En France, on compte aujourd’hui environ 36,5 millions de foyers
fiscaux dont moins de la moitié sont redevables de l’impôt sur le revenu.
Pour autant, ceux que l’on désigne comme non-imposables, généralement parce
que ne disposant pas de revenus suffisants, n’en sont pas moins assujettis à
une fiscalité relativement importante puisqu’elle s’élève en moyenne à plus
de 6000 euros par an et par foyer.
Depuis sa création en 1914, l’impôt sur le revenu a toujours eu mauvaise
presse. Trop lourd, mal réparti, désagréable, accusé de ménager les plus
hauts revenus au détriment des classes moyennes, on a tout dit sur cet impôt
qui doit surtout son impopularité au fait qu’il est basé sur une déclaration
volontaire des contribuables, lesquels ont alors le sentiment de devoir
acheter la corde pour se faire pendre.
Le nombre de foyers imposables en baisse depuis 30 ans
Quoi qu’il en soit, c’est vrai que la charge de cet impôt tend à
peser sur un nombre de plus en plus restreint de ménages, pour un
montant global qui, lui, ne cesse de croître. Mais cette tendance est
relativement récente dans l’histoire fiscale de la France. Jusqu’en 1985, le
nombre de ménages imposables augmentait régulièrement d’année en année : de
moins de 2 % en 1916, il atteint 20 % en 1955 pour se stabiliser finalement
aux alentours de 65% dans les années 1970-1980. Néanmoins, depuis 30 ans, on
assiste effectivement à une très forte contraction de la base de foyers
imposables, qui avoisine aujourd’hui les 47% du nombre total de
foyers fiscaux. Mais contrairement à ce que l’on croit, cette
majorité de Français dits “non-imposables” n’est pas pour autant libéré de
ses obligations fiscales, au contraire.
En 2016, la loi de finances initiale laisse apparaître un total de
recettes fiscales de 388 milliards d’euros dont seuls 76,5 milliards viennent
de l’impôt sur le revenu. Le reste est constitué principalement de la
fiscalité sur les entreprises (qui ne concerne donc pas les particuliers
directement) mais aussi et surtout de la taxe sur la valeur ajoutée,
plus communément appelée “TVA”. L’an dernier, elle s’élevait à 195,8
milliards d’euros, soit plus de la moitié des recettes fiscales de
l’État (50,5%). Or, tout le monde paie la TVA, que l’on soit ou non
redevable de l’impôt sur le revenu, et le coût moyen par foyer fiscal
avoisine les… 5300 euros par an !
Un impôt injuste parce que parfaitement égalitaire
C’est d’ailleurs ce qui fait dire à beaucoup de gens que la TVA
est un impôt particulièrement injuste, même s’il est universel et
s’applique donc à tout le monde sans distinction, selon le principe de
l’égalité fiscale. Car qui dit “égalité” ne dit pas pour autant “équité”. En
effet, hormis les quelques cas de contribuables aisés qui ont su jouer des
niches fiscales et autres mécanismes de défiscalisation pour échapper à
l’impôt sur le revenu, l’écrasante majorité des ménages
non-imposables est constituée des foyers les plus modestes.
Or, leur situation parfois difficile ne les exonère aucunement d’une TVA
omniprésente, obligatoire et pas toujours justifiée. D’aucuns réclament par
exemple que les produits alimentaires courants ou de première nécessité ne
supportent aucune TVA, comme cela se pratique déjà dans un
grand nombre de pays, car leur consommation est absolument incontournable et
pénalise les moins fortunés. En échange, on pourrait parfaitement imaginer une
fiscalité renforcée sur les produits de luxe par exemple, dont la
“valeur ajoutée” n’a plus rien à voir avec la réalité des coûts de
fabrication ni même la réponse à un besoin essentiel.
Des impôts qui représentent 50% des revenus des plus modestes
À cette TVA s’ajoute bien souvent une fiscalité locale dans laquelle la taxe
d’habitation tient une place prépondérante. Certes, il existe là
aussi des mécanismes d’exonération mais, d’une manière générale, ils
s’appliquent aux ménages les plus défavorisés sans recouvrir pour autant
l’ensemble des foyers fiscaux non imposables, loin de là. Votée localement,
cette taxe varie quasiment du simple au triple en fonction les régions, pour
une surface donnée, et elle correspond en moyenne à 750 € par an
tous barèmes confondus.
Ajoutée à la TVA acquittée annuellement, même en tenant compte d’une
consommation réduite pour les foyers les plus modestes, la taxe d’habitation
vient donc alourdir une charge fiscale qui peut alors représenter
plus de 50% des revenus des familles les plus fragiles. En effet,
selon l’Insee, les ménages les plus modestes gagnent en moyenne moins
de 11 000 euros par an.