Le marché de l’argent a fait
l’expérience de sérieuses transformations desquelles les investisseurs
doivent être informés. Malheureusement, il existe actuellement une pénurie d’informations
et il est important de rappeler aux investisseurs quels sont les facteurs
clés. Pour comprendre les dynamiques de coût et de prix du marché de
l’argent, les trois graphiques ci-dessous sont essentiels.
J’ai récemment interviewé
Jason Burack, de chez Wall
Street for Main Street (interview qui sera publiée très bientôt) sur le
sujet de la valeur future des métaux précieux. Mon analyse se penche sur la
manière dont l’énergie deviendra la force déterminante de la hausse de la
valeur de l’or et de l’argent sur le long terme.
Après la publication de mon
article intitulé Gold
& Silver Prices To Surge On Fundamentals, Not Technical Analysis,
un certain nombre de mes lecteurs m’ont écrit pour me dire qu’ils pensaient
que la baisse du prix du pétrole garantissait le maintien des prix des métaux
précieux à un niveau assez peu élevé. Bien que cela puisse sembler logique,
je pense tout à fait le contraire.
Avant d’entrer plus en détails
quant à la raison pour laquelle je suis d’avis que la valeur de l’argent
finira par flamber, voyons quelques bases fondamentales relatives au coût et
à la valeur de l’argent.
Prix de l’argent et
prix d’un baril de pétrole
Le prix de l’argent se déplace
en tandem avec le prix du baril de pétrole depuis plus de cent ans. Voici un
graphique qui montre l’évolution des deux prix depuis 2000 :
Comme nous pouvons le voir, à
mesure que le prix du pétrole a grimpé, le prix de l’argent en a fait de
même. Certains analystes techniques pourraient penser que c’est une simple
coïncidence… mais ce n’est pas le cas. L’énergie est le facteur clé qui
détermine la valeur d’une majorité des actifs. C’est un sujet qui n’est pas
matière à discuter, bien que beaucoup soient ceux qui continuent de perdre
leur temps à tenter de prouver le contraire.
Le point important à souligner
ici est la relation entre les prix de l’argent et du pétrole aujourd’hui, en
comparaison à ce qu’elle était la dernière fois que le prix du pétrole était
aussi bas. Pour ce faire, il nous fait remonter jusqu’en 2004, alors que le
baril de pétrole de Brent se vendait pour la même somme qu’aujourd’hui.
Aujourd’hui, le baril de Brent
se vend 39,65 dollars, et l’once d’argent se vend 14,11 dollars. En revanche,
alors que le prix du Brent était de 38,26 dollars, le prix de l’argent était
bien inférieur, avec 6,67 dollars. Voilà qui pourrait vous attrister, parce
que cette tendance insinue un prix de l’argent bien plus faible qu’il l’est
aujourd’hui.
Mais ne vous inquiétez pas,
les lois fondamentales montrent que la structure du marché de l’argent est
bien différente aujourd’hui de ce qu’elle était il y a dix ans.
Les rendements et les
coûts de l’industrie minière argentifère fluctuent dans des directions
opposées
Un certain nombre de mes
lecteurs m’ont écrit par email pour me faire part de leur inquiétude face à
la possibilité pour la baisse du prix du pétrole de se traduire par une
baisse du prix de l’argent. Bien que ce puisse être une crainte justifiée, il
existe divers facteurs qui révèlent un avenir plus optimiste.
Un aspect du marché de
l’argent qui n’est pas discuté en détails par la communauté des métaux
précieux est le déclin très important des rendements moyens des producteurs
primaires. Je suis l’un des seuls analystes à avoir publié des graphiques
montrant le déclin de ces rendements moyens pour les plus gros producteurs.
Entre 2005 et 2013, les
rendements moyens des six plus grosses sociétés de production d’argent sont
passés de 13 onces par tonne à 7,6 onces par tonne. C’est donc un déclin de
42% en seulement huit ans. En revanche, cette tendance s’est renversée en
2014, après l’ouverture par Tahoe Resources de sa mine Escobal, au Guatemala.
En 2014, la mine Escobal de Tahoe Resources a enregistré des rendements de 16
onces par tonne.
Ce qui est intéressant ici,
c’est qu’en ajoutant cette mine au groupe, les rendements moyens d’ensemble
passent à 7,8 onces par tonne. Si nous observons les données disponibles pour
les trois premiers trimestres de l’année 2015, les rendements moyens sont de
nouveau à la baisse. L’une des raisons pour lesquelles les rendements du
groupe ont décliné pour atteindre 7,4 onces par tonne cette année et le
plongeon des rendements de la mine Escobal, qui sont passés de 16 à 13 onces
par tonne au cours des trois premiers trimestres de l’année.
Selon certains analystes,
certains producteurs primaires se seraient concentrés sur leurs terrains aux
rendements les plus importants pour rester profitables. Bien que ce puisse
être vrai pour certaines mines et certaines sociétés, ce n’est pas le cas
pour l’intégralité de l’industrie minière argentifère. Si c’était le cas,
nous aurions eu une hausse des rendements moyens en 2015, et non l’inverse.
Il est nécessaire pour les
investisseurs de réaliser que l’industrie minière primaire traite aujourd’hui
deux fois plus de minerai afin d’extraire la même quantité ou moins d’argent
qu’il y a dix ans. Mais ne me croyez pas sur parole, voici les chiffres qui
vous le prouveront :
Minerai traité par les
sept plus gros producteurs primaires d’argent
2005 = 9.444.000 tonnes
2014 = 17.776.000 tonnes
Bien que ce ne soit pas tout à
fait le double, nous n’en sommes pas loin. Cette forte croissance des
quantités de minerai traitées ont un impact sur le coût de production de
l’argent. Pour vous faire une meilleure idée de la manière dont l’industrie
minière en est affectée, penchons-nous sur les plus gros producteurs du
monde.
Pan American
Silver : les signes d’une hausse des coûts
En observant l’un des plus
gros producteurs d’argent au monde, nous pouvons voir à quel point les coûts
de production ont pu grimper depuis dix ans. Ce graphique montre le prix
moyen annuel que Pan American Silver a reçu pour son argent (ligne blanche),
l’estimation de son seuil de rentabilité (zone en bleu clair) et ses revenus
estimés par once (vert et rouge). La zone en vert symbolise un profit, et la
zone en rouge une perte :
Le prix de l’argent obtenu par
Pan American Silver cette année est très proche du prix marché moyen. Selon
mes calculs de rentabilité, Pan American a perdu 10 cents par once en 2014.
Ses revenus étaient positifs entre 2007 et 2012, et sont négatifs depuis
trois ans.
Ses profits par once ont
atteint un record de 9,02 dollars l’once en 2011. Ce qui est intéressant sur
le graphique ci-dessus est le ratio coût/prix marché depuis 2004. Je n’ai pas
inclus les années 2005 et 2006, parce que le graphique original représentait
les années 2007 à 2014. Je prévois d’ajouter les années manquantes jusqu’en
2000, mais je le publierai plus tard.
Pan American Silver a perdu 10
cents par once en 2004, alors que le prix marché moyen était de 6,67 dollars.
Le seuil de rentabilité de Pan American Silver était alors de 6,77 dollars.
Et la même année, le prix du baril de Brent était de 38 dollars. Si nous
observons les résultats de Pan American Silver pour les neuf premiers mois de
2015, nous avons un prix moyen de 15,85 dollars pour l’argent, et une perte
de 97 cents pour chaque once produite.
Ce qui signifie que Pan
American Silver aurait dû recevoir 16,82 dollars par once pour atteindre son
seuil de rentabilité. Une fois encore, cette somme est déterminée par mon
estimation du seuil de rentabilité de l’entreprise, basé sur ses revenus
ajustés. Par exemple, Pan American Silver a rapporté des profits nets de 19
millions de dollars en 2004, mais ces revenus ont été liés à la vente de
l’une de ses propriétés pour la somme de 23,7 millions de dollars. Les
profits enregistrés cette année n’ont rien eu à voir avec la production
d’argent, mais avec la vente de l’un de ses actifs.
C’est la raison pour laquelle
j’utilise l’approche des revenus ajustés pour déterminer un coût plus
réaliste de la production d’argent.
Bien que Pan American Silver
ait été capable d’abaisser son seuil de rentabilité en réduisant ses coûts et
grâce à la baisse du prix de l’énergie, nous pouvons voir qu’elle a toutefois
perdu 97 cents par once avec un prix de 15,85 dollars l’once en 2015, contre
10 centimes de perte par once en 2004 pour un prix de l’argent de 6,67
dollars.
Estimation du seuil de
rentabilité de Pan American Silver :
2004 = $6,77
2015 (trois premiers mois) =
$16,82
Si le prix du pétrole continue
de plonger, l’industrie primaire pourrait enregistrer un déclin additionnel
de son coût de production. Ceci étant dit, je ne suis pas certain qu’elle
puisse enregistrer une réduction significative de son coût de production. La
raison en est la hausse du taux d’inflation, sans oublier la baisse des
rendements. Il est aujourd’hui beaucoup plus cher qu’il y a dix ans de
produire de l’argent… même avec un prix du pétrole identique.
Bien qu’il soit vrai
que Pan American soit seulement une société parmi tant d’autres, la structure
de coûts est la même au travers de l’industrie. Ainsi, une baisse du prix du
pétrole ne se traduira pas par une baisse correspondante du prix marché de
l’argent comme nous l’avons vu en 2004.
Le marché et l’industrie de
l’argent font l’expérience de transformations sérieuses, et il ne sera qu’une
question de temps avant que les investisseurs réalisent que l’argent est l’un
des actifs les plus sous-évalués au monde.
Prix de l’argent en
tant que marchandise et actif de valeur de réserve
L’un des facteurs importants
que les investisseurs doivent comprendre au sujet de l’argent est la
différence entre son prix en tant que marchandise et son prix en tant que
valeur de réserve. A l’heure actuelle, l’or et l’argent sont évalués en tant
que marchandises. Cette valeur est estimée en fonction du coût de production
et des forces de l’offre et de la demande. Si le coût de production d’or de
l’industrie était de 500 dollars, son prix marché serait bien inférieur à ce
qu’il est aujourd’hui.
En revanche, le coût de
production de l’or est très proche de son prix marché. La même chose est
vraie pour l’argent. Nous pouvons le voir au travers du seuil de rentabilité
de Pan American. Bien évidemment, l’offre et la demande jouent aussi un rôle,
mais ces forces sont artificiellement manipulées en raison du transfert des
fonds des investisseurs vers les produits financiers papiers (que certains
appellent actifs… même s’ils ne le sont pas) qui a eu lieu au cours de ces
dernières décennies.
Parce que le coût de production
de l’industrie primaire est proche du prix marché de l’argent, les
investisseurs ne comprennent pas pourquoi les analystes des métaux précieux
continuent de dire que l’argent est sévèrement sous-évalué.
Facteur
important : l’argent n’est pas sous-évalué en raison de son coût de
production pour l’industrie primaire, mais en raison de la mauvaise
compréhension de ses principes de valeur de réserve en comparaison aux actifs
papiers.
A mesure que la plus grosse
combine à la Ponzi que le monde ait jamais connue se désintègrera sous le
poids de l’effondrement de la production de pétrole américaine et globale,
les investisseurs se déplaceront vers les actifs physiques tels que l’or et
l’argent pour protéger leur capital. Nous en percevons déjà les premiers signes.
Les investisseurs ont conservé
leur argent sur des comptes bancaires pour en tirer des intérêts. En
revanche, à mesure que les intérêts se sont rapprochés de zéro et sont sur le
point de devenir négatifs, ils n’ont plus aucune raison de conserver leurs fonds
sur ces comptes. La notion selon laquelle l’or et l’argent n’enregistrent pas
de rendements n’aura bientôt plus d’importance aux yeux des plus fortunés qui
souhaiteront simplement protéger leur capital face aux possibles bail-ins.
De plus en plus de sociétés
cherchent également à réduire ou faire disparaître leurs versements de
dividendes. Les investisseurs qui s’inquiètent des valeurs de leurs actions
et en ont conservé parce qu’ils en tirent des dividendes changeront vite
d’avis quand ces revenus s’évaporeront.
Le monde entre dans la phase
terminale d’un évènement pour lequel il n’est pas préparé. Il n’y aura
bientôt plus que quelques actifs susceptibles de protéger le capital. L’or et
l’argent sont deux des actifs historiques les plus sûrs, qui ont été utilisés
en tant que valeurs refuges depuis déjà plus de 2000 ans.