Mes chères contrariées, mes chers contrariens
!
Ça y est. Nous y sommes. La majorité de nos concitoyens
ne s’en rendent pas encore compte mais l’État-providence
aux mamelles desquelles nous avons tous grandi et été nourris
est en train de s’effondrer sous nos yeux.
Aujourd’hui a été une journée
chargée pour notre État-providence. Deux rapports ont
été rendus. Le premier par la Cour des comptes et concerne
l’indemnisation trop généreuse du chômage. Le
deuxième rapport, lui, a été établi par le Conseil
d’orientation des retraites, le COR, que j’évoquais hier.
Revenons donc un peu plus en détail sur ces deux sujets
importants, puisque globalement tous les Français seront
concernés dans la mesure où nous serons tous un jour soit
chômeur soit retraité.
La Cour des
comptes règle ses comptes à l’indemnisation des
chômeurs
Ce qu’il faut retenir du rapport c’est que la Cour des
comptes dénonce un système « difficilement soutenable
» et lance une véritable volée de bois vert sur le
coût du régime des intermittents du spectacle...
Ce n’est pas moi qui vais râler sur le coût
inadmissible de ce régime spécial…
En effet, aujourd’hui, les dispositions légales sont
utilisées à plein par les entreprises du secteur artistique au
sens large qui alternent avec une régularité de
métronome les périodes d’emplois et de licenciements pour
leurs intermittents. Tout cela est devenu particulièrement malsain.
Pour aller encore plus loin et dire les choses telles que je les
pense, il n’appartient à la collectivité de payer pour
que Monsieur ou Madame Dupont puisse vivre de son art. La collectivité
n’est là que pour assurer au mieux des risques contre lesquels
nous ne pouvons pas nous couvrir individuellement. Mais nous avons
oublié cette règle essentielle à la base de toute solidarité,
entraînant l’État-providence dans une catastrophe
prévisible et qui, hélas, se produit sous votre regard.
Les intermittents nous coûtent 1 milliard d’euros de
déficit au profit de 3 % seulement des demandeurs d'emploi !
C’est juste n’est-ce pas comme système posé sous
cette forme, non ?
Le rapport de la Cour des comptes fait 170 pages, il est
intitulé « Le marché du travail : Face au chômage
élevé, mieux cibler les politiques ».
Pour les magistrats de la Cour, il est indispensable, dans cette
période de disette, non seulement de « mieux cibler » les
efforts sur ceux qui subissent la crise mais également de modifier
profondément l'assurance chômage.
Pour mémoire, le déficit de l’assurance
chômage devrait atteindre 5 milliards d’euros fin 2013 et sa dette
dépasserait les 18,6 milliards d’euros.
C’est donc l’ensemble des paramètres qu’il
faut revoir pour rétablir la situation financière. En clair, il
va falloir changer les modalités d’indemnisation… et les
réduire.
Pour le moment, l’accès à l’indemnisation
est ouvert à partir de 4 mois de travail. Mais cela va changer.
La moyenne d’indemnisation dans les autres pays européens
est de 12 mois alors que chez nous cela va de 24 à 36 mois. Mais cela
va changer.
En France, les indemnités perçues sont aussi plus
élevées qu’ailleurs. Selon les données de
l’OCDE, le taux de remplacement net moyen en France en 2009 (le
pourcentage de votre ancien salaire) est de 67,3 %, contre 58,6 % en moyenne
pour les pays de l’OCDE. Mais cela va changer.
La Cour parle également des 5 000 euros gagnés au
chômage par un cadre qui gagnait 10 000 euros par mois dans son ancien
poste. Mais rassurez-vous cela va changer.
Il y en a qui pensent encore que les choses vont s’arranger.
Certains feront remarquer qu’avec un retour de la croissance et si le
taux de chômage rebaissait à 8 % de la population active,
l’Unédic retrouverait
l’équilibre financier. C’est beau le rêve.
Il ne peut pas y avoir de retour de la croissance dans le
système économique actuel. C’est fini, terminé. Il
ne peut pas y avoir de croissance puisque nous perdons nos emplois au profit
de machines ou de serveurs informatiques ou de petits chinois low cost. Point. Fin de
l’histoire. Ou alors il faut changer de cadre. Et je vous passe le
couplet sur l’épuisement des ressources et l’idée
de croissance infinie dans un monde fini.
Donc les allocations chômage vont baisser de façon
drastique et non, on ne pourra pas augmenter les cotisations…
puisqu’il faut assurer notre compétitivité !
La
conséquence pour vous
Si vous avez en projet de faire partie d’un plan de
licenciement, il faut vous dépêcher de vous faire virer pour
« profiter » encore quelques mois d’indemnités
chômage favorables.
Sinon, prévoyez de mettre de côté de quoi vous
auto-assurer contre la perte d’un emploi. C’est à cela que
sert l’épargne de précaution (un vieux concept
désuet dont seuls les vieux grigous comme moi se souviennent). Non,
l’épargne de précaution ne sert pas à faire les
soldes… ni à acheter le dernier écran plat dont on
n’a pas besoin. Mais c’est autre chose.
Et non, mettre son épargne de précaution sur un contrat
d’assurance vie fonds euros n’est pas une idée judicieuse.
Achetez quelques pièces d’or tant que vous avez les
moyens et une maison au fin fond de la Nièvre (c’est le
département le moins cher de France) avec un grand, grand jardin.
Commencez à planter choux et patates.
Passons maintenant à nos amis retraités.
Le COR a
été plus gentil que la Cour des comptes mais cela ne va pas
durer
En gros, l’idée du rapport c’est de vendre avant
tout la désindexation des pensions de retraite avec l’inflation.
Logique. Les retraités sont par définition aussi
improductifs que les chômeurs. Bon, c’est vrai qu’il y a
des retraités qui ont travaillé contrairement à certains
chômeurs qui eux n’ont jamais rien fait. Mais il n’en
demeure pas moins que quoi qu’on dise, l’improductivité,
fut-elle liée à l’âge ou à un handicap, ne
peut pas rapporter plus que l’activité et la
productivité. C’est d’une logique économique
évidente. Mais on l’a oublié.
Conséquence : comme il est vrai que les retraités qui
sont tout de même plus de 15 millions représentent un poids
électoral important, il va falloir y aller doucement. Progressivement.
Par étapes. Petit à petit.
Donc on va commencer par rabiotersur les revalorisations
des retraites pour essayer de faire baisser le coût via
l’inflation. Ce sera une belle érosion du pouvoir d’achat
de nos aînés mais ce
ne sera pas suffisant. Alors il faudra, à un moment pas si
éloigné que ça, tailler dans le vif et baisser purement
et simplement les pensions, mais on commencera par les plus importantes,
celles des plus riches, donc ce sera juste…
C’est le COR lui-même qui nous explique pourquoi cela ne
marchera pas. Tout tient dans ces hypothèses qui sont fondamentalement
totalement irréalistes à mon sens.
Je cite le passage concerné car cela vaut son pesant de
cacahuètes.
« Les hypothèses économiques correspondent
à trois scénarios présentés par la direction
générale du Trésor (A, B et C), complétés
par deux variantes plus contrastées (A' et C'). Ces scénarios
et variantes se distinguent notamment par les hypothèses à long
terme en matière de taux de chômage et de progression annuelle
de la productivité du travail : respectivement 4,5 % et 1,8 % pour le
scénario A, 4,5 % et 1,5 % pour le scénario B, 7 % et 1,3 %
pour le scénario C, enfin, pour les deux variantes, 4,5 % et 2 % pour
A' et 7 % et 1 % pour C'. Ces
scénarios et variantes permettent de couvrir un vaste champ des
possibles, plus large que pour les précédentes projections du
COR de 2010 ».
Je vous fais la traduction.
L’avenir
des retraites est assuré si la France atteint le plein emploi !!
Si la France retrouve le plein emploi avec un taux de chômage de
4,5 % – que l’on n'a plus connu depuis quoi… au moins
quarante ans –, alors les réformes actuelles seront suffisantes.
Mais si vous voulez y croire, libre à vous...
Attention mes chers contrariens. Y en a du
monde qui a travaillé sur ce rapport. Même la Direction
Générale du Trésor a été mobilisée.
Ils ont réfléchi à plein de monde. Ils ont même
fait appel à des mathématiciens, qui ont pondu des
scénarios baptisés A, B et C mais également A’ et
C’… comme en cours de math au collège. D’ailleurs je
pense que les hypothèses envisagées sont tout simplement
stupides.
Dans leur scénario noir, le taux de chômage serait de 7 %
seulement. Nous en sommes allègrement à 12 %, et encore en
comptant serré car si on compte large…
Au rythme où ça va, on finira par aller plus vite en
comptant ceux qui travaillent.
Nos grands mamamouchis de la prévision statistique font donc
des extrapolations à partir de données que l’on sait
déjà parfaitement erronées, et même comme
ça notre système de retraite voit son avenir très,
très compromis.
La
conséquence pour vous
Si vous prévoyez prochainement d’être à la
retraite, continuez à travailler si vous le pouvez. Sinon, passez au
plan B’ comme diraient les « spécialistes du Trésor
» à savoir : achetez quelques pièces d’or tant que
vous avez les moyens et une maison au fin fond de la Nièvre
(c’est le département le moins cher de France) avec un grand,
grand jardin. Commencez à planter choux et patates.
Une petite nuance par rapport au futur chômeur : le futur
retraité devra privilégier l’acquisition d’une
maison de plain-pied (future dépendance oblige).
Vous l’aurez compris, c’est le démantèlement
et le démembrement de l’État-providence qui est
désormais mis en place. Tout cela sera détruit progressivement
et consciencieusement. Le mouvement a mis cinq ans à se faire en
Grèce pour en arriver à la situation de précarité
actuelle du peuple grec qui « l’avait bien cherché
».
Il faut que vous vous y prépariez rapidement. Nous avons encore
le temps mais il commence à nous être compté.
Dernière chose. Faites-vous confiance mes chers contrariens, vous saurez trouver les solutions qui vous
seront appropriées et n’oubliez pas que si « le Titanic
fut construit par des professionnels, l’arche de Noé le fut par
un amateur ».
Bâtissez votre arche de Noé patrimoniale car plus
personne ne viendra à votre secours.
Charles
SANNAT
Directeur des Études Économiques Aucoffre.com
http://www.lecontrarien.com/
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