Les
élections américaines et le prochain renouvellement de la
direction chinoise ont bon dos : un G20 finance s’ouvre à
Mexico en l’absence de nombreux ministres des finances et dans la plus
grande indifférence. Des périls vont être
identifiés, des recommandations formulées, puis chacun prendra
dans deux jours son vol de retour. Ils ne pouvaient rien décider dans
ces conditions, expliquera-t-on. Peut-être ne savaient-ils pas non plus
quoi faire…
La
cause n’est certes pas totalement perdue : les Américains
pourront toujours repousser l’échéance de la muraille
budgétaire, ou bien en modifier les termes à la faveur
d’un accord bipartisan, une éventuelle victoire de Mitt Romney pouvant toutefois créer une grosse
secousse ; les Européens sauront sans doute bricoler de quoi tenir la
Grèce à flot une année ou deux de plus, en attendant la
suite, si le Parlement grec avalise d’une courte majorité les
nouvelles mesures de rigueur la semaine à venir. Une chose
néanmoins se précise : les banques devraient finir par obtenir
les délais et assouplissements dans la mise en œuvre de
Bâle III qu’elles réclament, au nom d’une relance de
l’économie qu’elles ne susciteront pas. À en croire
un tel scénario, la crise serait presque devenue une routine.
Que
ce soit au Japon, aux États-Unis ou en Europe, elle n’est pas
dans une de ses phases aiguës, quand des décisions sont
finalement prises à l’arraché (sans être en
règle générale assorties de leurs modalités
d’application, qui font toute la différence). Non, elle est
sourde, ce qui est bien plus préoccupant, car cela rend encore plus
aveugles et démunis ceux qui tiennent les commandes. Car peut-on
encore croire que les évènements se déroulent suivant un
plan préparé à l’avance ?
Les
Européens avaient pris de l’avance, mais ils sont
désormais rattrapés par les Américains et les Japonais,
et la crise redevient ouvertement mondiale, ce qu’elle n’a
cessé d’être. Ce qui ne lui donne pas d’avantage de
solution, les banques centrales étant au taquet et ne pouvant que
poursuivre ce qu’elles ont engagé, sans autres résultats
que de provisoirement calmer le jeu. Mais jusqu’à quand ?
Les
pronostics vont bon train sur ce qui devrait finalement survenir. Les uns
penchent pour une brusque accélération – en reconnaissant
ne pas savoir où, quand et comment cela se produira et craquera
– d’autres fondent leurs espoirs dans la poursuite de
l’étrange situation actuelle, un peu comme entre deux
bombardements, quand le calme semble irréel et que l’on
s’attend à tout moment que cela pète à nouveau.
À
plus long terme, les paris sont ouverts en faveur de deux options : le
démarrage d’une inflation salvatrice et destructive à la
fois, ou une longue récession et déflation. Angela Merkel vient pour la première fois
d’évoquer cette dernière, en parlant de cinq ans et plus
pendant lesquels il va falloir « retenir son souffle ».
Si
la purge est inévitable, la manière dont elle va être
administrée est inconnue. Car la restructuration d’ensemble de
la dette apparaît aujourd’hui comme une hypothèse
d’école, seul choix conscient qui pourrait toutefois être
fait, et dont les implications en font un tabou absolu. Par défaut, il
ne reste que les deux précédents, mais le choix
résultera d’un enchaînement de circonstances non
maitrisé, et non pas d’une décision
réfléchie, car cela reviendra à arbitrer entre la peste
et le choléra. À moins que…
Billet
rédigé par François Leclerc
Son livre, Les
CHRONIQUES DE LA GRANDE PERDITION vient de
paraître
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