Avertissement : je suis énervé.
Ségolène qui va tenter de voir François à New
York alors que Valérie a fait le voyage avec son homme dirait que
c'est « une saine colère ». Merci de votre indulgence.
Mes chères contrariées,
mes chers contrariens,
J'avais préparé (enfin
presque) une superbe chronique sur le fait qu'il fallait
impérativement sauver le soldat Auto-entrepreneur... Mais il n'y a pas
à dire, il est compliqué par les temps qui courent de se
focaliser sur un seul sujet. Cependant, finalement, vous allez voir, tout est
lié!
J'ai eu l'occasion aujourd'hui de
discuter avec un patron de banque.
A la question « comment
sentez-vous l'économie », la réponse fut simple : «
Mal ! »
A la question « que faudrait-il
pour que ça aille mieux », la réponse fut : « Que
ma banque soit en Suisse, je perds tous les jours des clients parmi mes
clients les plus fortunés. C'est une catastrophe. »
Là, normalement, vous commencez
à voir où je veux en venir. Justement à mon soldat
Auto-entrepreneur. Il y a deux façons de voir l'économie.
La première, uniquement à
travers le prisme d'indicateurs macro-économiques qui sont à la
conjoncture ce que la ligne Maginot était à la défense
de la France, c'est-à-dire un doux rêve inutile ayant une guerre
de retard.
On ne peut plus piloter un pays en
regardant dans ses rétroviseurs. Les statistiques sont –
logiquement – toujours en retard.
La deuxième, c'est de laisser
ses sens en alerte et de contempler la France d'en bas. La vraie, celle qui
trime, qui travaille, qui souffre, qui réussit, qui rit, qui pleure,
peu importe, mais de regarder la vraie vie.
La vraie vie donne de vrais
indicateurs. Je vous donne un exemple. Si vous voulez savoir comment se porte
le marché automobile, vous pouvez faire deux choses. Rentrer dans une
concession discuter 5 minutes avec quelques vendeurs. Vous pouvez aussi
regarder les parkings de stockage de voitures. Pleins, c'est que ça ne
se vend pas. Vides, tout va bien. C'est simple l'économie vue d'en
bas.
Pour l'immobilier, cela fonctionne
aussi. Vous allez voir une ou deux agences et là, une fois que vous
n'avez rencontré que des dépressifs se voyant
déjà au chômage et angoissant pour l'avenir, vous avez
compris... Ce que les statistiques vous expliqueront dans 3 mois.
Je connais d'ailleurs
déjà les gros titres de la presse : « Immobilier, la
baisse est là, profitez-en !! »
Bref, dans ce monde qui va mal, dans
notre pays aux lois complexes et nombreuses, où même la taille des
noix et des abricots est fixée par arrêté
ministériel, il y a eu une grande avancée.
Cette grande avancée, c'est le
régime des auto-entrepreneurs.
Il n'est certainement pas parfait,
certaines entreprises s'en servent même (les méchantes) pour
faire travailler des « quasi-salariés » de cette
façon-là. Certes, tout cela nous le savons. Ce n'est pas bien.
Mais, le statut d'auto-entrepreneur,
c'est aussi la possibilité, enfin, d'entreprendre sans commencer par
recevoir des factures avant même d'avoir son premier client !!
C'est un espace de liberté, qui
permet de libérer les énergies, d'essayer, de tenter l'aventure
de la création d'entreprise.
Il n'y a aucun cadeau dans ce statut.
Il faut payer plus de 20 % de son chiffre d'affaires, et d'ailleurs, celui-ci
est limité à 32 000 € pour les services et à 80
000 € (en gros) pour le commerce... Bref, pas de quoi devenir Bernard
A. et partir en Belgique.
En revanche, dans un monde avec de
moins en moins de travail, c'est la possibilité de créer son
propre emploi. Pas pour tous, bien sûr. Le taux d'échec est
même important. Mais l'échec de quoi ??
Je tente une aventure. Elle ne
réussit pas. Quel est l'échec ? Je suis allé au bout
d'un rêve. Celui de créer.
Ce n'est pas un échec que
d'essayer, ça l'est de ne rien pouvoir tenter.
Le problème, voyez-vous, c'est
que les artisans, représentés par le lobby des Chambres des
Métiers, râlent, vitupèrent, et hurlent à la
concurrence déloyale de la part de ces milliers de petits
auto-entrepreneurs, qui avant travaillaient au noir, soit dit en passant !!
Ne touchez pas à nos rentes.
Voilà ce que disent les plombiers, les serruriers, et tutti quanti !
Mais il n'y a donc personne pour leur
expliquer que ceux qui sont déloyaux ce sont eux ? Que ce sont ces
artisans qui souvent escroquent leurs clients ?
Oui, oui, je sais, ils ont des charges,
mon brave Monsieur etc., etc.
Mais rien ne justifie de faire payer
500 € une ouverture de porte !! Rien ne justifie les honoraires des
plombiers plus élevés que ceux des médecins qui vous
sauvent la vie !!
Je trouve plutôt cela sain qu'ils
soient soumis à une concurrence qui, elle, commence à faire
baisser les prix.
Il faut donc laisser, et c'est
impératif, le dernier espace de liberté d'entreprendre qui
existe, et tant pis pour les effets pervers ou négatifs. Il faut au
contraire les assumer.
Il vaut mieux des auto-entrepreneurs
que du travail au noir !
Il vaut mieux des auto-entrepreneurs
travaillant pour une entreprise en quasi-salarié que pas
d'activité du tout.
Il vaut mieux des auto-entrepreneurs
moins cher que des artisans hors de prix et aux prestations souvent douteuses
!
Il vaut mieux des auto-entrepreneurs
que des gens au RSA.
En un mot, il vaut mieux des auto-entrepreneurs
que des chômeurs.
Nous venons de mettre nos riches
dehors. Enfin, ils peuvent rester, s’ils acceptent de se faire ruiner.
Mais que croit notre gouvernement ? Que nos riches vont se faire tondre en
chantant à l'heure de la mondialisation et de la libre circulation des
capitaux et des hommes?
Il n'y a que les pauvres qui peuvent se
faire tondre parce qu'ils n'ont aucune échappatoire.
Nous pouvons aussi envoyer le message
qu'en France, ce n'est plus la peine d'essayer de créer une affaire,
qui peut-être un jour deviendra grande, et embauchera du monde, et
créera de la valeur pour notre pays.
Je suis sidéré par la
tournure du débat économique dans notre pays.
Il est impératif de sauver le
soldat Auto-entrepreneur. Hélas, il sera sans doute sacrifié
sur l'autel des lobbies, des groupes de pression, et du politiquement
correct.
Dommage, mais nous n'avons que ce que
nous méritons, c'est-à-dire, plus grand-chose.
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