Par Hiroko Shimizu et Pierre Desrochers
Le
forage horizontal combiné à la fracturation hydraulique a transformé des
énormes quantités de substances physiques inutiles en des ressources
précieuses, un développement qui a pris par surprise les pessimistes
énergétiques.
Par
exemple, il y a moins d’une décennie que Julian Darley, le fondateur de
l’Institut Post Carbon, a publié son tract “High Noon for Natural Gas”
[« Le zénith pour le gaz naturel », NdT] dans lequel il prévoyait
des pénuries imminentes. Toutefois, comme cela a toujours été le cas depuis
le commencement de l’ère des combustibles fossiles, l’ingéniosité humaine
prouve encore une fois être la ressource ultime : nous vivons désormais
dans une ère d’abondance du gaz naturel, qui est à la fois bon marché et
propre.
La
fracturation hydraulique a été ces derniers temps l’une des rares
lueurs d’espoir dans le paysage économique américain, grâce à la création de
centaines de milliers d’emplois directs et à l’amélioration de la
compétitivité pour les industries basées aux États-Unis qui consomment de
grandes quantités de gaz naturel, et qui ont significativement réduit la
facture énergétique des ménages – dans certains cas de plus de 10%. À la
différence de l’approche « fiscale, réglementaire et décroissante »
favorisée par les Nations unies et d’autres bureaucrates, qui a échoué
partout à apporter des résultats significatifs, l’économie américaine a
significativement réduit ses émissions globales de gaz à effet de serre en
substituant le gaz naturel au charbon.
Toutefois, dans un monde où
aucune bonne action ne reste impunie, la fracturation hydraulique pour le gaz
et le pétrole a été accusée par certaines personnes, qui n’ont pourtant pas
de meilleure alternative réaliste, de polluer les nappes phréatiques avec les
fluides de fracturation, le méthane – le principal composant du gaz naturel –
et les eaux usées des opérations de forage. En plus de cela, certains
chercheurs se sont inquiétés des fuites de méthane potentiellement
significatives dans les sites de production, un problème qui est considéré
comme majeur, puisque le méthane a plus de 20 fois le potentiel direct de
réchauffement planétaire du dioxyde de carbone sur une période de 100 ans.
Comme avec
toute nouvelle révolution technologique, les préoccupations liées à la
fracturation hydraulique ont pavé la voie aux prophètes de malheur et aux
pessimistes comme le cinéaste Josh Fox, dont les documentaires
anti-fracturation « Gasland » ont livré le message que de nombreux
activistes et journalistes voulaient entendre tout en inculquant la peur –
« de l’huile sur le feu » – auprès de gens bien intentionnés mais
mal informés. Comme toute opération humaine, la fracturation n’est pas
parfaite. Mais il faut séparer le battage médiatique des faits, regarder la
forêt plutôt que l’arbre, et reconnaître le fait que les gens ont longtemps
tenté de mettre de l’huile sur le feu dans certaines parties des États-Unis
où le gaz naturel s’est naturellement infiltré jusqu’à la surface.
La
contamination aquifère de la surface
La
profondeur des formations géologiques de gaz de schiste varie généralement de
150 mètres à 4,100 mètres sous la surface, bien en dessous des aquifères
d’eau potable qui sont typiquement trouvés à moins de 45 mètres de la surface.
Bien que les opérations de fracturation doivent souvent passer par ces
aquifères, l’utilisation du tubage et de la cimentation empêche la
contamination des formations géologiques souterraines environnantes.
Au cours
des dernières années, certains cas de contamination de l’eau ont été relevés
(Silt, Colorado ; Dimock, Pennsylvannie ; et Pavillion, Wyoming) et
activement médiatisés par les opposants à la fracturation. Mais jusqu’à
présent, il n’y a pas de preuve concluante de contamination de l’eau, un problème
qui devrait être évident s’il était significatif, à la lumière des plus de
80,000 puits qui ont été forés dans 17 États différents depuis 2005. Certes,
les défaillances d’équipement et la mauvaise gestion des opérations peuvent
parfois être une réalité, mais personne ne suggère que nous sortions toutes
les voitures de la route lorsqu’un fabricant émet un rappel de produit. À la
différence de la fracturation, les voitures tuent les gens, mais la plupart
d’entre nous comprennent que l’humanité se porte beaucoup mieux avec que sans
voitures. La solution est de rendre les voitures plus efficientes et plus
sûres, pas de les enlever de la route jusqu’à ce que des produits de bien
meilleure qualité se présentent.
Fait intéressant, alors que de nombreux
activistes écologistes focalisent leurs efforts sur des risques pratiquement
inexistants avec la fracturation, ils ignorent typiquement des problèmes
potentiellement plus significatifs. Par exemple, les opérations municipales
mal gérées ou non-existantes de vidange des égouts sont un problème bien plus
important de pollution de l’eau que les fluides de fracturation le seront
jamais. Les pesticides pulvérisés sur les champs peuvent également atteindre
les aquifères contenant de l’eau. Selon une enquête géologique américaine,
entre 1992 et 2001, 9,6% de l’eau des ruisseaux dans les zones agricoles, et
6,7% de l’eau courante dans les zones urbaines, ont affiché des
concentrations de pesticides supérieures aux points de référence pour
l’eau en matière de santé humaine. Cela étant dit, dans la plupart des cas,
la question n’est pas réellement problématique pour les êtres humains, bien
qu’elle puisse parfois l’être pour la vie aquatique et la faune piscivore.
Bien
qu’elles ne soient pas parfaites, ces opérations ne devraient pas être une
cible de grande priorité pour les gens qui s’inquiètent de la contamination
de l’eau souterraine et de l’eau de surface.
Les
fuites de méthane dans les sites de production
Une autre
problématique environnementale extrêmement médiatisée est la fuite de méthane
dans les sites de production. Certes, le méthane est le second gaz à effet de
serre le plus prévalent émis par les activités humaines – l’industrie, la
gestion des déchets, l’agriculture et le bétail – aux États-Unis, mais une portion
significative de ce gaz provient également de sources naturelles (zones
humides, océans et lacs).
Selon l’Agence de
protection environnementale américaine (EPA, en anglais), plus de 60% des
émissions mondiales de méthane totales peuvent être attribuées aux activités
humaines. Bien sûr, ce nombre doit être pris avec des pincettes. Après tout, si tout le bétail dont la
présence est attribuée aux activités humaines était d’une certaine manière
voué à disparaître, les animaux sauvages émetteurs de méthane comme les
bisons, les cerfs, les chèvres de montagne, les moutons et les espèces plus
petites de rongeurs, prendraient bientôt le relais de leur niche écologique.
Quoiqu’il en soit,
les émissions annuelles mondiales de méthane provenant de toutes les sources
sont estimées à environ 566 téragrammes par an.
En 2013, une équipe de l’Université
du Texas a enquêté sur 190 sites de production américains et a calculé que le
taux de fuite moyen par an dans le pays était d’environ 0,42% de la
production brute de gaz naturel (environ 2,3 téragrammes). En d’autres
termes, les émissions de fuite de méthane liées aux opérations de
fracturation représentent seulement 4‰ de 1% des émissions mondiales de
méthane – encore une fois, c’est un problème minime qui ne devrait pas être
une priorité.
En revanche, les animaux sauvages –
en excluant le bétail – rotent et pètent 8 à 15 téragrammes de méthane chaque
année – environ 4 à 6,5 fois plus que les émissions liées à la production
totale de gaz naturel aux États-Unis – alors que les termites, les
mille-pattes et autres arthropodes produisent environ 20 téragrammes de
méthane annuellement, environ 9 fois plus que la fuite moyenne de gaz naturel
aux États-Unis.
Il faut également mentionner que
selon une estimation, on suggère même que les termites et les arthropodes
pourraient produire jusqu’à 100 téragrammes par an !
La nature n’est pas votre amie
Nous vivons dans une période
curieuse où l’espérance de vie humaine et la santé globale sont meilleures
que jamais grâce à une énergie encore plus abondante et encore plus
abordable, et grâce à des avancées scientifiques de toutes sortes, alors que,
paradoxalement, de nombreuses personnes voient la nature comme
intrinsèquement bénigne et les inventions et produits humains comme fondamentalement
mauvais.
Comme toutes les nouvelles
technologies, la fracturation hydraulique contient évidemment certaines
inconnues et son développement implique la prudence.
Mais ses avantages évidents ne
devraient pas être ignorés à cause des peurs largement exagérées, ignorant
par la même occasion des problèmes plus pressants. Les émotions seules sont
un pauvre guide pour la conduite des affaires humaines. Pourquoi ne pas
récolter ces ressources bénies, et les partager avec vos proches ?
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