Le
gouvernement a présenté mercredi un projet de budget pour 2012
que la presse s’est empressée de qualifier de
« rigueur », parfois
d’« austérité ».
On
aurait pu s’attendre à ce que ce projet se traduise par une baisse
simultanée des dépenses publiques et une hausse
d’impôts, ce qui est la définition que le monde politique
donne d’ordinaire à la « rigueur ».
Des
hausses d’impôts, il y en a bien (trois
milliards d’euros), faisant passer la pression fiscale de
43,7 % en 2011 à 44,5 % du PIB l’an prochain. À
la clef, une nouvelle taxe
carbone, celle qui avait été reportée sine die après la
défaite de l’UMP aux élections régionales de mars
2010. Il faut croire que, cette fois, la majorité actuelle ne craint
pas le revers électoral.
Au
menu : une contribution « exceptionnelle » sur les
« très hauts revenus » : 3 % sur la
fraction des revenus dépassant 500.000 euros par an pour un
célibataire et 1 million d'euros pour un couple, un seuil que les
parlementaires, toutes tendances confondues, veulent abaisser.
Qu’est-ce qui empêchera le gouvernement d’abaisser
régulièrement ce seuil, d’en augmenter le taux, et
surtout de prolonger cette mesure ?
À
noter aussi, une taxe de 10 à 40 % sur les logements de moins de 13
mètres carrés dont le loyer mensuel au mètre
carré dépasse 40 euros. Comment imaginer meilleur moyen
d’aggraver la pénurie de logements, notamment à Paris, et
in fine d’augmenter les
loyers ?
Toujours
prévue, la taxe sur les boissons sucrées de 1 centime par
cannette de 33 centilitres. Vue la mobilisation sur Internet contre cette
taxe, déjà annoncée le 24 août dernier, on peut
douter que les électeurs la mettent au crédit du gouvernement
actuel.
Remarquons
enfin le maintien de la taxe de 2 % sur les nuitées
d’hôtel supérieures ou égales à 200 euros,
la taxe sur le tabac en hausse de 6 %, ou encore le relèvement de
12,3% à 13,5% des prélèvements sociaux sur les revenus
du capital (1,3 milliard).
En
revanche, pas de baisse de dépenses, sinon ce que l’on appelle
à Bercy des « dépenses fiscales »
(dispositif Scellier pour l’immobilier
notamment), c’est-à-dire… des niches fiscales. Quand Bercy
réduit une niche fiscale, donc augmente les impôts, il appelle
cela « réduire la dépense fiscale ». Comprenne
qui pourra.
Il
s’agit, au-delà de la communication
pré-électorale, de rassurer les marchés financiers afin
qu’ils continuent à prêter à l’État
français. S’ils sont convaincus par ce plan, ils auront en effet
des opportunités de prêts : le déficit public
prévu serait de 81,7 milliards d’euros en 2012, avec une dette
publique atteignant 87 % du produit intérieur brut (PIB). La
charge de la dette, c’est-à-dire le paiement des
intérêts pour celle-ci, sera le deuxième poste
budgétaire de l’État avec 48,8 milliards d’euros,
après celui de l’Éducation nationale.
Même
quand le gouvernement augmente massivement les impôts, il semble donc
impuissant à régler le problème de l’endettement
qui menace à terme la viabilité financière de
l’État.
Baisser
les dépenses publiques serait la seule solution, mais à
l’approche des élections, les groupes de pression
veillent : la grève des enseignants, mardi, a
démontré que les corporatismes seraient bien défendus
d’ici la présidentielle. D’où la question :
l’État français pourra-t-il réduire ses
dépenses et ses déficits autrement que dans une situation
à la grecque ? Cette question est chaque jour qui passe plus
rhétorique que sincère.
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