J’ai à quelques reprises
déjà fait mention de mon adhérence au parti démocrate, une révélation qui a
rendu fous de colère un certain nombre de mes lecteurs. Des années durant, je
n’ai justifié ma préférence que comme étant une opposition formelle au
crétinisme républicain qui s’est propagé au sein de notre pays à la manière d’une
vague septique suite à l’arrivée sur le trône du grand Pompadour-à-la-recherche-d’une-cervelle,
j’ai nommé Ronald Reagan, dont la campagne « morning in America » a
sans doute été la gaffe la plus lourde que j’aie subie au cours de mon
existence. Avec Reagan, nous avons assisté au mariage officiel entre la
politique de droite et les souches les plus attardées de la religiosité évangélique
sudiste. (Ronnie nous a expliqué à plus d’une reprise croire en la proximité
de la « fin des temps » décrite par la Bible, ce qui aurait dû nous
faire réfléchir à la question de son souci véritable pour l’avenir des
Etats-Unis – pensait-il qu’ils en avaient un ? - mais personne n’a
jamais osé la lui poser.) George H. W. Bush s’est exprimé de manière assez similaire,
se pliant peut-être devant les bouffons de Dixie.
Quelle personne saine
d’esprit aurait pu souscrire à un tel amas d’absurdités ?
Et puis les Clinton,
jeunes et magnétiques, sont apparus en 1992. Ils ont dès le début fait preuve
d’une bonne intendance nationale. Bill était capable de s’exprimer
correctement en Anglais, contrairement à ses deux prédécesseurs. Les efforts
d’Hillary en faveur d’une réforme du domaine de la santé n’ont pas porté
leurs fruits, mais ont au moins impliqué une reconnaissance du racket que
devenait alors la médecine (aujourd’hui complètement métastasé). Bill est
parvenu à faire accepter une série de réformes sociales – chose remarquable
pour un démocrate – qui se sont depuis retransformées en un marais de
fraudes. Mais la grande décision de Clinton a été l’annulation de la loi
Glass-Seagal, qui a ouvert la porte à une orgie de fraudes financières si
terribles et à une peste de corruption si étendue que la vie des Américains s’est
trouvée plongée dans l’urgence.
Ajoutons à cela les
échecs de Barack Obama : 1) les fraudes financières n’ont été ni punies
ni régulées, 2) aucun effort n’a été fait en vue de contrer la désastreuse décision
de la Cour Suprême qui autorise les corporations à acheter les élections, 3)
les opérations militaires douteuses menées en terres lointaines n’ont pas
pris fin, et 4) les réformes sociales n’ont fait que fortifier les rackets
existants – additionnez tout cela, et vous ne pouvez que frémir à l’idée de
ce que signifie être un démocrate.
Et voilà qu’Hillary est
de retour, survolant l’arène électorale à la manière de Rodan le reptile
volant. Mais il n’y a pas qu’elle. Il y a aussi le reste de la parade dégoûtante
du cirque de l’identité politique, la chasse aux sorcières informatiques, le
battage médiatique sur la transsexualité, l’idiotie de la fille qui a cru bon
de traîner un matelas derrière elle au travers de son campus, les attaque au
drone quotidiennes, la surveillance du peuple par une NSA devenue
hors-de-contrôle, et la déchéance civile d’un président qui était supposé
être professeur de loi constitutionnelle – la liste d’absurdités et de
turpitudes sponsorisées par les démocrates commence à me tordre l’estomac.
Le New York Times semble
avoir été à court d’actualités dimanche, et s’est contenté d’écrire que les
candidats républicains se montrent trop pessimistes quant à l’état de la
nation, même si ce n’est que dans l’espoir d’être élus. Comme si le Times
voulait qu’ils soient élus. Je ne pourrais jamais peindre une image
suffisamment sombre pour décrire la décadence et la dépravation de notre vie
politique actuelle. C’est après tout là que se trouve l’attrait de Trump –
bien qu’une prise de vue panoramique de ses partisans lors d’une de ses
love-parades de stade suggère que leur comportement fasse partie intégrante
du problème : des foules de clowns sur-nourris et tatoués prônant un
retour en 1956. Je leur souhaite bien du courage.
J’ai fait référence plus
d’une fois à une période plus ancienne de l’Histoire des Etats-Unis, les
années 1850, qui ont vu secoué le compas politique et mourir les partis en
place. Les Whigs ont disparu (et vite !), et les Démocrates sont devenus
un parti de propriétaires d’esclaves sudistes. Les deux partis de notre
époque sont aujourd’hui en passe de pénétrer dans la cage de contention du
Temple Grandin. Mais l’Histoire ne se répète pas, elle ne fait que rimer. Et
cette fois, il n’y aura pas d’autre parti politique impatient de prendre leur
place, plus aucune institution crédible, et certainement plus aucun homme
comme Lincoln. Nous n’aurons plus que Bernie Sanders et l’exécrable Trump.
Sanders joue gentiment
le rôle de faire-valoir pour notre reptile volant. Mais l’auto-proclamé scoliaste
a un gros problème. Le public souffre peut-être, il n’est certainement pas
prêt pour une redistribution accrue du capital national – ou ce qu’il en
reste entre les mains de l’ancienne classe moyenne. L’absence de toute autre
figure réputée sur le banc des démocrates laisse transparaître un parti
aujourd’hui plus creux qu’un œuf de Pâques de supermarché.
Ce que nous voyons
apparaître est une tempête politique aussi parfaite que le typhon qui s’est
formé au-dessus du système bancaire. Cette tempête commencera par laisser le
public stupéfait par ses pertes. Il n’est pas impossible que les élections de
2016 se trouvent annulées. Imaginez par exemple ce que le Pentagone pense de
Trump. Et ce avec quoi il prévoit de l’accueillir.