C’est l’OCDE qui le révèle dans son étude intitulée “Les impôts
sur les salaires 2016”, publiée le 11 mai dernier : la France ferait peser
une charge fiscale et sociale de 67,2% sur les salaires des travailleurs
gagnant moins de 2000 euros bruts par mois. Une proportion qui irait en
diminuant à mesure qu’augmente la rémunération de base, et qui concernerait
également les familles de classe moyenne.
En 1907, un certain Joseph Caillaux, petit homme de gauche portant
monocle, et accessoirement ministre des Finances de Georges Clemenceau, lâcha
une phrase que Coluche ou Desproges n’auraient pas reniée : « Faites
payer les pauvres ! Bien sûr, les riches ont la capacité de supporter des
impôts bien plus lourds, mais les pauvres sont tellement plus nombreux !
».
Cible numéro un de l’État : le smicard célibataire
Visiblement l’idée a fait son chemin car, si l’on en croit le dernier rapport de l’OCDE sur les salaires publié le
11 mai 2016, la France taxerait plus lourdement les salariés les
moins bien payés. Ainsi, en tenant compte des impôts et des
cotisations de sécurité sociale payés par les travailleurs et leurs
employeurs, déduction faite des éventuelles prestations familiales qu’ils
pourraient percevoir, on constate que plus des 2/3 de la rémunération des
salariés les plus fragiles finissent dans les caisses de l’État. Et encore,
ne sont pas comptabilisées les recettes fiscales liées à la TVA des biens et
services consommés par ces mêmes contribuables.
Plus exactement, l’étude a distingué 8 profils types de foyers fiscaux,
selon qu’ils étaient constitués de célibataires ou de couples, avec ou sans
enfants, et disposant de revenus appréciés en fonction du salaire brut moyen
annuel. Et contrairement à ce qu’on pourrait s’attendre à trouver pour un
pays dirigé depuis 4 ans par un gouvernement socialiste, ce ne sont
pas les plus aisés qui subissent la plus lourde imposition globale.
Par exemple, à la page 270 du rapport de l’OCDE, on développe le cas d’un
célibataire gagnant les 2/3 du salaire moyen brut français, soit un
peu moins de 2000 € brut par mois. Ce salarié verra non seulement la
rémunération de son travail amputée d’un montant substantiel correspondant
aux cotisations sociales et patronales, mais également d’un impôt
sur le revenu de 11,7% portant à plus de 67% le
total de la charge sociale et fiscale pesant sur son salaire de base. Plus
intéressant encore, si ce salarié était subitement augmenté de 50% (ce
qui n’arrive jamais dans la vraie vie, on est bien d’accord !) pour
atteindre le niveau de rémunération considéré comme étant le salaire brut
moyen des Français (2875 €), sa charge totale d’impôts et de
cotisations sociales ne serait plus “que” de 59,3%. Enfin, s’il
devait gagner 167% du salaire brut moyen, soit aux alentours de 4800 € par
mois, il serait à peine plus ponctionné avec un total d’imposition fiscale et
sociale de 59.8%. Seule solution pour s’en sortir, avoir au moins deux
enfants à charge, ce qui lui permettrait de réduire son taux à 57.5%… en
grande partie grâce aux prestations sociales.
Cible numéro deux de l’État : les ménages de classe moyenne avec deux
enfants
Pour les ménages, la situation est tout à fait différente. Et si on
comprend aisément qu’un couple élevant deux enfants avec
l’équivalent de deux SMIC (un par parent) supporte une charge fiscale et
sociale ne dépassant pas 35,5%, compte tenu du niveau de dépenses minimum
qu’une telle famille doit déjà engager au quotidien pour simplement se loger
et se nourrir, on a en revanche beaucoup de mal à comprendre pourquoi ce même
couple, dès lors que chaque parent commence à gagner l’équivalent de
2000 € brut par mois (soit 1500 € net ou 67% seulement du salaire
moyen en France), voit son niveau d’imposition global exploser brutalement
pour atteindre 61,8% !
Peut-on aujourd’hui considérer qu’une famille de quatre personnes vivant
avec 3000 euros net par mois est riche ? À l’abri de la famine, certainement.
Susceptible d’assumer quotidiennement (mais modestement) son rôle d’acteur
social et économique de consommateur, probablement aussi. Mais riche au point
de voir brusquement doubler le poids de ses prélèvement obligatoires
? Certainement pas.
Et pourtant, ce sont bien ces familles de classe moyenne (et même très
moyennes) qui constituent, avec les travailleurs célibataires payés entre une
fois et une fois et demi le SMIC, le gros de la troupe des vaches à
lait de la République exemplaire de Monsieur Hollande.