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TVA
« sociale », TVA
« anti-délocalisation », TVA
« emploi »... Le projet, encore flou, est connu
déjà sous plusieurs noms. Présentée par l'UMP
comme un moyen d'améliorer la compétitivité des
entreprises françaises, cette nouvelle taxe est-elle vraiment la
bienvenue ?
Pour le
savoir, il faut d'abord comprendre comment fonctionnerait la TVA sociale, ou
plus exactement ce système de compensation combinant allègement
des charges et hausse de la TVA.
Grosso modo,
l’idée est la suivante : d’un côté, les
entreprises françaises paient moins de cotisations sociales ; de
l’autre, la TVA augmente sur l’ensemble des produits vendus en
France, que ces produits soient « made in France » ou
importés. La réduction des charges étant censée
– je dis bien censée – se répercuter sur le prix de
vente, et la hausse de la TVA ne compensant que partiellement cette baisse
des prix, les produits importés deviennent plus chers, tandis que les
prix des produits français restent relativement stables, certains
même diminuant (dans le meilleur des cas). Résultat : une
partie de la demande se reporte sur le « made in
France », les consommateurs applaudissent, et Nicolas Sarkozy est
reconduit pour cinq ans.
C’est du
moins ce que prétendent les partisans de la TVA sociale. Les choses se
passeront-elles vraiment ainsi ? C’est peu probable.
On peut
critiquer ce tour de passe-passe pour des raisons de principe. Mais la
formule « moins de charges, plus de TVA » n’ayant
d’autre but que de « sauver » le
« modèle social français », montrer du
doigt ce bricolage fiscal reviendrait à dénoncer, une fois de
plus, le consensus français sur la protection sociale. Je ne m’attarderai
donc pas là-dessus.
On peut,
à l’inverse, et toujours pour des raisons de principes,
approuver la réduction des cotisations sociales, qui est en soi une
bonne chose. Mais dans le cas présent, s’en réjouir
n’aurait aucun sens, le fardeau fiscal étant simplement
transféré.
Ce qui devrait
attirer l’attention des commentateurs, c’est la confusion qui
règne sur la finalité du dispositif. Les artisans de la TVA
sociale l’appellent aussi « TVA
anti-délocalisation » - une expression malheureuse
soulignant l’ambiguïté d’un dispositif pouvant aussi
bien faire baisser les prix du « made in France » (ou
plus probablement augmenter ceux des importations sans nuire aux exportations),
et ainsi accroître la compétitivité-prix des entreprises
françaises, que permettre aux patrons d’accroître leurs
marges, s’ils préfèrent ne pas répercuter sur le
prix de vente la réduction du coût du travail. Pour
d’autres, la TVA sociale contribuerait à faire reculer le
chômage, qui a récemment dépassé la barre des 10%
en France. Ainsi la Fédération nationale des exploitants
agricoles (FNSEA) y voit-elle une incitation à l’emploi.
Question
à 30 milliards d’euros (le montant des cotisations patronales
allouées à la branche Famille de la Sécurité
sociale) : comment peut-on prêter autant de vertus à ce
dispositif et affirmer avec certitude qu’il produira tel effet
plutôt que tel autre ? Dans l’hypothèse où les
cotisations salariales seraient elles aussi concernées, le
problème est le même : si le gouvernement peut dire avec
certitude comment il dépensera l’argent public, il ne peut
prédire comment seront utilisées les sommes qu’il ne
prélève pas. Il lui est donc impossible, a fortiori, d’affirmer
que les mesures prises auront tel ou tel effet positif sur l’économie.
C’est
pourtant ce que fait le gouvernement en évoquant les multiples avantages
de la TVA sociale en termes de compétitivité ou de
création d’emplois. Autant de bénéfices improbables
dont le coût pour le contribuable est, lui, bien réel.
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