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Deux images
résument le drame français. D’un côté la génération
du Président François Hollande qui ouvre la conférence
sociale des 20 et 21 juin en recevant les syndicats, s’attablant avec
eux pour discuter droits sociaux, égalité des salaires, droits
acquis, redistribution. De l’autre, une génération de vingtenaires et trentenaires, entrepreneurs ou jeunes
diplômés qui franchissent prestement la frontière, sac
sur le dos, vers un business ou un job bien payé et sans intention de
revenir. Alors, où se trouve l’avenir ?
L’avenir
est là où il est possible de faire de l’argent ! L’un
de ces jeunes diplômés parti aux États-Unis le dit sans
détour : « Les salaires sont clairement plus
intéressants. Promu il y a deux mois chef de produit senior, ma
rémunération brute s’élève à
100 000 dollars, soit 75 000 euros environ. Il serait de
37 000 euros en France. » François Hollande et les
syndicats ont encore du pain sur la planche pour lui expliquer qu’il
vaut mieux rester à gagner 37 000 euros en France plutôt
que 75 000 euros à l’étranger.
De son
côté, la Conférence des grandes écoles (CGE)
confirme, grâce à son enquête d’insertion
annuelle menée au premier trimestre 2013, que les jeunes
diplômés gagnent à partir à l’étranger :
ils auront un salaire de 45 610 euros brut en moyenne contre 37 340
euros à Paris ou 33 374 euros en Province. Pire : les
salaires français diminuent. La CGE constate une chute de 15% pour les
salaires des managers et de 11% pour ceux des ingénieurs. « Non
seulement les rémunérations proposées aux
ingénieurs sont 20% plus attractives à
l’étranger », précise Christian Lerminaux, président de la conférence des
directeurs des écoles d’ingénieurs, « mais,
dans le même temps, les salaires français proposés par
les petites et les moyennes entreprises sont inférieurs de 10 à
20% à ceux des grands groupes. » Cela veut dire clairement
que les PME, qui représentent près de 95% des entreprises
hexagonales, n’attirent plus, se vident de talents et sont donc incapables
d’innover.
Alors la CGE
utilise les mots qui fâchent : « fuite des
cerveaux », « exil ». Car en parallèle de
l’exil fiscal, il y a bien un exil professionnel. Le constat est
incontournable : 16% des diplômés des grandes écoles
et 25% des diplômés des écoles de management trouvent un
premier emploi hors de France. Toujours
selon la CGE, si l’Ile-de-France reste encore – mais pour combien
de temps – la destination principale de 56,4% d’entre eux, la
Province se vide au bénéfice de l’étranger.
Le Royaume-Uni
est la première destination avec 14,9% des diplômés
français qui y travaillent. En Suisse, ils sont 12%, en
l’Allemagne 11,1% et au Luxembourg 7,3%. Au-delà de
l’Europe, les États-Unis attirent 7,2% de ces jeunes et 6,8% se
précipitent en Chine. Quand on regarde cette liste, il est frappant de
constater que les jeunes diplômés vont exactement dans les pays
qui suscitent l’indignation vertueuse de François Hollande et
des syndicats. Quel joli pied de nez ! C’est rassurant car cela
montre que le discours de la classe politique et syndicale a une
portée très limitée.
Dans cette
perspective, la conférence sociale sert-elle à quelque chose ?
Ce serait la cas si François Hollande se
décidait à rappeler qu’on ne devient riche qu’en
gagnant de l’argent pas en recevant des aides et des allocations. Mais,
ce modèle social qu’il veut sauver avec sa conférence
sociale ne donne en fait aucun espoir à ceux qui gagnent de
l’argent. Plus leur salaire est élevé, plus ils sont
matraqués fiscalement. Il est évident que la perspective de
contribuer au système social français, d’être
ponctionné au nom de la justice sociale ou de participer à la
générosité nationale, n’est pas attractive. Soyons
franc : égalitarisme, droits acquis, aides sociales, rien de tout
cela ne retient les jeunes qui sont capables de créer des richesses et
les futurs emplois. Alors pendant que François Hollande et ses
camarades syndicalistes confèrent sur le social à
l’Elysée, la France se vide de sa force créatrice et
entrepreneuriale. À quand une prise de conscience.
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