|
En 2009,
l’auteur de la plus grande arnaque financière de
l’histoire, Bernie Madoff, a
été condamné à 150 années de prison pour
avoir fraudé les clients dont il prétendait gérer la
fortune, leur faisant perdre près de 20 milliards de dollars au total.
L’entourloupe
n’avait rien de neuve, pourtant. L’idée en remonte
à Charles Ponzi, cet homme d’affaire
véreux dont elle reçut son nom au début du XXº
siècle, et consiste à feindre des retours de court terme
irrésistiblement grands et/ou constants en reversant directement, au
lieu de les investir réellement, les fonds des nouveaux clients qu’une
telle réussite permet d’attirer.
Bien entendu,
de tels systèmes « pyramidaux » sont
voués à l’échec car, plus ils se
développent, plus le nombre de nouveaux clients nécessaires
pour perpétuer l’illusion augmente. Lorsque ces derniers
viennent à manquer, le système s’effondre, et la
vérité apparaît : les promesses faites ne seront
jamais tenues, les fonds siphonnés n’ayant jamais
été mis à profit, mais constamment dilapidés.
Sans aucun
doute, une organisation fonctionnant sur ce modèle est, non pas une
entreprise au sens propre du terme, mais rien d’autre qu’une
organisation criminelle.
Mais, si
l’on y réfléchit, n’est-ce pas exactement comme
cela que marche (ou plutôt que ne marche pas) notre cher système
de sécurité sociale ?
Dans son cas,
les économistes parlent, non pas de « Ponzi
scheme », de « système
pyramidal, ou d’ « arnaque à la Madoff », mais de « redistribution
horizontale ». Par là, on entend
le fait que chaque nouvelle génération soit mise à
contribution par l’État pour financer les retraites de la
précédente.
À
mesure que les actifs « cotisent, »
c’est-à-dire sont taxés sur les richesses que produit
leur travail, ils engrangent, non pas des revenus cumulatifs du fait de leur
effort d’épargne, mais de prétendus
« droits » - des promesses que l’État s’emploiera
à honorer en contraigant les actifs à
payer leurs factures.
De ce point de
vue, il n’y a aucune différence entre le type d’arnaque
perpétré par Bernie Madoff et cette
« répartition » si chère aux Français.
Peut-on, pour
autant, s’arrêter à cette simple comparaison ? Dans
un célèbre extrait, le philosophe américain du XIXème
siècle, Lysander Spooner,
commençait par comparer le prélèvement de
l’impôt à l’activité des bandits de grand
chemin, avant de montrer que l’État était en fait bien
plus criminel que ces derniers. La même chose semble être vraie
ici.
Tout
d’abord, contrairement à l’arnaque de Bernie Madoff, la participation au système de retraite
mis en place par l’État est obligatoire. À la fraude
s’ajoute ainsi la coercition.
De ce fait, le
nombre de victimes est sans commune mesure : le nombre de victimes de
Bernie Madoff est estimé à 13 500…
soit 1 000 fois moins que la seule part masculine de la population active en
France, dont le total dépasse les 28 millions. Conséquemment,
les sommes concernées sont évidemment d’une ampleur sans
pareil. On comprend bien que la nature même de l’État, sa
capacité à exercer une violence légale à grande
échelle, implique que, perpétrant le même type
d’arnaque qu’un escroc tel que Bernie Madoff,
les conséquences doivent en être qualitativement
différentes. S’il a participé à
décrédibiliser le système financier U.S. auprès
de la population américaine et du reste du monde,
l’épisode Madoff n’a bien
évidemment eu aucun effet notable sur l’activité
économique du pays. Il n’en est pas du tout de même de
l’arnaque de la sécurité sociale. Le taux de pression
sociale, lequel se limite aux cotisations patronales et salariales, ainsi
qu’à la CSG, frôle ainsi, en France, les 30% du P.I.B.
Que l’on
imagine un instant ce que cela signifie : chaque année,
près d’un tiers du produit de l’activité
économique est transféré d’une
génération vers une autre (1) et ainsi immédiatement
consommé, au lieu d’être épargné et investi,
permettant ainsi d’accroître les capitaux du pays et
d’augmenter sa productivité et donc sa prospérité
future, comme cela serait le cas si les assurances sociales fonctionnaient
sur le modèle légitime d’un fonds de gestion, et non sur
celui d’une arnaque à la Madoff.
En fait, la
situation est encore empirée par le fait que l’État
dispose, contrairement à un arnaqueur individuel, d’une
capacité quasi-illimitée de multiplier les promesses et de
repousser l’échéance par l’endettement.
Fonctionnant
selon la même logique, la prétendue
« sécurité sociale » à la
française est aussi exposée au même destin que
l’arnaque de Bernie Madoff, et cela
malgré son caractère obligatoire. En effet, comme tout
système de transfert, elle s’accompagne d’un poids mort, correspondant
ici au frein que la redistribution entre les générations place
sur la croissance.
L’État
peut forcer les gens à cotiser, mais non à être plus
productifs. Confisquant leur épargne, il ne peut même que les en
empêcher.
(1) Au sens
propre, le transfert d’une génération vers la
précédente a lieu dans le seul cas de
l’assurance-retraite ; mais les dépenses de santé
étant largement concentrées sur la dernière
période de la vie, on peut dire qu’il en est largement de
même de l’assurance-santé. À elles seules, les deux
représentent 80% des dépenses annuelles de protection sociale.
|
|