Les
financiers ont horreur du risque, tout en ne répugnant pas à le
faire supporter par les autres. Ils juxtaposent les termes d’aversion
ou au contraire de goût quand ils l’évoquent, mais
ce n’est qu’une façon de parler, comme ils en ont tant. En
réalité, ils ne supportent pas que les autres leur en fassent
prendre et le font vivement savoir quand c’est le cas.
Pour
avoir trop joué avec le feu, le gouvernement espagnol en fait les
frais sur les marchés, tout comme les autorités
européennes en raison de leurs atermoiements
répétés. On ne compte plus les discrètes
conférences téléphoniques à propos de la tenue
des élections grecques, mais rien n’est venu lever
l’incertitude qu’elles font planer. L’Italie en est prise
dans la tourmente, Mario Monti obligé de démentir la
nécessité d’un plan de sauvetage du pays, «
même à l’avenir » croit-il devoir préciser
dans sa volonté de convaincre. Trois crises sont en passe de se
conjuguer et les autorités discutent toujours pour savoir qui du FESF
ou du MES va renflouer les banques…
Devant
l’urgence, la BCE rompt les amarres avec le gouvernement allemand et
appelle à la constitution sans préalable d’une union
bancaire, mais pour plus tard, prête à prendre en charge la
supervision bancaire européenne, tandis que Wolfgang Schäuble réaffirme une fois encore le refus
allemand de toute mutualisation des dettes, sous une forme ou sous une autre,
qui ne serait pas assortie d’abandons de souveraineté.
Le
débat est en passe de se déplacer sur un terrain des plus
mouvants. Le ministre en vient à déclarer, pour justifier son
refus de céder aux pressions, que « ce n’est pas aux
marchés de battre la mesure, car alors la démocratie perdrait
sa légitimité ». Sage découverte, mais qu’est-il
proposé comme recours démocratique, si ce n’est un
contrôle des banques par la BCE et des structures de surveillance
budgétaire européenne aux vagues contours, chargées
d’appliquer des ratios et des règles sans fondement
économique ni justification politique ?
Angela
Merkel réclame du temps pour que les
réformes structurelles entreprises produisent leurs effets, « au
moment où quelques pays ont commencé à travailler dans
la bonne direction », mais le journal économique italien Il Sole
24 Ore proche de la Confindustria
(l’organisation du patronat) titre « Schnell,
Frau Merkel » et
Christine Lagarde parle d’un délai de trois mois, voyant large.
François
Hollande fait appel à l’imagination pour trouver une croissance
qui « ne naîtra pas simplement de l’incantation, pas
même de communiqués au terme de réunions
européennes ou mondiales ». Pas plus, ajoute-t-il, que «
de dépenses publiques supplémentaires.. .». Pour conclure
: « Elle peut surgir d’une volonté commune, celle que
l’Europe peut affirmer, de mettre en place des instruments nouveaux :
euro-obligations, instruments financiers… ». Pas de commentaire.
Billet
rédigé par François Leclerc
Son livre, Les
CHRONIQUES DE LA GRANDE PERDITION vient de
paraître
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