Mes chères contrariées, mes chers contrariens !
Je ne sais pas pour vous mais pour moi, tous les ans, c’est une
angoisse totale. Mes mains deviennent moites, mes douleurs au ventre
s’amplifient… et celles de mon dos deviennent insupportables. Je
tremble, je frémis, et… impossible de mettre les pieds dans un
magasin pour acheter les cadeaux de Noël…
Demandez à ma femme, c’est elle qui tous les ans doit se
sacrifier pour les achats vu l’incapacité chronique de son mari
à le faire. Déjà, je déteste à peu
près autant mettre les pieds dans les magasins à l’heure
de pointe que d’aller chez le dentiste, c’est vous dire…
Mais cette année, grâce à notre AFP nationale,
j’ai enfin appris que je n’étais pas le seul dans ce cas.
Nous serions même 36 % à souffrir du syndrome
« post-traumatique » de Noël.
Bon, voici les morceaux choisis sur cette dépêche qui en
dit en fait beaucoup sur l’état de notre société
et sur ce que nous sommes devenus… uniquement des consommateurs. Nous n’existons
plus, ou l’on nous fait croire que nous n’existons plus en dehors
de l’acte d’achat et de consommation.
La
sobriété est la liberté
« Six Français sur dix se déclarent
stressés à l'idée de ne pas trouver les cadeaux qui
feront plaisir à leurs proches et 36 % développent des
angoisses autour de la question financière ». Vous
remarquerez tout de même ce pourcentage qui est énorme. Si nous
faisons un raccourci, 36 % de gens angoissés notamment par les
questions financières, et vous avez une bonne approximation du nombre
de nos concitoyens en situation délicate.
« Dès novembre, c'est le début d'une lente
montée en pression, alimentée par une surenchère commerciale
autour de l'événement », note le sociologue
Jean-Claude Kaufmann.
Ça c’est vrai, chaque année, je trouve que les
fêtes de Noël, enfin les célébrations dans les
nouveaux temples œcuméniques que sont les Hypermarchés,
commencent de plus en plus tôt.
« Pour pallier la cohue dans les magasins, qui stresse 35 %
des Français, certains cherchent à anticiper, mais cela ne fait
qu'alimenter davantage la tension », explique Mike Hadjaj, directeur marketing chez Generix.
C’est une évidence mon cher Watson…
Demandez-le-moi… ou à ma femme, elle vous l’aurait tout de
suite confirmé. Avant, je ne stressais que les quinze derniers jours,
et encore en me forçant à ne pas regarder le calendrier (de
l’avent) je réussissais à faire abstraction. Maintenant,
je dois subir l’angoisse nationale et la pression sociale dès le
début novembre… La question la pire étant :
« Et tu as prévu quoi comme cadeau pour
Noël ? »
Le pire, c’est le cadeau pour ma femme… J’adore ma
femme, mais c’est compliqué de trouver une bonne idée
tous les ans, surtout qu’en plus il y a aussi le cadeau
d’anniversaire, ce qui fait deux idées à trouver chaque
année. Un véritable calvaire.
Côté adultes, il y a un « surinvestissement
autour de Noël, qui est l'un des derniers rites collectifs, et qui
à ce titre se doit d'être réussi », souligne
le sociologue Jean-Claude Kaufmann.
« À Noël, il y a comme un sentiment
d'obligation de bonheur intense. On s'attend à quelque chose de
forcément énorme et merveilleux, il faut être à la
hauteur des attentes, et c'est forcément stressant »,
explique-t-il.
Eh oui, le marketing nous lobotomise avec le concept de
« réussite ». Ceux qui ont poussé cette
logique jusqu’à la rendre visible dans leur slogan est la
chaîne de magasin pour enfant Aubert, qui clame :
« Aubert réussir son bébé ».
Dès lors, on doit admettre que la réussite ne passe que par
l’acte de consommation et donc l’argent, au lieu de passer par la
transmission de valeurs, notamment lorsque l’on parle
d’enfants… Mais j’arrête tout de suite avec cette
idée de transmission de valeurs avant d’être assailli de
termes comme « ringard », « vieux
réactionnaire » ou bien pire encore.
Dès lors, il ne faut pas s’étonner que
« certains se retrouvent prisonniers de logiques contradictoires,
voulant faire plaisir à leurs enfants, qui réclament des jeux
toujours plus beaux (et plus chers), tout en évitant de se mettre dans
le rouge », note M. Kaufmann. « Cela peut être
très douloureux pour certaines familles », renchérit
M. Posternak.
Vous comprendrez dès lors pourquoi je revendique qu’une
certaine forme de sobriété, qu’il ne faut pas non plus
confondre avec de l’ascétisme, permet de se libérer de la
pression sociale et sociétale visant à ne faire de nous que de
simples chiffres d’affaires sur pattes.
La vraie
information est bien sur l’Union bancaire
Mais trêve de balivernes, soyons sérieux. Parlons des vrais
sujets.
Cette nuit, l’Europe a fait un grand pas. Un pas de géant
pour résoudre la totalité de la crise économique que
nous traversons depuis 5 ans. Oui mes chers « zamis »,
en vérité je vous le dis, nous sommes désormais
sauvés jusqu’à la fin de temps… (Pour ceux qui
n’auraient pas compris, c’est évidemment du second
degré.)
Michel Barnier, qui est un homme moderne, (comme le Pape, qui selon
certaines mauvaises langues, est devenu un i-Pape) a tweeté
« Accord historique superviseur ! »
Nos grands mamamouchis se sont donc mis d’accord… après
14 heures de discussions entre ministres des Finances européens. 14
heures de négociations. Ils tiennent la forme quand même nos
grands chefs.
Et Michel Barnier : « Ce qui est décidé dans
cette approche commune, c'est un début de supervision
intégrée le 1er mars 2014. »
Là, déjà, cela limite quelque peu la
portée du sauvetage « histoooorique »
du monde. Le terme important, vous l’aurez compris, étant
« début ». L’Europe adore les
« processus »… qui durent !
D’ailleurs, notre Barnier national (eh oui, c’est
quelqu’un de chez nous Barnier) s’est cru obligé de préciser
que la supervision des banques « sera opérationnelle à
cette date-là, avec une certaine flexibilité ».
« Être opérationnelle avec une certaine flexibilité »
ne m’apparaît pas comme un concept limpide. Mais j’ai sans
doute l’esprit chagrin en cette fin de semaine. Pour moi, la traduction
serait sans doute une certaine « inefficacité »…
Mais comme dirait ma femme : « Ne fais pas de procès
de mauvaise intention. Tu verras, cette fois cela va peut-être
marcher. »
Autre excellente nouvelle qui vous ravira mes chers lecteurs, selon le
ministre français Pierre Moscovici la recapitalisation directe d'une
banque en difficulté par les fonds de sauvetage européens
pourra intervenir sans attendre cette échéance, « aussitôt
que nous le déciderons ».
Un champ
d'application restreint !
Seules les banques dont le bilan dépasse 30 milliards d'euros
d'actifs seront sous la surveillance directe de la BCE.
Les caisses d'épargne et les banques régionales restent
ainsi à l'écart, comme le souhaitait Berlin. Pour Pierre
Moscovici : « Cela a été laborieux,
compliqué, mais nous avons trouvé un équilibre. » Le
chiffre évoqué serait de 150 à 200 banques
supervisées directement par la BCE.
Bref, un champ d’application restreint aux seules grandes
banques uniquement de la zone euro alors que l’on sait très bien
que l’interconnexion des institutions financières sur le
continent européen rend toute supervision bancaire partielle quasi
inutile.
Ensuite, en terme même d’idée, croire que la
supervision bancaire par la BCE d’institutions déjà hors
de contrôle depuis bien longtemps peut régler le
problème, c’est faire preuve d’une grande
naïveté.
Enfin, cette supervision bancaire aussi efficace qu’elle
pourrait être ne le sera hélas pas, pour la simple et bonne
raison que les « gens » qui contrôleront
resteront les mêmes et que ce n’est pas en changeant le nom
d’une institution que l’on en change le fonctionnement. Certes la
BCE aura le « contrôle » mais au quotidien ce
contrôle sera effectué par les autorités de tutelle
nationales actuelles.
Au cas où il vous resterait un espoir sur cette excellente et
extraordinaire nouvelle, alors je vais définitivement doucher vos
derniers espoirs. Ce n’est pas en créant une supervision
quelconque que l’on fera disparaître nos stocks de dettes
d’états, les pertes des banques, les bilans pourris et les
déficits nationaux…
Tout cela n’est qu’une illusion de plus dans ce monde
d’Ubu, mais que voulez-vous c’est bientôt Noël, et
aussi angoissants que soient les achats de fin d’année, les gens
et les « zinvestisseurs »
veulent croire au Père Noël.
Alors le grand cirque peut continuer. Jusqu’à
quand ? Mystère.
Bon, je vous laisse, il faut que j’aille commencer mes
courses…
Charles SANNAT
Directeur
des Études Économiques Aucoffre.com
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