Comment pourrait-on croire que
la Banque populaire de Chine puisse vouloir dire la vérité quant à quelque
chose qu’elle est tout à fait en mesure de garder secret ? Plus particulièrement
quant à la solidité de tout portefeuille de prêt sous son contrôle ?
Bien évidemment, tout ce qu’a pu faire la Chine en termes d’accélération vers
le mur de l’effondrement financier, elle l’a appris en observant les
banquiers américains se frayer un chemin au travers du nirvana des Too Big To
Fail – et notamment les combines et les fraudes établies dans la pénombre du
système bancaire parallèle pour couvrir l’apparition soudaine et
catastrophique d’une découverte des prix basée sur la réalité.
Quand autant de prêts se
retrouvent rattachés les uns aux autres en tant que garantie contre des paris
précédents qui eux-aussi couvrent des paris antérieurs, il ne peut en
découler qu’une contagion interminable. C’est exactement ce qui se passe
aujourd’hui, alors que l’entrée en fanfare de la Chine dans la modernité se
trouve remplacé par un retour forcé à la réalité. Comme pour tous les autres
fiascos historiques qui lui ont précédé, il s’agissait au départ d’une bonne
idée : prenez une nation d’environ un demi-milliard d’habitants vivant
dans l’équivalent du douzième siècle, saupoudrez le tout de la magie de la
création monétaire, dépensez des sommes imprononçables sur des engins de
terrassement CAT et Kubota, établissez la plus grosse industrie de ciment que
le monde ait jamais vu, achetez des usines à tour de bras et inondez le reste
du monde de babioles. Une fois que vous cherchez à combattre les cycles
économiques associés à la surproduction et à la saturation des marchés, alors
seulement des problèmes commencent à se prononcer.
Pauvre Chine. Pauvre de
nous ! Nous ne sommes pas parvenus à échapper à la vélocité. Ce qui
soulève une question particulière : à quoi cherchons-nous réellement à
échapper ? Réponse : aux limites insurmontables de la vie sur
Terre. La grande métaphore de tout cela est bien évidemment l’idée de voyage
dans l’espace, qui persiste encore dans les techniques de vente d’Elon Musk,
dans ce qu’il reste de la NASA, et même dans les cauchemars de Stephen
Hawking. Echappons à cette planète souillée qui est la vôtre, partons à la
recherche de nouveaux territoires, pourquoi pas sur Mars. Bien évidemment,
c’est ici une idée vaine et ridicule, puisque nous disposons déjà d’une
planète dont les caractéristiques sont parfaitement adaptées aux systèmes
associés au projet humain. Nous sommes simplement incapables de respecter ses
limites.
Ce duo dynamique de nature et
de réalité, qui sont les véritables maîtres de l’univers, sont venus lire le
Riot Act à des locataires en pleine scène de tapage. La quatrième, voire
l’ultime, crise financière de ces vingt dernières années commence à se
présenter en des termes que seuls les rapaces et les vautours peuvent voir
venir de là où ils sont perchés. George Soros, Kyle Bass et les autres
charognards du système bancaire parallèle se préparent à accumuler une
position à découvert monumentale sur la vieille Terre du milieu. Les propos
immortels de G. W. Bush résonnent dans leurs oreilles : « elle va
bientôt tomber ». En pariant sur l’évidence, ils sont certains de sortir
gagnants. Le problème, c’est que la Terre du milieu pourrait tomber bien plus
bas que ce qu’ils s’imaginent, et que les fortunes qu’ils pourront amasser de
son effondrement seront potentiellement détruites par la destruction même du
système économique qui leur est nécessaire pour profiter de leurs gains.
Pour vous donner un exemple,
lorsque le système bancaire s’effondre, les gouvernements plongent eux-aussi,
suivis des sociétés toutes entières. Il n’est pas très difficile d’imaginer
la machine de parti unique de la Chine perdre le respect des masses de
gouvernés, puis des évènements, avant que les régions et les factions se
donnent du mal pour remettre de l’ordre dans tout ça. Quand le brouillard
s’estompera, il ne restera plus que des montagnes d’acier et de béton sans
valeur et une vaste perte de valeur notionnelle, et la Chine aura bien de la
chance si elle parvient à ne pas retomber plus bas qu’au douzième siècle.
Il doit être intéressant pour
la Chine d’assister à la désintégration horrifiante de la structure politique
américaine, de voir Trump le taureau enragé charger en travers du territoire
et Melle C’est-mon-tour détourner son collectif pour la gloire de Goldman
Sachs. La dernière fois que la Chine a eu chaud politiquement – révolution culturelle
des années 1960 – le pays a perdu les pédales. Je ne doute pas que certains
membres du parti au pouvoir en tremblent encore.
Peut-être la Chine et les
Etats-Unis font-ils une remise en scène de Thelma et Louise. Ils roulent main
dans la main vers l’abysse de l’Histoire. Le public a toujours apprécié ce
genre de fin !