Les actifs détenus par la banque du Japon ont apparemment dépassé la barre des 500 trillions de yens à la fin mai (4,49 trillions de dollars), gonflant jusqu’à titiller le PIB national alors que la banque centrale poursuit ses achats obligataires dans le cadre de sa politique monétaire ultra accommodante.
Une situation unique en son genre
Au 20 mai 2017, la banque possédait pour 498,15 trillions de yens d’actifs. Durant l’intervalle séparant cette date de la fin du mois, ce mercredi, son portefeuille d’obligations japonaises a augmenté de 2,24 trillions de yens supplémentaires. En partant du principe que la banque n’a pas réduit de façon significative ses actifs en devises étrangères, son bilan a franchi avec quasi-certitude la barre des 500 trillions de yens, du jamais vu. (…)
Avec un bilan pesant 93 % du PIB national, la Banque centrale du Japon est hors catégorie. Les derniers chiffres montrent que la FED américaine possède pour environ 4,5 trillions de dollars d’actifs, soit environ 23 % du PIB américain. Le bilan de la BCE, qui pèse 4,2 trillions d’euros (4,71 trillions de dollars) est supérieur à celui de la BoJ, mais ne représente que 28 % du PIB européen.
En septembre, la Banque centrale du Japon a changé sa politique, passant du mode assouplissement quantitatif à celui du contrôle de la courbe des taux. Néanmoins, la banque poursuit ses achats d’obligations afin de maintenir les taux longs autour de zéro. Elle n’a pas failli à sa promesse de continuer ses achats afin de doper la masse monétaire, et ce jusqu’à ce que l’inflation japonaise soit fermement au-dessus des 2 %. Ce qui suggère que la taille du bilan de la BoJ va poursuivre son ascension au-delà des 500 trillions de yens.
Une trajectoire risquée
Cette perspective contrarie certains experts financiers. Lorsque l’objectif d’inflation sera atteint et que la banque commencera à relever son taux directeur, la BoJ devra payer davantage d’intérêts pour les réserves des institutions financières qu’elle en perçoit elle-même de ses obligations à faible rendement.
Hiroshi Fujiki, professeur à l’université Chuo, estime que la BoJ devra endurer des taux négatifs pendant au moins 10 ans lorsque l’objectif d’inflation de 2 % sera atteint. Si les pertes sont suffisamment importantes, son bilan pourrait être déficitaire (note : une façon bien alambiquée de parler d’insolvabilité). Certains économistes affirment que le yen pourrait perdre beaucoup de sa valeur, ce qui pourrait ensuite déclencher une inflation des prix dramatique si la banque devait encaisser de trop lourdes pertes.
Mais du côté de l’institution japonaise, on reste optimiste. Si l’économie est assez solide pour permettre la hausse des taux, les taux obligataires vont grimper de concert. « Les chances de voir la BCE afficher un bilan déficitaire sont très faibles », a déclaré un haut responsable de la BoJ.
On a planté les graines d’ennuis futurs ?
Mais ces perspectives de politiques accommodantes à long terme soulèvent la problématique des dépenses publiques. Le marché obligataire est censé discipliner les déficits publics. Cependant, le marché ne fonctionne pas comme il le devrait vu que la banque centrale a acheté d’énormes quantités d’obligations. (…) Sans mécanisme permettant de sanctionner des dépenses inconsidérées, les taux d’intérêt sont susceptibles de partir en flèche lorsque la BoJ commencera à mettre un terme à sa politique accommodante.
Article de Nikkei.com, publié le 2 juin 2017