Ce titre a le mérite d’aller droit au but. Il est intéressant du
fait qu’il ne provient pas d’un blog obscur ou de Zero Hedge, mais du
Telegraph, journal financier on ne peut plus mainstream :
« C’est Friedrich von Hayek, le célèbre économiste de l’école
autrichienne, qui a expliqué à quel point le système des prix est la clé de
voûte du capitalisme et de la prospérité de notre civilisation. Le fait que
les biens, les services, les actifs, l’argent, le temps, les idées et le
risque ont tous un coût oblige l’allocation optimale des ressources.
L’augmentation du prix du pétrole signifie que la demande a grimpé, ce qui
encourage les producteurs à trouver de nouvelles méthodes pour en extraire
davantage. Une baisse du prix du maïs signifie qu’il y a surabondance. La
baisse de rentabilité du maïs encourage alors les producteurs à quitter ce
marché. Adam Smith a créé le terme de « main invisible » pour
décrire ce processus qui aligne les intérêts des individus et coordonne leurs
actions pour le bien commun.
Les marchés libres peuvent bien entendu commettre des erreurs, mais bien
moins souvent que tout autre système d’allocation des ressources. La seule
autre alternative consiste à diriger l’activité de façon centrale, soit une
version extrême de la planification centrale (communisme) ou encore un aller
simple vers le désastre. Malheureusement, alors que nos dirigeants sont
censés être au courant, ils ont passé ces dernières années à miner le système
des prix et à le rendre moins utile et moins efficace, plantant ainsi les
graines de crises destinées à se succéder. Les remous que connaissent
actuellement les marchés, qui ont poussé le FTSE 100 22 % en dessous de son
pic récent et ont fait partir en vrille les taux et ont dopé l’or, sont l’une
des conséquences de ces actions. Loin d’être la manifestation de ce que la
gauche décrit comme le néolibéralisme, il s’agit en fait de l’échec de l’étatisme.
Les éléments déclencheurs des remous récents sont le ralentissement
chinois et des marchés émergents, qui ont fait baisser la demande pour le
pétrole, l’énergie et les matières premières. Ces économies furent dopées,
directement et indirectement, grâce aux assouplissements quantitatifs
domestiques et mondiaux qui ont suivi la Grande Récession de 2007-2009 et
autres interventions. En conséquence, de nombreux problèmes qui gangrénaient
ces pays ne furent pas pris à bras le corps et se sont empirés. Il était
inévitable que la réalité finisse par les rattraper, que la mauvaise dette
finisse par être passée en pertes et les ressources allouées à des
utilisations plus productives. Un autre terme pour ce processus est une
récession ou, au moins dans le cas de la Chine, un ralentissement.
Tout ce qui va de travers n’est pas de la faute des politiciens ou des
banquiers centraux, bien évidemment. Le secteur privé peut également
commettre des erreurs spontanées. Mais les économies américaine, britannique,
européenne et japonaise ne seraient pas dans leur état actuel si le système
des prix avait pu fonctionner sans interférences et si les décideurs avaient
permis davantage de liquidation des mauvais investissements. Reporter les
problèmes au lendemain peut faciliter la mise en place d’ajustements, mais
aussi permettre au déni de s’installer. Malheureusement, la
plupart des économies et des marchés du monde ont choisi la 2e option.
Depuis le crash de Wall Street de 1987, les banques centrales n’ont cessé
de perturber le système des prix afin de lisser l’activité économique et
d’apaiser le système financier. Ce fut possible grâce à la croyance dans le
pouvoir de l’activisme monétaire, la croyance que des actifs aux prix
toujours plus élevés sont bons pour la croissance.
Le drame est que malgré le fait que ces 2 théories sont tragiquement
erronées, l’establishment économique mondial s’y accroche malgré les
dévastations qu’elles continuent de provoquer. Une politique monétaire ultra
activiste crée un danger moral immense : il fait croire aux marchés
qu’on volera toujours à leur rescousse. Soit en baissant les taux, soit via
des assouplissements quantitatifs lorsque les prix des actifs se mettent à
baisser. Cela instaure un seuil artificiel de prix. Les traders appellent
cela le Greenspan, Bernanke et maintenant Yellen « Put » (sur base
de « put option », une option qui permet à son détenteur de vendre
un actif à un certain prix minimum). Résultat des courses, les politiques
monétaires et autres interventions régulatrices ont gravement perturbé le
système des prix. (…)
Au lieu d’évoluer librement, comme ils le devraient, les marchés sont
désormais faussés et corrompus. Ils envoient les mauvais signaux de
valorisation, ce qui garantit une myriade de mauvaises décisions de la part
des investisseurs. Une intervention manquée en engendre une autre pour créer
un cercle vicieux. Ce cycle a démarré il y a déjà plus de 25 ans,
générant à chaque fois des actions plus extrêmes. Mais, en fait, il
n’y a rien de neuf sous le soleil : Ludwig von Mises, un autre économiste de
l’école autrichienne, décrivait déjà avant l’heure ce genre de phénomène au
début du 20e siècle. Quelle est la prochaine étape ? Les taux négatifs,
suivis par des les hélicoptères déversant de l’argent. Les banques centrales
doivent s’assurer que l’économie dispose d’assez d’argent. Mais elle devrait
suivre des règles simples pour y parvenir au lieu de vouloir tout contrôler à
la seconde.
Les prix des actions devraient être déterminés par les interactions libres
des investisseurs. Mais aujourd’hui, ce sont les mots de la Fed qui font la
pluie et le beau temps. Ce n’est pas normal, c’est très mauvais pour notre
prospérité économique à long terme et politiquement très dangereux. D’autres
marchés affichent également des valorisations déconnectées. Le rendement des
obligations allemandes à 10 ans, de 0,168 %, signifie une croissance zéro et
une inflation zéro pour la décennie à venir, ce qui est absurde. Les
investisseurs qui se sentent abandonnés par les banques centrales fuient les
actions pour se tourner vers les valeurs refuges à des niveaux difficilement
explicables par l’analyse fondamentale. La tempête pourrait se calmer, mais
l’économie ne sera véritablement guérie que lorsqu’on s’attaquera enfin aux
causes profondes de ses maux. »