Cet
été, un documentaire intéressant est passé
incognito sur Arte : Les
millions perdus de l’Europe. En à peine plus de cinquante
minutes, sont excellemment résumées les dérives de
l’Union européenne dans ses grandes largeurs.
Le
documentaire commence par le projet (issu
d’une blague en famille !) d’un agriculteur danois,
nostalgique de la montagne, visant à élaborer une… piste
de ski sur ses terres agricoles. Il parvint à obtenir des fonds
communautaires avec l’aide d’un conseiller, également
interviewé par les réalisateurs du documentaire.
Sauf que sa
piste de ski ne connaît pas vraiment un grand succès. Mais,
visiblement, l’agriculteur s’en moque. Ce projet, contrairement
à l’esprit
de la politique de développement rural de l’Union
européenne, n’avait apparemment pour but, dans sa tête,
que de satisfaire un plaisir personnel, sans se soucier du
développement de ladite piste de ski.
À la
fin du documentaire, nous voyons d’ailleurs cet agriculteur, buvant une
bière avec ses amis et se réjouissant du fait que l’Union
européenne vient de lui accorder de nouveaux fonds pour la
piste…
Le
documentaire relate également l’affaire de fraude
inhérente au beurre aux hydrocarbures. Plus précisément,
une entreprise de Naples fabriquait un beurre
« chimique » et non authentique à l’aide
de dangereux déchets de bovins. Elle le revendait à bas prix
à de nombreuses sociétés, dont Fléchard SA, firme
basée dans l’Orne. Fléchard SA touchait des subventions
européennes pour l’exportation de beurre authentique
fabriqué par ses propres soins.
Fléchard
SA renifla alors une opportunité financière de premier
ordre : revendre ce beurre chimique bon marché à
l’étranger en faisant croire qu’il est authentique et
recevoir parallèlement lesdites subventions. Heureusement, la fraude
fut découverte par le biais d’un repenti italien de la mafia
napolitaine. Le président de Fléchard SA fut condamné
à rembourser les aides européennes ainsi qu’à
dix-huit mois de prison dont six fermes.
Une question annexe
se posa légitimement pour les réalisateurs du film :
pourquoi FranceAgriMer, grassement payée par
le contribuable, ne s’est-elle pas rendu compte du scandale ?
Pourquoi nos impôts financent-ils une bureaucratie et des emplois
artificiels et inefficaces ?
Le
documentaire refait ensuite escale en Italie, dans le sud, où des
fonds européens devaient servir à la construction d’un
tronçon d’autoroute. Mais la mafia locale, la ‘Ndrangheta, a flairé la bonne affaire et fait en
sorte de laisser perdurer indéfiniment les travaux afin que les
entrepreneurs de travaux publics destinataires des fonds continuent à
toucher leurs subventions annuelles.
Les
conséquences sont catastrophiques : l’entrepreneur
interviewé dans le documentaire (et qui n’est pourtant pas un
lâche, bien au contraire) explique que, du fait du racket permanent de
la ‘Ndrangheta, il était obligé
de rogner sur la qualité des matériaux utilisés pour la
construction du tronçon d’autoroute.
L’OLAF
(Office européen de lutte antifraude) a été
alerté par les réalisateurs du documentaire (Pierre-Emmanuel Luneau-Dorignac et Olivier Toscer)
sur certains détails de cette affaire. Mais, visiblement, son
président, Giovanni Kessler, pourtant
italien, n’en avait cure. Son explication était
édifiante : « après tout, l’entrepreneur
a gagné de l’argent. ». Mais quid d’un
éventuel effondrement, à terme, du tronçon
d’autoroute si les matériaux utilisés sont d’une
qualité aussi mauvaise qu’on le pressent ?
Et, surtout,
Monsieur Kessler, si grassement
rémunéré par les contribuables européens,
pense-t-il à ces derniers, obligés d’enrichir
indirectement une mafia aisée en vue, officiellement engagée
à construire un tronçon d’autoroute qui ne verra peut-être
jamais le jour ? Quelle est, par ailleurs, l’utilité de cet
office européen de lutte antifraude qui ne semble visiblement pas
préoccupé par les fraudes ? Pourquoi existe-t-il ?
Pourquoi nous, contribuables européens, devons-nous supporter son
inutile coût de fonctionnement ?
Le film
s’achève par une enquête sur les carrières des
commissaires européens, une fois leur mandat au sein de la Commission
achevé, puis, donc, par quelques images de cet agriculteur danois
célébrant l’arrivée imminente de nouveaux fonds
européens par une bonne bière entre copains.
À la
santé du contribuable !
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