Mes chères contrariennes, mes chers contrariens !
Comme vous le savez, certains prix sont clairement orientés à la baisse… mais il n’y a pas de déflation en Europe. L’accumulation de plans d’austérité fait chuter dans tous les pays du Sud la consommation et le niveau de vie mais il n’y a pas de déflation en Europe.
Les différents pays de la zone euro sont tous lancés dans une course suicidaire à la compétitivité et au dumping fiscal en baissant massivement impôts et taxes sur les entreprises et en faisant chuter drastiquement les salaires… mais il n’y a pas de déflation en Europe.
Les banques prêtent de moins en moins sous la double contrainte du risque qui augmente avec la crise et les nouvelles normes bancaires de fonds propres qui limitent de fait la croissance du crédit en particulier pour les PME. Du coup, le crédit aux entreprises s’effondre… mais il n’y a pas de déflation en Europe.
La masse monétaire européenne se réduit et c’est assez grave, mais officiellement il n’y a pas de déflation en Europe.
Partout la croissance patine et partout les États mettent en place des politiques visant (avec plus ou moins d’efficacité) à freiner ou diminuer la dépense publique. Autant d’argent en moins injecté dans le système économique… mais il n’y a pas de déflation en Europe !
Je pourrais poursuivre cette liste à la Prévert encore pendant quelques pages mais telle n’est pas l’idée et je pense que vous avez bien compris que la déflation était bien là en Europe et en particulier dans les pays de la zone euro.
Mais dans notre époque de politiquement correct extrémiste, on ne parle pas de déflation, on évoque simplement des « perspectives d’inflation plus ou moins favorables… » Que c’est beau ! Aussi magique que la « croissance négative » qui permet de ne pas utiliser le mot « récession », ou encore « le plan de sauvegarde de l’emploi » nettement moins négatif que la bonne vieille expression « plan social ». C’est vrai qu’avec un plan de sauvegarde de l’emploi pour désigner l’inverse exact, à savoir le licenciement de tout le monde ou presque, on atteint des sommets dans la novlangue politiquement correcte qui étouffe nos sociétés aussi bien sur les aspects sociaux qu’économiques bien évidemment.
Et justement, à propos de sommets de novlangue, Mario Draghi a encore parlé aujourd’hui pour ne pas dire grand-chose d’ailleurs.
Draghi évoque la possibilité d’un plan élargi de rachat d’actifs
Dans un discours prononcé à Amsterdam, Mario Draghi, le gouverneur de la Banque centrale européenne (BCE), a indiqué que la BCE « pourrait s’engager dans un programme d’assouplissement quantitatif portant sur une large gamme d’actifs si les perspectives d’inflation dans la zone euro se dégradaient ». L’institut monétaire de Frankfort pourrait même mettre en place une « opération de refinancement afin d’encourager le crédit bancaire par un programme d’achat d’ABS ».
Enfin, pour la première fois, Mario Draghi a également été nettement moins ambigu sur la force de l’euro puisqu’il a ouvert la porte à ce que les taux de change deviennent « un facteur de plus en plus important de notre évaluation des perspectives de stabilité des prix »…
Si nous résumons, pour le gouverneur de la BCE, les taux de change vont devenir un des critères de la politique monétaire alors que jusqu’à présent, clairement, ils ne l’étaient pas, et Mario Draghi envisage de mettre en place un QE qui serait plutôt un « credit easing », c’est-à-dire un rachat massif des crédits octroyés par les banques. Cela permettrait d’alléger les bilans des banques sans le dire (cela revient encore à sauver les banques) et également à aider au financement des entreprises en particulier des PME et des PMI et sur ce point-là, personne ne devrait trouver à redire.
Ces déclarations montrent bien pour tous ceux qui en doutaient que la situation économique est grave et loin, très loin d’être réglée. Pour le moment, il ne s’agit-là que de mots et pour le moment, la BCE a beaucoup parlé et bien peu agi. Il se pourrait néanmoins que le temps de l’action de la Banque centrale européenne approche, et d’ailleurs nos entreprises ont besoin que les conditions d’octroi de crédit s’améliorent et vite.
Préparez-vous et restez à l’écoute.
À demain… si vous le voulez bien !!
Charles SANNAT
« À vouloir étouffer les révolutions pacifiques, on rend inévitables les révolutions violentes »