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Cours Or & Argent

Et si le dollar finit par s’effondrer ?

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Publié le 19 novembre 2007
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Rubrique : Histoire de l'or

 

 

 

 

Depuis 1969, les réserves internationales, constituées essentiellement du dollar américain, ont augmenté de plus de 2000%. En guise de comparaison, de 1949 à 1969, soit l’ère de Bretton Woods où l’or servait encore partiellement de monnaie, l’augmentation des réserves internationales fut de 55%(1). Il n’est pas question ici d’une augmentation de richesse depuis 1969, mais d’inflation monétaire. Celle-ci, déjà élevée, est presque toujours amplifiée par les pays détenant ces réserves internationales. Ainsi, seulement au cours des années 90, pas moins d’une dizaine de pays d’envergure ont subi une forte dévaluation de leur monnaie et un appauvrissement conséquent: le Brésil, le Mexique, le Japon, l’Indonésie, la Corée du Sud, la Malaisie, les Philippines, la Russie, l’Argentine et la Turquie. À l’exception du yen japonais qui, en 1995-6, a perdu 25% de sa valeur par rapport au dollar, les dévaluations des autres monnaies ont été de l’ordre de 40 à 100%. On pourrait faire le même bilan pour les années 80. 
  
          Le dollar américain a largement profité de ces crises internationales, car l’investisseur étranger s’y réfugiait. Il s’y réfugie encore aujourd’hui mais moins, car l’euro se présente maintenant comme alternative. Cependant, même si l’euro profiterait certainement d’une forte baisse du dollar à court terme, il est peu probable qu’il viendra à le remplacer, étant donné la réalité politique qui le sous-tend(2). Par ailleurs, malgré que les dirigeants de la banque centrale européenne aient pratiqué, jusqu’à ce jour, une politique moins inflationniste que ceux de la Réserve fédérale (Fed), on peut s'attendre à ce qu'ils succombent à la tentation de dévaluer l’euro face à une baisse soutenue du dollar américain. Les hommes de l’État ont toujours eu cette étrange solidarité de nous appauvrir également… 
  
          Le dollar se déprécie depuis quelque temps relativement à nombre de monnaies et puisque les investisseurs cherchent une monnaie stable l’euro en profite tout comme l’or et l’argent métallique. Cette tendance pourrait se poursuivre encore quelques années tout comme elle pourrait dégénérer en panique monstre. Une perte de confiance envers le dollar américain aurait des répercussions mondiales. Le dollar baisse car il est sujet, comme toutes les monnaies de papier, aux manipulations des hommes de l’État. Il est impossible de prédire l’avenir; néanmoins on peut porter un oeil vigilant sur les facteurs ayant le plus de chance d’influencer le dollar. 
  
L'investisseur asiatique 
  
          Le Japon et plus généralement les pays asiatiques sont ceux qui possèdent la plus grande quantité de dette américaine. Même si celle-ci ne cesse d’augmenter, les Japonais et de plus en plus les Chinois et les Coréens continuent de la financer. Considérant qu’ils reçoivent toujours moins en retour, la question est de savoir pourquoi ils agissent ainsi. La principale raison est que leurs dirigeants croient qu’en finançant la dette américaine ils maintiennent leurs exportations. Cela n’est pas faux, mais c’est oublier que le prix à payer pour ce faire est plus grand que les gains obtenus.  
  
          En investissant dans les obligations américaines, les investisseurs japonais achètent du même coup des dollars. À l’instar de la Fed, le gouvernement japonais affaiblit le yen pour encourager les exportations à bas prix. Cependant, si les exportateurs japonais sont avantagés, c’est au détriment des importateurs, et rares sont les entrepreneurs qui n’ont pas besoin d’exporter et d’importer en même temps. Plus important encore, cette dévaluation du yen n’enrichit d’aucune manière les consommateurs japonais qui voient leur pouvoir d’achat diminuer.  
  
          En ce qui a trait aux investisseurs chinois, le scénario est quelque peu différent, car leur monnaie est ancrée au dollar américain. Leurs exportations vers les États-Unis ont néanmoins augmenté grâce à la libéralisation de l'économie et à une expansion de l’entreprenariat, qui pourrait se poursuivre plusieurs années. Néanmoins, tout n’est pas rose en Chine en matière économique, car les dirigeants chinois créent également de plus en plus de crédit. Ainsi, même si leurs échanges sont florissants, leurs dettes le sont autant(3).  
  
          En somme, il est difficile de concevoir que les investisseurs asiatiques se précipiteront encore longtemps sur les obligations américaines. D’ailleurs, au mois de janvier dernier, le ministre des Finances du Japon, Sadakazu Tanigaki, évoquait la possibilité d’échanger une partie des dollars accumulés en or. Lorsque les Japonais seront suffisamment nombreux à se diriger vers d’autres sources d’investissement, le taux d’intérêt américain augmentera, risquant ainsi un effet domino sur tous les marchés (de change, obligataire, immobilier, boursier, etc.). Dans ce scénario, la plupart des marchés chuteraient à l’exception des ressources naturelles et des métaux précieux, qui serviraient de refuges.  
  
          L’utilisation de «politiques expansionnistes» est une injustice qui peut être pardonnée au nom de l’ignorance, mais pas lorsqu’on s’acharne en vain à les utiliser pour «relancer» une économie mal en point. Habituellement, lorsqu’on s’acharne sur quelque chose pour la changer sans résultat apparent, ou bien on est dans l’erreur ou bien on est criminel.  
  
Le négociateur obligataire 
  
          Si l'investisseur asiatique semble être l’homme à surveiller, le négociateur d’obligations n’est pas en reste(4). Le marché de la dette est beaucoup plus important que le marché boursier plus populaire, car il est dominé par les gouvernements qui nous offrent des cadeaux appelés à disparaître.  
  
          Les négociateurs d’obligations (représentants institutionnels ou bond traders) s’en donnent présentement à coeur joie grâce aux banques centrales qui leur permettent d’emprunter des obligations à un taux historiquement bas pour acheter d’autres obligations, de plus longue échéance, à rendement plus élevé. Dans le jargon financier on dit qu’ils empruntent «court» pour acheter «long». Lorsqu’on achète beaucoup d’une chose qui se trouve en quantité limitée, le prix de celle-ci a tendance à monter et une obligation qui a un prix élevé a également un taux bas.  
  
          Or, certains traders pourraient être pris de court si les investisseurs asiatiques se retirent du dollar américain. En effet, il n’est pas toujours facile de conclure une transaction rapidement, de sorte que lorsqu'il y aura un retrait massif du dollar, le taux long augmentera, entraînant à sa suite les autres marchés. La Réserve fédérale n’aura d’autre choix que de suivre. Ces négociateurs ayant été échaudés il y a quelques mois par les paroles non tenues de certains dirigeants de la Fed, on peut présumer qu’une autre surprise les ferait réagir plus vigoureusement. 
  
Le fonctionnaire de la Réserve fédérale 
  
          Les fonctionnaires de la Fed ne peuvent continuer indéfiniment leurs politiques expansionnistes sans que les investisseurs étrangers exigent un rendement supérieur pour le risque encouru. Ceux-ci financent approximativement 43% de la dette américaine et cela va en croissant depuis deux ans(5). Viendra un temps où ils iront voir ailleurs. Dans le but d’éviter un retrait du dollar la Fed pourrait envisager d’augmenter le taux court, mais cela risque de conduire les traders à vendre leurs positions entraînant ainsi les taux longs à augmenter plus rapidement que souhaité par la Fed. En somme, la Fed ayant permis un endettement sans précédent en facilitant l’emprunt comme jamais en 50 ans risque maintenant d’en subir les conséquences. Une réserve mondiale contrôlée par un seul pays est une erreur monumentale et les risques de dérapage sont nombreux.  
  
          Une augmentation trop rapide du taux d’intérêt risque d’étouffer l’économie mondiale, car la montée des différents marchés est essentiellement due à un crédit bon marché orchestré par la Fed. Bien sûr la Fed ne contrôle pas le monde entier, mais jamais auparavant une institution n'a-t-elle eu autant d’influence. Ses baisses du taux d’intérêt ont été suivies presque partout, entraînant les gens à consommer à crédit plutôt qu’à épargner pour l’avenir. Pensez à ces milliers de propriétaires hypothéqués jusqu’au cou lorsque viendra le temps de renouveler leur prêt! Malgré treize baisses consécutives du taux d’intérêt et une quantité astronomique de crédit rendu disponible grâce à ce taux réduit, la Fed n’obtient pas les résultats qu’elle désire. Ses dirigeants savent qu’il y a des effets pervers à leurs manipulations, mais ils semblent se dire que tant qu’ils ne sont pas trop visibles, ça va. Tout est caché et présenté dans un langage ésotérique pour se donner un air de grandeur. Ce n’est que prétention et ignorance.     Si la Fed augmente le taux court, les traders risquent d’augmenter le taux long encore plus, et si elle réduisait encore le taux court, les créanciers asiatiques risquent d’aller investir ailleurs. D’un autre côté, ceux-ci pourraient chercher davantage à diversifier leurs sources d’investissement malgré une hausse du taux d’intérêt américain, car les investissements déjà conclus perdraient de leur valeur relative. Bref, les fonctionnaires de la Fed, à l’instar de leurs semblables dans le monde qui les suivent comme des moutons, se retrouvent de plus en plus coincés à leur propre jeu. Malheureusement, c’est la population mondiale qui risque d'en payer le prix.  
  
          Partout dans le monde les banques commerciales s'appuient sur des réserves fractionnaires, ce qui leur permet de prêter plus d’argent qu’elles en ont en réalité. Des taux bas sur une période prolongée créent d’autant plus de crédit porté à disparaître. C’est à qui en créera le plus. Faut-il rappeler que les dévaluations compétitives des monnaies ont souvent été des préludes aux guerres?  
  
          La majorité des économistes ne nous sont plus d’aucun secours, car ils sont endoctrinés à une seule école de pensée: l’étatisme. Ainsi, des économistes réputés conservateurs ne cessent de nous répéter que l’économie devrait bien se porter grâce aux politiques expansionnistes de l’État, jamais remises en question. Ils se fient également à des mesures inadéquates pour nous dire que tout va bien. Pour eux, un PIB élevé est un signe de «santé économique», mais le PIB ne mesure pas vraiment la richesse, plutôt la quantité d’argent produite. De même, en se fiant à l’indice des prix à la consommation ils nous disent qu’on n’a pas à se soucier de l’inflation, mais ils prennent soin d’exclure les biens dont les prix sont volatils. Non seulement prennent-ils les effets pour la cause, mais ils ne considèrent que ceux qui font leur affaire.  
  
          En somme, les économistes populaires, autant du public que du privé, ont tendance à déformer la réalité pour la rendre conforme à leurs modèles dont ils ne veulent pas se débarrasser de peur de perdre leur statut de scientifiques. Or ceux qui agissent ainsi l’ont déjà perdu. Pis encore, en tentant de sauvegarder des méthodes dépassées ils laissent aux politiciens le champs libre pour détruire l’économie. En effet, le Léviathan ne cesse de créer de la dette et de réduire le pouvoir d’achat de la monnaie avec l’approbation ou, à tout le moins, le silence des économistes et autres analystes financiers.  
  
          Les rares critiques qui osent présenter une alternative crédible le font souvent à leurs risques et périls tellement l’endoctrinement est grand. Lorsqu’on propose un retour à une monnaie métallique, moins sujette à l’inflation des hommes de l’État, on passe pour un réactionnaire avec une analyse dépassée. De même, lorsqu’on ose dire que les soins de santé, l’éducation et les régimes de retraite seraient fournis plus efficacement par le secteur privé on se fait traiter de tous les noms. Il faudra bien se rendre à l’évidence, les hommes de l’État manipulent la vérité et offrent ces services en taxant toujours davantage ou, pis encore, en créant de la fausse monnaie. Les gouvernements n’arriveront jamais à être efficaces, car ils taxent et subventionnent plutôt que de laisser «parler» les prix. Ce n’est pas tant une question de compétence que de moyens utilisés.  
  
          Plutôt que de réduire leur rôle en admettant qu’ils ne peuvent contrôler une économie, ils tentent de la contrôler davantage en prétextant qu’ils l’avaient mal planifiés. Or cette prétention de pouvoir planifier l’action humaine est la source de tous les maux, car elle n’est pas planifiable. Il y a coopération et création de richesse lorsqu’une économie est libre, conflit et appauvrissement lorsqu’elle est contrôlée et planifiée. L’économie possède déjà ses propres contrôles de sorte qu’elle n’a nul besoin de contrôle additionnel, nommément politique.  
  
La montée de l'or 
  
          L’économie se suffit à elle-même dans tous les domaines y compris le monétaire. L’or et l’argent métallique ont de tout temps servis de monnaies. Moins l’État intervenait dans les questions monétaires, plus les populations étaient prospères et vice versa(6). Au cours des dernières années le prix de l’or ne semble avoir augmenté qu’en rapport au dollar, mais en réalité il n’a cessé d’augmenter relativement aux autres monnaies depuis les années 70. Depuis trois ans, la montée de la valeur de l’or exprimée en dollar n’est que plus prononcée par rapport aux autres monnaies, mais toutes les monnaies fiduciaires pourraient baisser si les gouvernements ne cessent de les dévaluer à tour de rôle. Bien que la tendance actuelle soit baissière, il est probable que le dollar reprenne de la vigueur relativement aux autres monnaies. L’important est de se rappeler que cette vigueur n’est que relative, car toutes les monnaies de papier perdent de leur valeur relativement à l’or et l’argent métallique. Le système monétaire à taux variable est un système injuste qui est porté à disparaître et le plus tôt sera le mieux.  
  
          Le dollar, comme toutes les monnaies fiduciaires, ne tient qu’à la confiance que les gens lui accordent. Une perte de confiance dans le dollar américain pourrait dégénérer en une crise sans précédent étant donné la quantité astronomique de monnaie fiduciaire à l’heure actuelle dans le monde. Rappelons que cette monnaie, ce crédit, a pour corollaire une dette tout aussi impressionnante qui risque d’être dévaluée par les gouvernements. Vous dévaluez une dette en créant de la monnaie à la tonne. Ce faisant, vous risquez également de perdre cette monnaie comme un ballon trop gonflé qui vous éclate au visage.  
  
          Il y a trop d’acteurs dans le monde pour qu'on puisse prédire l’avenir, mais étant donné les manipulations sans précédent de la monnaie par les gouvernements, il est à conseiller d’être prudent. L’or et l’argent métallique sont donc recommandés dans un portefeuille, car ils constituent une assurance contre ces manipulations. Lorsque les gens réaliseront qu’ils ne peuvent faire confiance à l’État pour gérer la monnaie ou quoi que ce soit d’autre, seuls les métaux précieux ayant déjà servis de monnaies maintiendront leur valeur. Il en est ainsi car une monnaie métallique est moins sujette aux manipulations des hommes de l’État.  
  
          À l’heure actuelle, l’or et l’argent métallique ne sont pas des monnaies, mais ils se transigent comme s’ils en étaient, car ils constituent les meilleurs candidats potentiels. Leur utilisation industrielle en qualité de métaux leur confère un prix plancher qui n’existe pas avec une monnaie fiduciaire. Si l'on considère leur quantité limitée et la demande accrue qui suivra une fuite du dollar, on peut envisager que la hausse de leur prix va s’accélérer.  
  
          La confiance envers une monnaie est un sentiment qui se perd très rapidement. Un pays d’envergure qui décide d’utiliser l’or comme monnaie pourrait avoir un effet domino partout dans le monde. Lorsque les gens commenceront à avoir peur de perdre leur pouvoir d’achat ils fuiront toutes les monnaies de papier pour se réfugier dans les biens tangibles dont l’or et l’argent de métal. Il ne sert à rien de combattre cette tendance naturelle, d’autant moins qu’une monnaie métallique est le moyen le plus juste d’échanger et de s’enrichir. Au contraire, forcer les gens à transiger avec une monnaie fiduciaire n’amène qu’incertitude, privilèges, appauvrissement et chaos. Ainsi, plus tôt on reviendra à une monnaie métallique, plus tôt on pourra se consacrer à produire une richesse durable. 
  
 

1. Dans son article «Asia, its reserves and the coming dollar crisis

» (FinanceAsia.com, 21 mai 2003), Richard Duncan fait mention d’une augmentation de 2000%, mais les chiffres dont il se sert sont vieux de trois ans. Depuis, non seulement la tendance n’a pas changée, mais elle s’est accélérée. 

2. En disant les choses ainsi, je reprends à mon compte les grandes lignes de l’article «The US dollar and the gold price» de Paul van Eden (Kitco.com, 23 janvier 2004). Il s’agit d’une comparaison entre le prix de l’or en dollar et l’or exprimé par un ensemble de 28 monnaies. Van Eeden spécule également en tentant de prévoir où s’en va le dollar. Très bon! 

3. Dans l'article «Boomtown China: Opportunity and Crisis» (Mises.org, 28 janvier 2004), Grant M. Nülle nous rappelle que malgré une libéralisation des échanges commerciaux de la Chine avec le reste du monde, à l’instar de nos social-démocraties, ce pays «imprime» de la monnaie et s’endette à un rythme fou. 

4. Il y a également un marché d’échange de taux d’intérêt (Interest Rate SWAP Market). Il s’agit d’un produit dérivé des obligations qui a pris beaucoup d’ampleur depuis une quinzaine d’années. Ce marché offre aux entreprises un plus grand éventail de financement, mais puisqu’il est moins liquide que le marché obligataire il est plus difficile de renverser ses positions. De sorte qu’une variation soudaine du taux d’intérêt aurait potentiellement de graves conséquences. 

5. À voir l'article «The Mistakes Of Our Grandparents?» (ContraryInvestor.com, février 2004) si ce n’est que pour le graphique qui vous laisse bouche-bée. 

6. Murray N. Rothbard l’illustre abondamment dans A History of Money and Banking in the United States

 

André Dorais

 

André Dorais a étudié en philosophie et en finance et vit à Montréal.  Essai originellement publié par Le Québecois Libre

 

 

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