse réinitialisation économique. Son économie
de parc d’attraction de l’histoire de la civilisation prend fin.
Allez-y pendant que c’est encore possible, et prenez quelques photos de
ce à quoi le confort et l’art ressemblaient autrefois.
La
Chine implose sous le poids de son économie de copinage et de son
système bancaire. Bien essayé. Son fortune cookie lui dit
qu’elle est entrée trop tard dans l’ère
industrielle. Tout le reste n’est que désespoir : l’idée
de déplacer des centaines de millions de paysans vers de nouvelles
villes. Ils feraient mieux de planter du bok choy là où ils sont. Personne ne peut
correctement assumer que la Chine restera politiquement stable. Espérons
que son effondrement économique et politique ne se transforme pas en
guerre.
La
production de pétrole de la Russie est en déclin permanent.
Elle en a beaucoup, mais tire une grande partie de ses revenus en vendant du
pétrole à d’autres. D’où l’idée
de Vladimir Poutine de trouver autre chose sur quoi reposer
l’économie de son pays. Mais quoi ? Je ne pense pas que la
Russie pourra remplacer la Chine en tant que premier fabricant mondial de
pistolets pour la vinaigrette. Le secteur agricole semble être une
bonne option, et Vlad espère que le
réchauffement climatique puisse un jour lui permettre de le
développer. Dans tous les cas, la Russie pourrait
bénéficier, sur le long terme, de se garder de vendre tout son
pétrole et son gaz – bien que l’Europe de l’Ouest
s’en trouverait certainement affectée. Son point positif,
c’est que la Russie n’est pas handicapée par des
débats idiots autour du mariage homosexuel, de l’avortement et
de l’usage de la Bible à l’école.
Le
Japon. Désolé si je me répète. Il se dirige droit
vers une ère médiévale. Il n’a ni pétrole
ni gaz. Le hara-kiri financier du Japon entraînera avec lui le
système bancaire mondial – ou du moins aggravera les dommages
tout autour du monde. Une majeure partie de la fabrication de puces
informatiques est implantée au Japon, et ça aussi, ça
finira par disparaître à mesure que le Japon exhalera, soufflera
sa dernière toux de CO2.
Qu’est-ce
qu’il nous reste ? L’Amérique du Sud ? Pensez
jungle (ou désert, faites votre choix). Le Canada ? il y a de
l’idée. Peut-être le Labrador pourra-t-il devenir les
nouveaux Hamptons ? Deuxième plus grand
territoire… 30 millions d’habitants (2% de la population de la
Chine). Seul inconvénient : la vue côté sud.
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