Mes chères contrariennes, mes chers contrariens !
Aujourd’hui, je souhaitais quitter le champ économique pur pour faire une petite incursion au sujet de la crise ukrainienne. Évidemment, l’économie n’est jamais loin. Souvenez-vous de l’inversion sémantique dans l’ouvrage de référence 1984 ! Dans ce livre, tous les mots changent de sens. « La guerre c’est la paix » est l’un des slogans cardinaux de George Orwell mais ce n’est bien sûr pas le seul exemple. Le ministère de la Torture est rebaptisé ministère de l’Amour et tout est à l’avenant dans ce monde « orwellien ».
Ce qui pouvait sembler de la science-fiction ou n’être qu’un roman d’anticipation est en fait devenu réalité et vous pouvez contempler sous vos yeux, là, maintenant, les manipulations grossières auxquelles nous sommes soumis à longueur de journée. Encore ce matin, mon idole (et je le dis sans ironie tant il a bercé ma jeunesse de ses doctes explications) Bernard Guetta de France Inter y allait de son couplet anti-Poutine et de sa « russo-phobie » primaire !
Cette manipulation géopolitique à laquelle nous sommes confrontés est révélatrice des méthodes désormais employées sans vergogne par nos dirigeants sur tous les domaines, et ces outils et cette culture du mensonge posent incontestablement un problème démocratique de taille. Pour le dire plus clairement : la masse de mensonges qui nous est servi matin, midi et soir est tout simplement incompatible avec un exercice citoyen éclairé. C’est incompatible avec la liberté.
Les mots ont un sens et la défense de la vérité est le seul contre-pouvoir crédible contre le poison de la manipulation
Je fais partie de ceux qui considèrent que tout ne peut pas forcément être dit parce qu’il existe des cas où les « secrets d’État » ont effectivement une signification et que pour protéger les intérêts supérieurs de votre nation et du peuple il faut parfois cacher certaines choses. C’est une évidence qu’il convient de rappeler. Il ne s’agit donc pas d’être irresponsable dans la divulgation d’informations.
Néanmoins, ce qui se passe au sujet de l’Ukraine est tellement gros que cela mérite une nouvelle dose de ré-information.
Oui Poutine n’est pas un ange et sa conception de la démocratie est une conception russe de la chose, tout comme nous avons en France la nôtre et elle a beaucoup évolué ces dernières années, en tout cas depuis 2001 et plutôt vers la démocrassie que vers la Démocratie.
Comme vous le savez, la Russie est dans le camp des méchants et du « mauvais côté de l’histoire », en tout cas c’est ce qui nous est rappelé avec force et conviction ces derniers jours par nos dirigeants qui bombent le torse et tiennent des propos assez édifiants tellement les mensonges sont gros.
Ainsi, Laurent Fabius, notre ministre des Affaires étrangères, a tenu à rassurer le peuple de France, alors que notre pays sort à peine du psychodrame de l’affaire M’Bala M’bala et que l’on s’interroge toujours sur l’ambiguïté du geste dit de la « quenelle » qui serait un signe antisémite.
Rassurez-vous, en Ukraine, point n’est besoin de s’interroger trop longtemps puisque le parti Svoboda dont je vous ai déjà parlé est un parti fondamentalement et sans conteste de la pire espèce antisémite.
Donc notre ministre Fabius disait avec fermeté sur France Inter que :
« Quand on accuse ce gouvernement d’être d’extrême droite, c’est faux. » « Il y a trois membres du parti Svoboda qui est un parti plus à droite que les autres, mais l’extrême droite n’est pas au sein du gouvernement », a-t-il ajouté…
La démission sous la contrainte physique du président de la télé publique ukrainienne
Aujourd’hui, enfin hier, nous avons eu droit à une illustration extraordinaire de la conception de la démocratie des membres du « parti un peu plus à droite », comme dirait Fabius, puisque des membres élus au Parlement ukrainien de Svoboda ont pris d’assaut le bureau du président du France Télévision locale et lui ont «littéralement éclaté » la tête sur son bureau jusqu’à ce que ce dernier, sous une modeste « pression » physique, c’est-à-dire un lynchage en règle, prenne une feuille blanche tenue par un preneur d’otage fort sympathique et démocrate puisque soutenu par nous (les gentils) et signe « librement » sa démission qui, évidemment, dans un pays démocratique, ne serait pas valable et serait annulé par le tribunal des prud’hommes… Même que la victime pourrait demander quelques dommages et intérêts vu la violence de la scène que vous pourrez regarder sur la vidéo ci-dessous diffusée par le site Euronews.
Comme le dit Euronews, qui n’arrive pas même en se forçant à soutenir les membres de ce parti :
« Le président de la télévision nationale ukrainienne, Alexander Panteleymonov, a passé hier soir un mauvais moment. Des hommes ont investi son bureau et l’ont forcé à signer sa démission. Et ces assaillants sont des membres du parlement. Des députés du parti d’extrême-droite Svoboda qui reprochent notamment à Alexander Panteleymonov d’avoir diffusé hier en direct la cérémonie de signature par Vladimir Poutine du traité entre la Crimée et la Russie. Le patron de la télévision, déjà en fonction sous Ianoukovitch, était connu pour pratiquer la censure. La télévision a été accusée d’avoir constamment menti pendant le siège de Maïdan. Il n’empêche que la méthode est plutôt musclée, de la part de députés. L’homme à la queue de cheval est responsable au parlement de la liberté d’expression. »
Heureusement, le Premier ministre a « condamné un acte inacceptable pour une société démocratique »… Mais le pauvre président de télé n’a pas été « re-missionné » !
Un parti de nazillons aux méthodes « nauséabondes » !
Voilà ceux que Laurent Fabius soutient. Voilà ceux que nous autres, occidentaux, soutenons et encourageons. N’y a-t-il pas là de quoi comprendre la fureur somme toute contenue des Russes (la guerre avec les nazis, c’est presque 30 millions de morts et un pays ravagé) ?
Nous devons nous rendre compte de ce que c’est que « les pires moments de notre histoire », où les propos « nauséabonds » qui sont des termes galvaudés sous nos latitudes tant tout ce qui n’est pas politiquement correct pour nos bien-pensants est systématiquement qualifié avec ces mots. Or ce qui est nauséabond c’est de soutenir en mentant des gens comme ceux de Svoboda qui défilent en uniformes, qui terrorisent tous les démocrates et qui confisquent la liberté de la majorité.
Ce qui nous rappelle les heures les plus sombres de notre histoire c’est de voir un parti fasciste utiliser exactement les méthodes de la SA d’Adolf Hitler et de terroriser par la violence la plus extrême tous ceux qui ne pensent pas comme eux, tous ceux qui ne sont pas comme eux.
Ce président de la télévision publique ukrainienne n’avait vraisemblablement plus beaucoup d’avenir professionnel dans le paysage médiatique ukrainien, mais sommes-nous obligés de supporter et de cautionner l’hypocrisie de nos dirigeants si prompts à qualifier de fascistes rances les gamins de la manif pour tous ayant l’outrecuidance de manifester pour une certaine tradition (à laquelle on peut avoir le droit de ne pas adhérer) et pourtant soutenant politiquement, militairement et économiquement avec notre argent un régime dont les exactions ne vont faire que s’aggraver ?
Revenons à plus de modération
Je crois que là est l’essentiel, plus de modération et plus de sérénité sur ce dossier ukrainien sur lequel nos dirigeants s’agitent comme des pantins désarticulés sans que cela n’aboutisse d’ailleurs à grand-chose. Les sanctions sont très modestes pour ne pas dire uniquement symboliques pour le moment alors que les propos sont outranciers.
Nous avons voulu créer une forme de chaos en Ukraine pour jouer un tour pendable aux Russes et, comme à chaque fois, ces méthodes de voyous conduisent à une fragmentation et un délitement du pays concerné, ce qui amène progressivement à une guerre civile et à une balkanisation. À chaque fois, ce sont les peuples qui paient au prix fort un conflit qu’ils n’ont jamais demandé ni souhaité.
Ceux qui veulent en savoir un peu plus encore sur ces gentils « démocrates » ukrainiens peuvent lire l’excellent papier d’Olivier Berruyer, qui comme moi, est loin d’être un fasciste et qui est un garçon parfaitement pondéré, qui connaît bien son histoire et fait exactement les mêmes constats sur les mensonges éhontés qui nous sont rabâchés.
Ne soyons pas dupes et luttons contre la manipulation par la ré-information systématique de nos concitoyens.
Restez à l’écoute.
À demain… si vous le voulez bien !!
Charles SANNAT
« À vouloir étouffer les révolutions pacifiques, on rend inévitables les révolutions violentes »