Des
générations durant, les étudiants Américains ont
appris que leur gouvernement était une république
constitutionnelle et qu’il était pour cette raison une
‘exception’. Ce fameux exceptionnalisme Américain est
d’abord mis en contraste dans les salles de classe par l’empire
Britannique impérialiste contre lequel les colons se sont
rebellés. A partir de là, les étudiants apprennent
qu’une guerre a été menée contre l’empire Espagnol
à la fin du XIXe siècle, et contre les empires monarchiques de
la vieille Europe lors de la première guerre mondiale. Les empires
fascistes de l’Allemagne et du Japon ont été vaincus lors
de la seconde guerre mondiale, après quoi le gouvernement des
Etats-Unis s’est lancé dans une guerre contre l’empire
Soviétique. Avec la chute de l’Union Soviétique,
l’exceptionnalisme Américain a une fois de plus
été invoqué pour imposer la démocratie sous la
menace en le nom de la paix. Tout au long de l’Histoire, le
gouvernement des Etats-Unis n’aurait recherché que la paix et la
liberté pour les peuples du monde.
Ce type
de discours, qui aux Etats-Unis est l’instrument pérenne de la
liberté, est un tissu de mensonges. Nous devons nous demander comment les
soi-disant plus grands opposants à l’impérialisme sont
devenus le plus grand empire impérialiste que le monde ait jamais
connu. Comment un gouvernement ‘anti-impérialiste’ peut-il
finir avec des centaines de bases militaires sur toute la planète, des
centres de commande militaires sur chaque continent, dont un ‘centre de
commande Africain’ opéré depuis l’Allemagne ?
William
Graham Summer avait-il raison lorsque, dans son
essai de 1898 intitulé « The Conquest
of the United States by Spain », il expliquait que les Etats-Unis
eux-mêmes sont devenus un empire impérialiste similaire à
l’empire d’Espagne ? La réponse à cette
question est ‘oui et non’. Summer avait
raison à propos de la nature du gouvernement à l’aube du
XXe siècle, mais son calendrier n’était pas correct. La
voie des Etats-Unis vers l’impérialisme n’a
été ouverte que des décennies plus tard.
La
guerre de 1812 a donné naissance aux Etats-Unis à ce que Justin
Raimondo appelait le « virus de l’impérialisme ».
Elle n’était en rien une guerre défensive mais une
tentative de conquérir le Canada. Le Secrétaire
Américain de la Guerre avait prédit qu’aucun soldat ne
serait nécessaire et que l’apparition d’une poignée
d’officiers suffirait à ce que les Canadiens leur offrent des
fleurs. En a découlé une guerre au cours de laquelle les
Britanniques ont brûlé la Maison Blanche et une grande partie de
Washington DC. Elle a aussi servi d’excuse pour que renaisse de ses
centres la tant haïe Bank of the United States, que soient mises en place
de lourdes taxes, des tarifs douaniers et une aide aux sociétés
parasites. ‘Nous ne nous en sommes jamais vraiment retournés au
niveau d’avant-guerre de puissance gouvernementale
limitée’, écrit Rothbard.
La
guerre du Mexique de 1846 représente une attaque impérialiste
de la souveraineté Mexicaine si osée qu’elle a
poussé le membre du Congrès Abraham Lincoln à parler en
la faveur de la sécession.
En
1860, le parti Républicain imaginait un empire continental
fondé par les taxes et une banque nationale, jonché d’entreprises
parasites aidées par le gouvernement chargées entre autres de
la construction de routes et de chemins de fer. Leur premier succès
législatif, qui eut lieu au cours de la session du Congrès de
1859-60, devait voir doubler les tarifs douaniers à partir du moment
où les recettes douanières représentaient plus de 90% de
l’ensemble des revenus fédéraux. Après la
sécession de la partie sud des Etats-Unis, qui menaçait les
rêves impérialistes du parti Républicain, Lincoln a lors
de son discours d’investiture menacé d’invasion et de
carnage (ce sont ses propres mots) les états qui ne paieraient pas les
taxes et tarifs douaniers. Il a tenu parole.
Puis il
y eut Woodrow Wilson, qui a, selon Rothbard, défini et figé dans le marbre le
modèle de la politique étrangère américaine de
1917 à aujourd’hui avec son projet utopique de recréer
l’Europe par la force au nom de la démocratie. Si les
néoconservateurs d’aujourd’hui, qui contrôlent les
politiques étrangères des Etats-Unis, sont quelque chose, ils
ne sont rien de plus que les continuateurs fanatiques de Wilson.
Un
élément important à souligner est la tradition
anti-impérialiste des Etats-Unis – et du monde. Cette tradition
met l’accent, comme l’a souligné Rothbard,
sur le fait que « l’Etat se nourrit de la guerre… et en
tire son expansion et sa gloire ». L’agrandissement du pouvoir
d’un Etat passe par le franchissement des limites d’autres Etats,
ce qui n’est que le prolongement à l’étranger des
agressions que les Etats commettent contre leur population autochtone.
Comme Ludwig von
Mises l’a lui-même écrit, sous
l’impérialisme, « l’individu n’a plus
aucune valeur. Il n’a de valeur aux yeux de l’Etat qu’en
tant que membre de l’ensemble, en tant que soldat d’une
armée ». J’aimerai ajouter qu’il n’a de
valeur qu’en tant que contribuable. Un Etat populaire
impérialiste a une soif de conquêtes, et les étrangers sont
pour lui non pas des sujets mais de objets de politique. Existe-t-il une
meilleure définition des politiques étrangères
Américaines menées au cours de ces derniers
siècles ?
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