39
décès dus à une épidémie d’E. Coli
née dans une exploitation bio. Faut-il pour autant interdire
l’agriculture bio au nom du principe de précaution ? Bien
sûr que non ! Mais tirerons-nous pour autant les vraies
leçons du désastre ?
Le verdict est
donc désormais confirmé: l’épidémie
d’E. Coli est bien partie d’une petite exploitation agricole du
Nord de l’Allemagne,
spécialisée dans la production de graines germées
estampillées « bio ». Pour une industrie qui
base l’essentiel de son marketing sur l’aspect « sain » de sa production
face aux dangers, réels ou fantasmés, de l’agriculture
intensive et des OGM, le verdict est sévère.
Si une telle
mésaventure était arrivée suite à
l’ingestion de céréales génétiquement
modifiées, nul doute que les figures de proue
de l’écologisme et de l’altermondialisme
seraient montées au créneau pour dénoncer les
« inévitables dérives » d’une
agriculture
« entièrement tournée vers le
profit » et qui
« prend le consommateur en otage ». À la
place, il règne un silence gêné.
Eliminer tout risque ? Impossible !
Un silence bien
compréhensible. Car ceux qui se taisent aujourd’hui
étaient hier les chantres du
« principe de précaution ». Principe au
nom duquel, ils prétendaient justifier un moratoire sur
l’utilisation des OGM. Ce moratoire n’aurait pu être
levé qu’à condition que les producteurs de ces plantes
d’un nouveau genre soient parvenus à démontrer la totale
innocuité de leurs inventions. Un défi impossible à
relever.
Aujourd’hui,
les dangers supposés mais jamais démontrés des OGM pour
la santé s’effacent devant les 39 morts, bien réels,
causés par l’agriculture bio. Le milieu chaud et humide dans
lequel germent les graines de soja, de luzerne ou de blé, est
particulièrement propice à la croissance des bactéries.
L’accident allemand est la preuve qu’un peu de bon sens et de
bactéricides s’imposent.
Faut-il pour
autant rendre aux porte-étendards de l’agriculture bio la
monnaie de leur pièce et en appeler à l’instauration
d’un moratoire sur l’agriculture bio? Ce serait absurde et dangereux.
Décider, c’est prendre des risques
Ces morts, si
tristes soient-elles, nous rappellent un grand principe qui gouverne
l’action humaine. Une vérité que le principe de
précaution tente de masquer : l’activité productrice,
comme la vie, est le résultat d’un ensemble de décisions.
Or, chaque décision implique une prise de risque : utiliser ou non un
fongicide sur les cultures de céréales, par exemple. En clair :
en agriculture bio comme ailleurs, le risque zéro n’existe pas.
L’agriculture bio comporte des risques, nombreux
et bien documentés. Personne ne
tente cependant de la faire interdire, et c’est tant mieux.
Le consommateur
fait lui-même son choix. D’un côté, les consommateurs
peuvent s’organiser en associations pour tester la qualité des
produits qu’ils achètent et faire connaître les
résultats de ces tests. De l’autre, les producteurs innovent
afin d’améliorer les caractéristiques de leurs produits
pour répondre aux demandes des consommateurs. Après tout,
n’est-ce pas la meilleure manière d’augmenter leurs
ventes, et, partant, leurs profits ?
Il est grand
temps de jeter aux orties le principe de précaution et de revenir au
principe de réalité. Tout choix comporte un risque, et
s’il est logique de vouloir réduire au maximum les risques, il
est illusoire et dangereux de vouloir les supprimer. Illusoire, parce que le
hasard ne se contrôle pas. Dangereux, parce que cela crée un
faux sentiment de sécurité. La vraie solution est de faire
confiance au libre choix du consommateur.
Frédéric Wauters
|