Voilà une année qui commence
sur les chapeaux de roues. Il faut dire que « paix, amour et
harmonie » ne semblent pas être les mots d’ordre de 2016 – si les
évènements terrifiants du weekend dernier sont un présage de ce qui reste à
venir. En trois jours, l’Arabie Saoudite a non seulement brisé ses liens
diplomatiques avec l’Iran (après que son ambassade iranienne a été brûlée par
des militants téhéranais en colère), elle a aussi décrété qu’elle se moquait
complètement de ce que peut bien penser la Maison blanche des décapitations
de masse qui ont déclenché l’incident. Et si son attitude a manqué de
froisser la Maison blanche, peut-être que l’étiquetage officiel de l’OTAN et
des Etats-Unis de « menace à la sécurité nationale » par Vladimir
Poutine y est parvenu. N’oublions pas non plus les frissons qui ont couru le
long de la colonne vertébrale des politiciens américains suite à la promesse
de Donald Trump de « couper la tête d’ISIS et de lui prendre son
pétrole ».
Ajoutons à cela que la
septième plus grosse banque portugaise, qui a récemment passé le test de
stress de la BCE, a fait l’objet d’un bail-in – une opération qui a coûté 2,2
milliards d’euros aux déposants, un jour seulement après le passage de la
nouvelle législation européenne sur le refinancement des banques. Et en
parlant de lois draconiennes prenant effet ce mois-ci, le plus gros service
public californien, Pacific Gas and Electric, a accueilli 2016 avec une hausse
de 7% du coût d’électricité, malgré la « déflation » des prix de
l’énergie. Je n’ai certainement pas besoin de rappeler aux chefs d’entreprise
que le premier janvier a également apporté avec lui une hausse du salaire de
base décidée par le gouvernement américain qui ne fera qu’étouffer l’économie
davantage. Oh, et il y a aussi le mandat d’assurance par l’employeur
d’Obamacare – raison pour laquelle j’ai qualifié Obamacare le mois dernier
d’ « impact de balle dans la tête de l’économie de 2016 ».
En Extrême Orient, la Corée du
Sud a annoncé une chute de 14% de ses exportations au mois de décembre, un
déclin qui n’a fait que confirmer le ralentissement économique global. Les
revenus des casinos de Macao se sont effondrés de 34% en 2015, ce qui prouve
que les consommateurs n’ont plus rien à dépenser – chose que ma femme a
également découvert ce weekend lors de soldes de janvier si drastiques
qu’elle-même a eu du mal à croire les taux de rabais. L’industrie américaine,
qui croule sous les stocks, souffre des soldes et emploie beaucoup trop de
monde, est sur le point d’annoncer un début d’année aussi catastrophique
qu’en 2008.
Ici, aux Etats-Unis de la
Décimation Economique, nous faisons face non seulement à l’effondrement des
volumes de ventes à mesure qu’implose la « consommation » - qui
représente 70% du PIB ; mais aussi aux inondations dévastatrices de la
rivière Mississippi. Non seulement la plus grosse Too Big To Fail de toutes,
Bank of America, est d’avis que ses bénéfices sont sur le point d’enregistrer
un plus gros déclin qu’en 2008. Notez également qu’elle ait admis que
les marchés financiers sont manipulés par la Fed ! Alors même que l’ami
et partenaire de la Réserve fédérale, JP Morgan, commençait l’année en
annonçant à ses clients que « les actions ne devraient pas se comporter
pour le mieux au cours des douze à vingt-quatre mois à venir » et que
« la stratégie d’achat en période de baisse pourrait être remplacée par
une stratégie de vente en période de hausse ». Et l’article le plus lu
ce weekend sur Yahoo ! Finance expliquait comment la hausse de taux
supposément mise en place par la Fed n’a pas eu lieu, et que les taux
collatéraux ont grimpé en raison des craintes liées à l’expansion des défauts
de dettes.
Mais tout cela n’est rien en
comparaison à ce qui s’est passé la nuit dernière en Chine. Suite à un
effondrement massif et « inattendu » de son indice PMI
manufacturier et un record à la baisse sur plusieurs années de la devise
chinoise, le marché de Shanghai déjà en difficulté a été suspendu deux heures
avant la fin de la journée suite à une chute de 7%. Juste après, les actions
européennes ont perdu entre 3 et 4%, et les marchandises et les rendements
des bons du Trésor se sont effondrés. Le Dow des contrats à terme a baissé de
2%, et l’or et l’argent ont de nouveau grimpé.
Et il n’est que 8h30 du matin
à l’heure où j’écris ces lignes. Je suis curieux de voir ce qui arrivera
aujourd’hui, moi qui hier soit ai dit à ma femme que cette nouvelle année
marquerait une « année d’inflexion dans l’Histoire globale ». Mais
venons-en maintenant au sujet le plus important du jour, à la stratégie qui
pourra potentiellement nous protéger face à ce qui arrive. J’aborderai
maintenant un sujet duquel j’ai rarement parlé par le passé, celui du métal
oublié qu’est le platine.
Souvenez-vous que le platine,
le palladium et le rhodium sont, au même titre que l’or et l’argent, membres
du groupe des métaux précieux. Le rhodium est si rare qu’il est
essentiellement impossible d’investir dessus et, de mon humble avis, le
palladium est un métal uniquement industriel. En revanche, le platine
ressemble bien plus à l’or et à l’argent, dans le sens où il est un métal
rare et très recherché en raison de sa durabilité et de sa rareté. Bien que
le platine n’ait jamais servi de métal monétaire, en termes directionnels,
son prix suit largement ceux de l’or et de l’argent.
Le graphique ci-dessous
présente les corrélations entre l’or, l’argent et le platine au cours de ces
quatre dernières décennies – plus spécifiquement depuis le début du marché
haussier des métaux précieux survenu en début de siècle. Comme vous pouvez le
voir, les trois métaux ont fluctué ensemble, notamment si nous laissons de
côté la flambée anormale du prix du platine survenue entre 2007 et 2008 et
liée à une pénurie d’électricité en Afrique du Sud.
En 2015, le prix du platine a
chuté plus brutalement que ceux de l’or et de l’argent, malgré un
effondrement de la production de platine, une rareté évidente sur le marché
au détail, et les difficultés accrues de production au travers du secteur. La
production de l’industrie dans son ensemble, dont 70% émane du terrain vague
économique en implosion qu’est l’Afrique du Sud, a atteint un record en 2006
avec sept millions d’onces – soit seulement 5% de la production d’or globale.
Elle est retombée à moins de six millions d’onces en 2015. Puisque les
dépenses de capital de l’industrie ont plongé de près de 70% en dix ans, il
n’y a que peu de chances que la production remonte dans un avenir proche –
surtout au prix de 875 dollars l’once, un prix moitié moins élevé que son
coût de production marginal de 1.200 à 1.400 dollars par once.
La rareté du platine a été
telle que l’atelier monétaire des Etats-Unis a cessé de vendre des Platinum
Eagles entre 2009 et 2013, après quoi elle en a remis en vente en 2014 pour
une durée de dix mois. Après avoir vendu 16.000 onces additionnelles, ses
stocks se sont épuisés en octobre 2014. Elle n’a depuis pas vendu la moindre
once de platine. Des pénuries similaires ont affecté les Maple Leaf de
platine du Canada et les Platypus de platine de l’Australie. En revanche, les
plus opportunistes peuvent toujours acheter du métal, notamment sous forme de
barres émises par des organismes externes aux gouvernements.
L’idée derrière cet article –
en-dehors de ma volonté de pousser les propriétaires de métaux précieux à
considérer une optimisation de leur portefeuille au vu des opportunités qui
nous ont été offertes l’an dernier par les mouvements extrêmes sur les
marchés – est que le ratio or/platine est aujourd’hui tout en haut de son
écart historique, l’or se vendant actuellement 22% de plus que le platine
contre une moyenne sur 40 ans de 17% de moins. Je n’essaie pas de dire que le
ratio s’en retournera à sa moyenne historique. En revanche, au vu des
facteurs précédemment mentionnés, il y a des chances qu’il finisse par
baisser, comme le devrait également le ratio or/argent.
Maintenant que 2016 est
arrivée, et avec elle une situation politique, économique, sociale et
financière qui pourrait s’avérer la pire que nous ayons jamais traversé, nous
ne pouvons souligner suffisamment la nécessité de nous protéger face à ce qui
nous attend. Il est temps, aujourd’hui plus que jamais, de nous pencher sur
nos actifs financiers, d’observer la viabilité de nos positions et d’agir en
conséquence.