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Selon Ouest
France, Joel Sarlot, député
de Vendée, vient de voir son élection invalidée
pour cause d'irrégularités dans ses comptes de campagne. A-t-il
volé, détourné, triché, blanchi ? Non.
Simplement, Ouest France nous apprend que deux factures d'un montant total de
5.000€ ont été réglées par des
chèques personnels et non par des chèque signé par le
mandataire de la campagne, comme l'exige l'actuelle loi sur le financement
des partis politiques. Ce crime visiblement inqualifiable suffit à
justifier l'invalidation de son élection par le conseil
constitutionnel. Extrait:
"Concrètement,
il est reproché à Joël Sarlot d'avoir réglé « directement,
postérieurement à la désignation de son mandataire
financier et sans l'intervention de celui-ci, des dépenses de campagne
d'un montant total de 5 087 € ». Parmi ces
dépenses : une facture de 3 289 € émise par la Poste pour
l'acquisition d'enveloppe prétimbrées et des frais de repas et
de location de salle pour un montant de 1 798 €."
Passe encore, la
loi est dure, la loi est stupide, mais c'est la loi. Le plus grave est que le
député invalidé soit déclaré, selon cette
procédure, inéligible pour un an, et sans la moindre voie de
recours contre cette décision, alors que les
irrégularités constatées ne relèvent absolument
pas de la malhonnêteté. Autrement dit, pas question pour lui de
se représenter à la législative partielle à
venir.
Alors que la
moindre condamnation d'un voleur est fort heureusement susceptible d'appel,
et que, à la notable et regrettable exception de certains excès
de vitesse, toute décision d'autorité est normalement susceptible
de recours, un député, élu au suffrage universel,
peut se voir privé de son mandat et inéligible, sans recours,
pour 5 000€ qui n'ont pas transité par la bonne caisse. Je ne
suis pas juriste, mais voilà qui ne paraît guère conforme
à l'esprit de la constitution, ni aux principes généraux
de notre droit, ni aux règles de fonctionnement juridiques
imposées aux états membres de l'Union Européenne.
Que le conseil
constitutionnel, théoriquement gardien des fondements de notre
état de droit, soit chargé d'appliquer avec une telle
dureté de tels textes, et qu'il le fasse apparemment sans états
d'âme, cela dépasse l'entendement. De là à y voir
un authentique déni de démocratie, il n'y a qu'un pas que je
franchis allègrement.
J'ignore qui est
M. Sarlot, si ses idées sont bonnes ou mauvaises, et peu importe.
Peut-être n'est il qu'un député de base victime de
règles ahurissantes, il ne correspond pas à l'idée que
je me fais du "rebelle anti-système". Mais je vois
dans ces lois, que le conseil constitutionnel n'a pas censurées quand
elles ont été votées, et qu'il applique avec une minutie
dont on espère qu'elle aurait été la même si le
député s'était appelé Ayrault ou Devedjian, un
moyen de trouver facilement mille et un prétexte pour empêcher
tout candidat qui déplairait à tel ou tel potentat national de
siéger à l'assemblée.
En effet, pour en
avoir parlé avec des "petits" candidats aux
législatives, il apparaît que les textes régissant les
dépenses des candidats en campagne, et les relations du candidat avec
son mandataire financier, sont d'application très complexe. Il
doit donc être facile, pour un juriste professionnel, doté
d'assistants qui ne le sont pas moins, de déceler "la petite
bête" qui permettra au conseil constitutionnel d'empêcher
tout député insuffisamment "dans le moule" de siéger.
Ces lois ont
été votées suite aux affaires glauques qui ont
émaillées les années Mitterrand et Chirac, soi disant
pour lutter contre la corruption politique, en instaurant un financement
"transparent" des campagnes. Rien ne permet d'affirmer que la corruption des moeurs
politiques ait diminué, bien au contraire. Par
contre, le pouvoir politico-administratif s'est doté d'un moyen
de plus pour empêcher tous ceux qui pourraient remettre en cause les
privilèges de caste de ses membres d'être en mesure
de le faire.
La France est
certainement, de toutes les nations considérées comme
démocratiques, celle où les droits de l'homme, les
libertés individuelles, et le fonctionnement de la démocratie,
sont les plus malmenées. La classe parasitaire qui met ce pays en
coupe réglée depuis trop longtemps a
savamment su tisser une toile protectrice de ses
privilèges qu'elle parvient à imposer à une "France
d'en bas" trop anesthésiée de subventions, d'avantages
acquis et de politiquement correct pour se rendre compte qu'on est en train
de lui confisquer, petit à petit, le peu d'espace de contestation et
de liberté qu'il lui reste.
La France est
à la démocratie et aux droits de l'homme ce que les villages du
prince Potemkine
étaient à la prospérité.
Vincent
Bénard
Objectif Liberte.fr
Egalement par Vincent Bénard
Vincent Bénard, ingénieur
et auteur, est Président de l’institut Hayek (Bruxelles, www.fahayek.org) et Senior Fellow de Turgot (Paris, www.turgot.org), deux thinks tanks francophones
dédiés à la diffusion de la pensée
libérale. Spécialiste d'aménagement du territoire, Il
est l'auteur d'une analyse iconoclaste des politiques du logement en France,
"Logement,
crise publique, remèdes privés", ouvrage publié
fin 2007 et qui conserve toute son acuité (amazon), où il
montre que non seulement l'état déverse des milliards sur le
logement en pure perte, mais que de mauvais choix publics sont directement à
l'origine de la crise. Au pays de l'état tout puissant, il ose
proposer des remèdes fondés sur les mécanismes de
marché pour y remédier.
Il est l'auteur du blog "Objectif
Liberté" www.objectifliberte.fr
Publications :
"Logement: crise publique,
remèdes privés", dec 2007, Editions Romillat
Avec Pierre de la Coste : "Hyper-république,
bâtir l'administration en réseau autour du citoyen", 2003, La
doc française, avec Pierre de la Coste
Publié avec
l’aimable autorisation de Vincent Bénard – Tous droits
réservés par Vincent Bénard.
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