Le discours d’investiture de
Donald Trump était basé sur la prétention ridicule qu’il ait pu arriver au
pouvoir en finissant deuxième aux élections avec seulement 46% des voix, 3
millions de votes derrière sa concurrente victorieuse, qui ne s’en est
finalement pas si bien sortie. Trump a décrit son ascension au pouvoir non
pas comme « le simple transfert de pouvoir d’une administration à une
autre, ou d’un parti à un autre, mais depuis Washington à vous, le peuple
américain ».
Ou, comme l’aurait dit le
politicien mégalomane inventé par le Firesign Theater en 1970, « Maintenant,
je suis le peuple ».
Un peu plus loin dans son
discours, Trump nous a fait part d’une autre prétention ridicule – un « petit
groupe de la capitale » a abusé le bon petit peuple du pays.
A vrai dire, alors
que le peuple dit haïr le Congrès, il aime son propre représentant du
Congrès, et le réélit toujours parce qu’il fait de son mieux pour abuser les
autres membres du Congrès au bénéfice de sa propre juridiction. Tous sont
grimpés dans le train du gouvernement, mais tous ne cessent de se dire
exploités.
« Nous avons enrichi les
autres pays alors que le capital, la force et la confiance de notre propre
pays ont disparu à l’horizon, » nous a dit le nouveau président. « Le
capital de notre classe moyenne a été pris d’entre ses mains et redistribué
au reste du monde… A partir de maintenant, nous placerons les Etats-Unis
avant tout. »
Mis à part que depuis 1945,
quand, suite à un accord international, le dollar est devenu la devise de
réserve du monde, le monde lui-même a placé les Etats-Unis avant tout. Dans
le cadre de ses échanges internationaux, le monde a dû utiliser la devise
émise par le gouvernement américain, ce qui a permis aux Etats-Unis de
générer d’énormes déficits commerciaux, et de taxer le reste du monde pour
son utilisation de dollars afin que les Américains puissent consommer bien
plus qu’ils ne produisent.
Cet accord monétaire est la
cause primaire du déclin du secteur manufacturier aux Etats-Unis, dont Trump
s’est plaint tout au long de sa campagne et dans son discours d’investiture.
« Les Etats-Unis avant tout » ?
Voilà bien longtemps que les choses en sont allées autrement.
Le protectionnisme et les taxes
que le président semble vouloir mettre en place ne seront pas favorables au
secteur manufacturier complexe qui excelle aujourd’hui aux Etats-Unis. Les
autres pays du monde y répondront de la même manière, ce qui pourra être
aussi défavorable à Boeing et Pratt & Whitney qu’à Airbus et Rolls Royce.
Le discours d’investiture de
Trump a inclu une certaine dose de désolation : « Les femmes et les
enfants emprisonnés par la pauvreté dans nos propres villes. Les usines
rouillées qui jonchent le paysage des Etats-Unis telles des pierres tombales.
Un système d’éducation qui prive nos jeunes et beaux étudiants de savoir. Et
le crime, les gangs, les drogues qui ont volé trop de vies, volé notre pays
de tant de potentiel… Nous avons défendu les frontières des autres pays tout
en refusant de défendre les nôtres. »
Mais la réponse apportée par
Trump à ces questions n’a seulement été que la mégalomanie la plus délirante.
« Ce carnage américain s’arrête ici et maintenant, » nous a-t-il
dit avant de s’en aller parader et danser au bal d’investiture.
Une nouvelle semaine a commencé,
et bien évidemment, le « carnage » n’a ni pris fin ni même ralenti.
Les proclamations ne valent rien contre des problèmes nés de mauvaises
politiques employées trop longtemps. Le pays ne pourra peut-être pas être
capable de les surmonter s’il reste tout aussi politiquement,
philosophiquement et socialement divisé que la République de Weimar sous les
Nazis et les communistes.
A vrai dire, alors que la droite
populiste prenait le pouvoir aux Etats-Unis, à quelques rues de là, les
néo-stalinistes manifestaient déjà, cassant des fenêtres et brûlant des
voitures.