Mes chères contrariées, mes chers contrariens !
Ce qui est drôle avec certaines de nos grandes
gueules… c’est qu’elles sont et resteront toujours des
grandes gueules. L’une des plus célèbres est sans doute
notre acteur Gérard Depardieu.
Il m’avait fait bien rire lorsqu’il avait
décidé d’uriner devant les toilettes de l’avion que
l’hôtesse ne souhaitait pas lui ouvrir pour une raison de
procédure aérienne – dont les vessies de certains
s’accommodent plutôt mal, surtout lorsqu’elles sont
pleines…
Et puis Gérard, c’est un mec normal, ou presque (il a un
peu plus de sous que les gens normaux, ce qui est bien le problème
d’ailleurs) ; pour le reste, comme il le dit dans sa lettre
ouverte dans le JDD (Journal du Dimanche), il est l’un des
nôtres, avec son diabète, son cholestérol, ou encore son
hypertension.
Depardieu, donc, ne souhaite pas se faire traiter « de
minable » publiquement et ne rien dire.
Dans sa lettre, il affirme avoir payé l’année
dernière 85 % d’impôts sur ses revenus, ce qui, si
c’est bien vrai, tout le monde en conviendra devient quelque peu
confiscatoire…
Il affirme également avoir payé plus de 140 millions
d’euros en impôts depuis 45 ans. Certains diront qu’il a
dû se tromper dans les montants. Ce n’est pas évident. Il
faudrait connaître le périmètre de son calcul, car il
parle bien d’impôts et pas d’impôts sur le revenu
uniquement.
Nous payons des charges sur les salaires, nous payons des impôts
sur le revenu, de la TVA à hauteur de 20 % sur chaque achat, des taxes
sur des taxes, des cotisations sociales, bref, la liste est quasiment sans
fin.
Si chaque citoyen s’amusait à calculer réellement
le montant de ses impôts sur 40 ans, en incluant tout, beaucoup
seraient sidérés du montant.
L’impôt
est nécessaire
Encore une fois, je fais partie de ceux qui pensent que
l’impôt est nécessaire. Qu’un État doit avoir
à sa disposition un certain nombre de moyens afin de pouvoir assurer
des tâches essentielles au bon fonctionnement de la
société dans son ensemble.
Je fais partie de ceux qui pensent que lutter contre la
pauvreté, c’est aussi assurer la sécurité de tous.
À quoi cela sert-il d’être riche en étant
entouré de très pauvres cherchant à vous voler…
Je fais partie de ceux qui trouvent admirable l’universalisme de
notre sécurité sociale par exemple.
Pourtant, lorsque l’on réfléchit bien à
tout cela, et quand bien même on soit pour toute cette
générosité, à un moment donné on ne peut
pas faire abstraction de la richesse disponible.
L’État-providence
doit mincir d’urgence
Vous l’aurez compris, c’est la seule raison finalement
justifiant que l’État-providence doit maigrir d’urgence.
Tout le reste n’est que littérature. Vous ne pouvez pas
prélever plus que la richesse créée.
Le léger problème que n’importe quel gouvernement
rencontrera, quelle que soit sa couleur politique, est celui mis en exergue
par la « Courbe de Laffer »
qui illustre cet article.
Il s’agit, en image, de démontrer le rendement
décroissant de l’impôt. Plus les taux sont
élevés et se rapprochent de 100 %, moins l’impôt
rapporte, puisqu’il décourage tout effort, et pas seulement pour
les Depardieu !!
Or, nos taux de taxation ont désormais atteint un taux que les
citoyens qui y sont assujettis trouvent clairement confiscatoire. Et ces taux
sont confiscatoires. Rien ne justifie que l’on vous prenne 75 % de vos
revenus. Rien.
Donc les gens s’en vont. Est-ce difficile à
comprendre ?
On peut hurler, crier, taper du pied, critiquer, insulter,
après avoir cassé l’idée de patriotisme pendant
cinquante ans, mis l’argent-roi tout en haut de la pyramide des
valeurs, ce qui se passe aujourd’hui est parfaitement logique,
rationnel et compréhensible. Il ne peut pas en être autrement.
Dans un monde ouvert, de libre concurrence, on peut faire le choix de partir
vivre ailleurs.
L’exode
fiscal s’amplifie
Vous n’aurez pas de statistiques. Le gouvernement cherchera
à dédramatiser la situation par tous les moyens. Mais les
indicateurs de la France d’en bas ne mentent pas.
De plus en plus de Français s’installent en Belgique.
Les cabinets de fiscalistes recrutent à tour de bras, et les
dossiers de clients candidats à l’exil fiscal sont de plus en
plus nombreux.
Le terme même d’exil fiscal est un mensonge. Au rythme
atteint aujourd’hui, ce n’est pas « un
exil », qui est par essence un concept unitaire, c’est un
« exode », qui lui est par nature un
phénomène de masse… Voilà l’importance des
mots.
Les Français partent, car ils se sentent finalement de moins en
moins attachés à leur pays. Les Français partent parce
que, encore une fois, certains ne veulent plus payer pour d’autres. Les
Français partent parce qu’ils considèrent qu’il y a
peu de différence entre vivre en Belgique et en France, (surtout
lorsque l’on habite la moitié nord de la France). Les
Français partent parce que la construction européenne, dont on
nous rebat tant les oreilles, a fait son ouvrage sur les âmes et les
esprits.
Alors, désormais, les Français qui ne veulent pas ou en
général plus payer peuvent partir… et ne s’en
privent pas, à la plus grande surprise de notre gouvernement qui ne
semble ni comprendre ce qui se passe, ni même prendre la mesure
d’un phénomène qui va bientôt aller au-delà
de l’exode fiscal pour tendre vers la fronde fiscale.
Le cas
Depardieu
Alors on peut ne pas aimer le bonhomme, ou l’aimer, peu importe.
Je ne l’accablerai pas et
ne le défendrai pas non plus. Je dis simplement que sa
situation est emblématique d’un phénomène qui se
développe sous vos yeux mais que personne ne veut prendre en
considération pour ce qu’il est : un rejet de
l’État-providence de la part de ceux qui le financent.
Les raisons sont nombreuses et je les ai déjà
évoquées. Mais il ne faut pas se leurrer sur la gravité
du changement en cours. Les « riches » ne veulent plus
payer pour les « pauvres ». Et compte tenu de
l’état de nos finances publiques, cela va vite devenir
problématique.
La force et
la contrainte, seules armes du gouvernement
Alors le gouvernement l’a déjà
évoqué. Il va falloir contraindre et forcer. Déjà
l’État envisage de renégocier les conventions fiscales
avec nos pays voisins. L’État mettra sans doute en place une
« exit taxe » très très
cher pour dissuader l’exode, puis certains députés
veulent vous retirer votre passeport et votre nationalité pour
« trahison fiscale » sans doute.
Bien sûr l’exemple vient d’en haut. Tenez, prenez le
premier secrétaire du PS, vous savez le parti de la majorité
présidentielle. C’est un homme sans aucun doute de très
grand talent et qui fut condamné pour emploi fictif à quelques
années de prison…
Les députés qui souhaitent retirer la nationalité
française bénéficient de régimes très très spéciaux qu’ils ne comptent
absolument pas remettre en cause.
Et là, j’entends déjà les cris des
bien-pensants !! « Vous êtes un
populiste !! ». Non et non. Soyons clairs. Réduire les
salaires, ou rendre tout simplement les indemnités parlementaires
« imposables » pour 500 députés, ne
changera strictement rien au montant de notre dette.
Il s’agit plutôt d’une vieille idée et
d’une vieille notion, disparues des
dictionnaires depuis bien longtemps, celles de patriotisme et
d’exemplarité.
Alors Messieurs les politiciens, avant de venir nous faire les poches
et la moral sur notre patriotisme, vous seriez bien inspirés de
démontrer préalablement le vôtre. Parce que pour le
moment, ce sont ceux qui votent les lois qui payent le moins et vivent des
impôts acquittés par les autres.
Quant à la nationalité de Gérard Depardieu, il
vous le dit lui-même, il vous rend son passeport, car il se sent
citoyen européen…
Comme quoi, vous avez réussi la construction de l’Europe
sur le dos des États-nations !! Ne vous plaignez pas, vous
êtes responsables de tout cela. Les actes ont toujours des
conséquences.
Allez je vous laisse, il faut que je prépare
« impôt » de départ pour Gérard
Depardieu. La bière (belge) va couler à flot.
Charles
SANNAT
Directeur des Études Économiques Aucoffre.com
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