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Cours Or & Argent

Derrière les apparats superficiels

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Publié le 26 décembre 2012
828 mots - Temps de lecture : 2 - 3 minutes
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Rubrique : Editoriaux

 

 

 

 

La presse s’est trémoussée comme la groupie qu’elle est devant l’exubérance de Mitt Romney lors du fameux premier débat de la présidentielle américaine, qui n’était pour moi qu’un autre de ces entretiens mixtes que l’on voit aujourd’hui partout. Regardez la désinvolture dont a su faire preuve Romney, face à ce pauvre Obama, engoncé dans sa morosité présidentielle et le malheur fatiguant de l’importance de sa personne – ou peut-être avait-il simplement avalé une gourmandise indigeste sortie des placards de la cuisine d’Air Force One, bu un mauvais cocktail, croqué dans une crevette à la trop forte personnalité, ou dégusté une empanada contaminée à l’E Coli, qui sait…


Ce qui est certain, c'est que l'exubérance de Mr Romney avait une saveur quelque peu piquante, un peu comme ces bières aromatisées à la citrouille que l’on trouve partout en cette saison, simplement parce qu’il n’a employé cette exubérance qu’au service du mensonge, de la fabulation statistique et de l’auto-contradiction. De temps à autres, sa frénésie frisait ce à quoi l’on faisait autrefois référence sous le nom d’hébéphrénie, un terme clinique utilisé pour décrire une personne dont l’euphorie est telle qu’elle n’a plus aucune notion de la réalité.


Ce manque de connexion avec la réalité correspondant parfaitement à l’air du temps, le public Américain ne peut qu’admirer une personne faisant preuve d’un tel dédain pour ce qu’il se passe dans l’univers. A mes yeux, Romney m’a donné l’impression d’être une personne prête à tout pour être élue, alors qu’Obama semblait manifester un sérieux doute quant à sa capacité à tenir les rênes.


Il est clair que les débats d’aujourd’hui ne reposent que sur l’idée que les raids politiques sur l’économie peuvent continuer à perdurer – depuis Fannie Mae à Medicare, jusqu’au pillage systématique de notre futur par les opérations mesquines de la Réserve Fédérale – et qui est en réalité tout le contraire de ce que la réalité nous réserve. En réalité, ce qui devrait caractériser notre temps n’est autre que le renversement sans scrupule de ces rackets jusqu’à ce qu’il n’en reste plus rien.


Le plus triste, c’est que tout le monde, depuis le gouvernement jusqu’aux bénéficiaires de coupons alimentaires et d’allocations aux handicapés, est pris au piège dans cette vaste structure de rackets que constitue notre vie nationale et son ampleur est bien trop terrifiante pour qu’on ose la regarder en face. Ce qui aux yeux de beaucoup apparaît comme étant une ‘conspiration des élites’ n’est autre que notre de manière de vivre. Citons comme preuve le caractère de plus en plus sinistre des crimes financiers de ces dernières années et la manière dont ils disparaissent dans les boyaux de l’Histoire sans que personne, ni les médias ni la police, ne daignent en parler. En des temps aussi sérieux que les nôtres, il se trouve que nous ne soyons pas des êtres sérieux. Tout peut bien se passer, plus rien n’a d’importance.


La réalité que tout le monde semble ignorer est la contraction inévitable des industries économiques tout autour du globe. Cette contraction est tout particulièrement brutale aux Etats-Unis, qui ont cessé de comprendre les rouages de la production industrielle dès les années 1970, mais sont toutefois parvenus à écrémer les efforts des autres nations grâce à leur réserve de devise, leur contrôle des fraudes et leur culture d’infrastructures de services clientèle de part et d’autre de leur verte campagne qui donnent l’impression qu’ils sont désormais incapables de toute création de valeur – ce qui est également la spécialité des escadrons prédateurs de capitaux d’investissements de Bain Capital. Tout ceci a été rendu possible par un pétrole peu cher et, sans lui, notre mode de vie partirait en fumée jusqu’à ce qu’il n’en reste qu’un tas de cendres froides. C’est cette maladie économique de stage avancé qui se répand aujourd’hui sur toute la planète.


Vous pourriez penser que la question de savoir quoi faire contre tout cela devrait être le sujet central des campagnes électorales actuelles – comment réorganiser l’industrie agricole, le commerce, les transports, les banques, l’éducation, et tous les autres aspects de notre existence. Il y aurait beaucoup de sujets à aborder, et beaucoup à faire, mais cela ne semble intéresser personne. Nous assistons à la place à des campagnes électorales fantoches n’ayant pour but que de perpétrer les vieux rackets et, sur ce point, il n’y a aucune différence entre Mr Romney et Mr Obama. Le caractère superficiel de l’apparat de ces débats ne fait que déguiser une dangereuse folie en un spectacle de clowns.


Rien de tout cela ne restera sans conséquences, mais dans une société qui au fil du temps a oublié jusqu’au sens du terme ‘conséquence’, personne ne semble plus prêter attention à rien. Le poète W.H. Auden surnommait son époque une ‘décennie lente et malhonnête’. Aussi terribles qu’aient pu être les années 1930, les enjeux sont aujourd’hui bien plus importants et notre manque d’attention clownesque cache derrière lui des chimères bien plus terrifiantes qui pourraient donner à ces années un caractère désuet.


 

 

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James Howard Kunstler est un journaliste qui a travaillé pour de nombreux journaux, dont Rolling Stones Magazine. Dans son dernier livre, The Long Emergency, il décrit les changements auxquels la société américaine devra faire face au cours du 21° siècle. Il envisage un futur prochain fait de crises sociales à répétition, la fin de la Surburbia et du modèle économique associé et une guerre mondiale pour les ressources en énergie. Il prédit la déconstruction des empires européens et américains et pense que, lorsque les convulsions seront terminées, le monde reviendra à un modèle décentralisé et local.
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