Dans toutes
les discussions sur les conséquences des soi-disant politiques
d’« austérité », la seule preuve
mise en avant pour démontrer que des mesures d’austérité
ont bel et bien été adoptées consiste en des
statistiques indiquant que les déficits budgétaires ont
diminué depuis trois ans.
C’est en
effet ce qui s'est passé. La moyenne des déficits en
pourcentage du PIB des pays de l'UE en 2012 (4 %) est bien inférieure
à ce qu'elle était en 2009 (6,9 %).
Pour les
critiques de l’austérité, cela explique pourquoi la
plupart des pays du continent sont toujours en récession et pourquoi
le chômage atteint des niveaux record. La seule façon pour eux
de relancer l’économie est de dépenser davantage.
Or, la
signification du terme « austérité » est
l’objet d’une confusion importante, qui bloque la tenue d'un
débat plus pertinent sur les causes de la crise.
Il devrait
être évident qu'il n'existe aucune relation directe entre une
réduction de la taille du déficit et une réduction de la
taille de l'État. Un déficit budgétaire peut se
résorber soit en comprimant les dépenses, soit en augmentant
les recettes fiscales. Il peut également diminuer si les
dépenses sont fortement réduites alors que les impôts ne
le sont que légèrement. Il peut même diminuer si les
dépenses augmentent et que les recettes fiscales augmentent encore
plus vite.
En pratique,
l’« austérité » peut donc recouvrir diverses
situations qui ne présentent pas les mêmes effets
économiques. Le terme peut aussi bien s'appliquer à une
croissance qu'à une diminution de la taille de l'État.
Il semble
qu'on tienne partout pour acquis que les mesures d'austérité se
sont traduites par des réductions de dépenses draconiennes,
accompagnées de quelques augmentations d'impôt, avec comme effet
net une réduction de la taille des États. Mais est-ce vraiment
le cas?
Les
dernières données d’Eurostat montrent qu’il
n’y a eu qu’une légère baisse de 1,7 point de
pourcentage des dépenses publiques en proportion du PIB dans
l’Union européenne depuis 2009. La proportion pour 2012 est par
ailleurs toujours supérieure de quatre points à celle qui
prévalait avant le début de la crise, soit 49,4 % contre 45,6 %
en 2007.
En termes
nominaux, les dépenses n'ont jamais cessé de croître pour
l'UE dans son ensemble depuis le début de la crise financière,
sauf en 2011 où elles sont restées constantes (voir la Figure).
Elles ont cru de 6,3 % pendant les trois dernières années,
c'est-à-dire durant la période ou des politiques
d'austérité sont censées avoir été mises
en œuvre.
Dépenses et recettes des
administrations publiques en milliards d'euros - Union européenne
Source :
Eurostat, Principaux agrégats des administrations publiques, y compris
recettes et dépenses.
Seuls quelques
pays ont vu leurs dépenses diminuer entre 2009 et 2012, notamment la
Grèce et le Portugal. Autant en termes nominaux qu'en proportion du
PIB, les gouvernements de ces deux pays ont toutefois dépensé
davantage en 2012 qu'en 2007.
S'il n'y a eu
aucune réduction nette dans les dépenses, cela signifie que les
diminutions de déficits n'ont pu être réalisées
que grâce à des recettes fiscales qui ont augmenté plus
vite que les dépenses. C'est précisément ce que les
données d'Eurostat montrent, avec une augmentation des recettes de
12,9 % de 2009 à 2012, soit le double du rythme d'augmentation des dépenses
publiques.
Les
gouvernements n'empruntent plus autant – même s'ils empruntent
toujours beaucoup et que la dette publique continue d'augmenter. À la
place, ils taxent davantage leurs citoyens de façon à financer
des dépenses toujours croissantes.
Si nous
définissons l'austérité comme l'ensemble des mesures qui
ont été prises pour réduire les déficits
budgétaires, alors dans ce sens, il est vrai que
l'austérité est responsable de la crise.
Si toutefois
nous utilisons ce terme de manière plus appropriée dans le sens
de politiques entraînant une réduction de la taille de
l'État, alors ces politiques ne peuvent être tenues responsables
de la crise en Europe puisqu'elles n'ont jamais été
appliquées.
Ce dont
l'Europe a besoin, c'est d'États plus modestes. Pas uniquement en
termes de dépenses publiques, mais aussi dans le sens d'une
déréglementation du marché du travail et d'autres
réformes structurelles visant à encourager l'entrepreneuriat,
les investissements privés et la création d'emplois. Il n'y
aura pas de croissance soutenue de l'économie en Europe tant que ce
seront les citoyens et les entreprises, plutôt que les gouvernements,
qui seront la cible des mesures d'austérité.
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