Maintenant que nous savons
tous que Lawrence Summers ne se présentera
pas comme candidat au poste de directeur de la Fed, le président Obama
est libre de l’envoyer en Syrie comme première arme humaine de
destruction massive, où il pourra semer suffisamment de confusion
entre les Alawites d’Al-Assad et l’opposition d’Al-Qaeda
pour transformer les deux factions en instruments de fonds propres
subordonnés et convertibles qui pourront être enfouis sur la
dernière page du bilan de Goldman Sachs pour que le monde n’en
entende plus jamais parler – et puis les frères Toll pourront être envoyés transformer la
Syrie en un casino géant / un complexe d’aide à
l’autonomie qui offrira des centaines d’emplois à des
contractuels Américains.
Il ne fait aucun doute que le
marché des actions partira dans tous les sens avant la fin de la
journée. Personne ne s’attendait à ce que Mr Summers s’arrête aux portes de la Fed, et il
faut dire que sa décision a rendu les investisseurs plutôt
nerveux, sans parler des grosses banques qui l’employaient de temps
à autres comme une sorte de solliciteur politique. Un vent de
soulagement a soufflé sur le Nord-Est de la nation à la
manière de l’air d’automne venu chasser
l’humidité tropicale fétide qui ruinait jusqu’au
mois dernier les coiffures de soirées dans les Hamptons.
Maintenant que nous nous
sommes occupés de la Syrie – ou que nous l’avons
condamnée à un purgatoire gouvernemental sans lendemain –
le monde peut concentrer ce qui lui reste d’attention sur la grande
réduction progressive des dépenses. Je suis avec ceux qui
pensent que nous verrons d’abord apparaître une phase de test. La
Fed décidera sans doute de réduire ses achats
d’obligation de 10 à 15% pour voir ce qu’il se passe. Et
ce qu’il se passera est parfaitement prévisible : les taux
d’intérêts sur dix ans flamberont au-delà de 3%, et
les détenteurs de papier Américain s’en
débarrasseront comme s’il s’agissait de couvertures
infestées par la gale. Houston, nous avons un problème…
Après un mois ou moins de ravages sur les marchés des obligations
et de l’immobilier, Mr Bernanke publiera un
petit mot qui stipulera en quelque sorte que tout ça
n’était qu’une blague. Et puis tout redeviendra comme
avant, la Fed s’en retournera à un QE illimité, ce qui
reviendra à déclarer la partie terminée.
J’ai de la peine pour
notre pauvre Bernanke. Il a essayé
d’entrer en compétition avec la réalité et perd
son souffle à l’approche de la ligne d’arrivée.
L’idée était de pomper suffisamment de monnaie
artificielle au sein de l’économie pour lui donner un air de
mouvance, mais tout ce qu’il a réussi à accomplir, pour
reprendre les termes employés par Eric Zencey,
est une commotion monétaire, une commotion qui s’est
limitée aux quelques bâtiments du cœur de Manhattan et aux
deux rangées d’immeubles qui s’étendent entre
l’East Side et central Park West. Le reste du
pays a mariné dans une torpeur aux relents d’encre de tatouage
et de liqueur au bureau de demande de SNAP Cards.
La Fed ne peut plus que
prétendre essayer de se sortir du trou qu’elle s’est
elle-même creusée. Le marché des actions est un proxy
pour l’économie, et une poignée de grosses banques sert
de proxy au public Américain. Tout ce qu’il reste n’est qu’un
trading à haute fréquence qui
prétend signifier quelque chose, un fantôme de valeur – et
plus personne, pas même les multi-diplômés en
crypto-sciences, ne peut prétendre comprendre ce qu’il se passe.
Lorsque la
réalité viendra à franchir la ligne d'arrivée
avant le pauvre Bernanke, tout volera en
éclats. Les supports artificiels s’effondreront et
l’économie Américaine sera exposée pour ce
qu’elle est : un paysage irréel de ruines dans lesquelles
il ne restera rien que de la valeur résiduelle. Très peu sont
ceux qui seront capables d’en vivre, et les bandes se battront partout
pour mettre la main sur ce qu’il restera. L’utilité de la
monnaie elle-même pourra bien disparaître, aux côtés
de la légitimité de quiconque qui prétendra avoir une
autorité institutionnelle. C’est ce qui arrive à ceux qui
essaient d’obtenir quelque chose avec rien.
Pour ceux d’entre vous
qui suivent encore les graphiques, notez que les prix de l’or et de
l’argent devraient continuer de monter et descendre au fil des
semaines, et que le prix du pétrole semble camper au-delà de
105 dollars le baril quelles que soient les circonstances. C’est tout
ce que vous devez savoir pour pouvoir prédire le destin des
économies industrielles.
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