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Cours Or & Argent

Nous sommes de bonnes personnes, non, vraiment !

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Publié le 17 juillet 2017
1182 mots - Temps de lecture : 2 - 4 minutes
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Rubrique : Editoriaux

Le déshonneur de celle qui se prétend être la classe intellectuelle des Etats-Unis est désormais total, et force la sphère politique plus proche encore du dysfonctionnement et de l’effondrement. Ce sont là les gens auxquels Nassim Taleb fait référence par les termes « intellectuels pourtant idiots ». De lourdes questions sont soulevées par cette dynamique : comment la classe intellectuelle des Etats-Unis a-t-elle pu sombrer dans un tel bourbier de désinvolture ? Et quelles sont ses motivations ?

Pour parvenir à comprendre la situation, nous pouvons nous tourner vers l’essai très sobre de Neal Devers, intitulé The Overton Bubble, et publié il y a deux ans sur TheFuturePrimaeval.net — un ami m’a envoyé le lien il y a quelques jours (je ne sais pas comment j’ai pu passer à côté tout ce temps). Le titre fait référence à la fenêtre d’Overton, définie ainsi par Wikipédia :

La fenêtre d’Overton, aussi connue sous le nom de fenêtre de discours, est la gamme d’idées que le public acceptera… Le terme est dérivé du nom de son auteur, Joseph P. Overton (1960-2003), ancien vice-président du Mackinac Center for Public Policy….

Devers peaufine cette définition :

La fenêtre d’Overton est un concept de sociologie politique qui fait référence à l’ensemble d’opinions acceptables qui peuvent être formulées par une personne respectable. « Respectable » signifie ici que le sujet peut s’intégrer dans la bonne société. La respectabilité est une condition préalable à la capacité d’influencer le grand public.

Voilà qui soulève une autre question : qui exactement appartient à ce cercle de « personnes respectables » qui établissent les paramètres de la pensée acceptable ? Premièrement, les médias conventionnels – le New York Times, le WashPo, CNN, etc. — ainsi que les fonctionnaires bureaucrates du gouvernement permanent, j’ai nommé le Deep State, qui établissent et font respecter les lois, ainsi que les universités qui éduquent les gens respectables (la classe intellectuelle) et leur inculquent les dogmes et les normes de leur temps, mais aussi les groupes de réflexion qui rémunèrent les « experts » pour vendre leurs idées.

La fenêtre d’Overton peut être perçue comme un mécanisme de contrôle politique, qui diabolise tous ceux qui s’éloignent du consensus de la pensée respectable, notamment s’ils expriment leurs hérésies en public. Une telle attitude a des conséquences.

Devers explique la situation ainsi :

Le problème de la fenêtre d’Overton en tant que mécanisme de contrôle politique, et de la politisation de la parole et de la pensée en général, est qu’il génère des dommages collatéraux significatifs pour la capacité de notre société à réfléchir clairement. Si certaines idées peuvent paraître impensables ou innommables, et que la vérité semble tomber en-dehors des limites du consensus poli, l’élite au pouvoir se retrouve dans une situation qu’elle ne peut tout simplement pas maîtriser. Une élite politique malavisée est une élite qui est incapable de réfléchir clairement quant à sa situation stratégique, d’agir de concert, ou de suivre ses plans… Une élite politique fragilisée est une élite qui ne dispose pas de mécanismes de contrôle politique suffisants pour policer la parole et la pensée, ou qui fait face à des ennemis si puissants qu’il lui est nécessaire d’employer des mécanismes toujours plus vigoureux pour contrôler la parole et la pensée. Nous pouvons comparer cela à une « loi martiale intellectuelle », sa structure étant similaire à l’équivalent en matière de sécurité physique.

Nous vivons aujourd’hui sous une telle « loi martiale intellectuelle ». La dégradation conséquente de la pensée signifie que la sphère politique ne parvient pas à établir un consensus cohérent quant à ce qui lui arrive aujourd’hui (ou à établir un plan d’action pour y faire face). C’est exactement là que a fenêtre d’Overton se transforme en bulle d’Overton, telle que l’a décrite Devers. Cette bulle est comprise d’idées qui sont estimées être évidentes (bien qu’elles ne le soient pas) et de notions potentiellement destructrices pour la société, voire même suicidaires. Voici une liste partielle des dogmes qui composent aujourd’hui la bulle d’Overton :

  • La Russie a piraté les élections de 2016 (aucune preuve requise).
  • La Russie (et Vladimir Poutine en particulier) est déterminée à détruire la Russie.
  • Tous les immigrants, légaux comme illégaux, sont égaux devant la loi.
  • Les frontières nationales sont cruelles, peu pratiques et obsolètes.
  • La civilisation occidentale est l’une des forces les plus machiavéliques de l’Histoire.
  • L’Islam est la religion de la paix, et ce peu importe combien de massacres d’infidèles sont perpétrés en son nom.
  • Les hommes sont une force négative de la société.
  • Et particulièrement les hommes blancs.
  • Points supplémentaires pour tout comportement tombant dans la rubrique LGBTQ.
  • Toute discussion concernant les problèmes et conflits raciaux est nécessairement raciste.
  • Le hijab est un outil de la libération des femmes.
  • Il devrait exister une loi contre l’utilisation du mauvais pronom pour désigner ceux qui ne se considèrent ni homme ni femme (le Parlement canadien vient d’approuver une telle règlementation).
  • Une culture commune n’est pas nécessaire pour la vie nationale (tout peut arriver).
  • Coloniser Mars est une excellente solution aux problèmes que nous avons sur Terre.

Cette liste définit les préoccupations générales de la classe intellectuelle d’aujourd’hui – à l’exclusion d’autres problèmes. Voici une liste alternative de problèmes desquels elle ne se soucie pas :

  • Les problèmes énergétiques au cœur de notre malaise économique.
  • Le racket de la dette qui gouverne notre société en l’absence d’apports énergétiques abordables.
  • Les interventions et les manipulations dangereuses sur les marchés par les représentants non-élus de la Réserve fédérale.
  • Le dysfonctionnement extraordinaire des marchés financiers.
  • La fragilité d’un système bancaire basé sur la fraude comptable.
  • Le dysfonctionnement et la fragilité de l’arrangement suburbain aux Etats-Unis.
  • Les conséquences d’un effondrement catastrophique de l’économie lié à tout ce qui précède.
  • La destruction de l’écologie, qui menace la continuation de la race humaine, et potentiellement de la vie sur Terre.

Venons-en maintenant à la question du mobile. Pourquoi la classe intellectuelle américaine embrasse-t-elle des idées qui ne sont pas nécessairement vraies, et encore moins évidentes, voire même autodestructrices ? Parce que cette classe est dangereusement précaire, et a un besoin pervers d’avoir constamment raison quant à ses dogmes et à ses normes. C’est là la raison pour laquelle le comportement qui émane de la classe intellectuelle revient à une revendication de vertu – nous sommes de bonnes personnes et défendons ce qui est juste, non, vraiment ! Bien évidemment, la revendication de vertu n’est qu’une autre version d’une attitude moralisatrice. Et il ne faut pas oublier le carriérisme. Tant d’individus vivent du trafic et du soutien des politiques sur lesquels sont basés ces dogmes qu’ils n’osent pas s’éloigner de la bulle d’Overton de la pensée permissible, sans quoi ils risqueraient de sacrifier leur statut et leurs revenus.

La classe intellectuelle est aussi aux commandes des institutions américaines. Quand elle se retrouve dans l’incapacité de penser clairement, nous faisons face à une dégradation de l’autorité, qui nous mène ensuite à une dégradation de la légitimité. C’est exactement là que nous en sommes aujourd’hui en matière de politique nationale – de notre capacité à gérer la politique.

Lisez l’excellent article de Neal Devers, The Overton Bubble.

 

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James Howard Kunstler est un journaliste qui a travaillé pour de nombreux journaux, dont Rolling Stones Magazine. Dans son dernier livre, The Long Emergency, il décrit les changements auxquels la société américaine devra faire face au cours du 21° siècle. Il envisage un futur prochain fait de crises sociales à répétition, la fin de la Surburbia et du modèle économique associé et une guerre mondiale pour les ressources en énergie. Il prédit la déconstruction des empires européens et américains et pense que, lorsque les convulsions seront terminées, le monde reviendra à un modèle décentralisé et local.
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Plus vrai que vrai, bravo James.
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LOUIS L. - 17/07/2017 à 16:17 GMT
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