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Quand les machoires se referment …

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Publié le 11 mars 2011
1412 mots - Temps de lecture : 3 - 5 minutes
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Rubrique : Editoriaux

 

 

 

 

« Un moment fondateur » dans la construction de la zone euro, c’est ainsi que Christine Lagarde, ministre française de l’économie et des finances, a qualifié la réunion de ce jour des chefs d’Etat et de gouvernement des 17. Une manière comme une autre de présenter l’état des discussions en cours et l’absence de tout accord. Puisque l’on commence, on ne peut pas terminer, irréfutable !

Car ce qui a finalement prévalu au cours de la préparation du sommet, c’est la conception qu’il fallait être d’accord sur tout, sinon on ne l’était sur rien, or on en est loin. C’est en tout cas ce qui a résulté de la posture prise par la chancelière Angela Merkel, qu’elle a elle-même résumé en expliquant que tout était de l’ordre du donnant-donnant dans ces négociations .

Mais le tableau serait imparfaitement dressé, s’il n’était pas également évoqué la deuxième mâchoire de la tenaille qui est en train de se refermer, sous la forme des dégradations de note des agences de notation qui viennent opportunément d’intervenir. Vigiles des investisseurs, les agences expriment les intérêts des marchés et ont fait savoir à la veille du sommet que le temps était venu de prendre des décisions.

Devenue prisonnière de son groupe parlementaire, dont l’horizon se limite à des échéances électorales régionales incertaines, Angela Merkel a précisé les contreparties qu’elle entend exiger dans le cadre des négociations en cours. Aux Grecs, elle demande des cessions d’actifs de l’Etat (privatisations), aux Irlandais une hausse de l’impôt sur les sociétés, dans les deux cas afin de desserrer les contraintes auquel leur sauvetage est assujetti. Mais elle va nettement plus loin dans le verrouillage de la situation. Afin d’accepter une hausse des engagements potentiels du fonds de stabilité européen, elle demande fermement que les pays ne disposant pas de la note AAA y contribuent en numéraires et non pas en garanties. Ce qui signifie, par exemple, que l’Etat espagnol – qui a les problèmes budgétaires que l’on sait – devrait procéder à de nouvelles restrictions financières afin d’être en mesure d’apporter sa contribution.

Tout est fait pour que la peine soit lourde, dissuasive dans l’esprit de la chancelière, afin que les récalcitrants soient dans l’obligation de rentrer dans le rang et de réduire leur déficit public en allant sur le marché.

Retoquée sur son pacte de stabilité, dont la nouvelle version affadie a été mise au point par Herman van Rompuy et acceptée par elle du bout des lèvres comme « une base de discussion  », Angela Merkel a déplacé le centre des négociations pour le mettre là où elle bénéficie du meilleur rapport de force. Sur le terrain où il y a urgence, celui de la renégociation des termes du dispositif de soutien européen – pour ceux qui en bénéficient – et son aménagement, pour ceux qui pourraient les rejoindre. C’est tout du moins ce qu’il ressort des fuites provenant d’une réunion à huis-clos du comité des affaires européennes du Bundestag, rapportées par le blog Eurointelligence.

Une autre fuite, rapportée par le Financial Times Deutschland, concerne le Portugal, soupçonné d’avoir dissimulé un « gros trou » dans ses finances, qui n’est pas identifiée et aurait été découvert par la BCE et la Commission. On peut penser qu’il s’agit des dettes des entreprises publiques. Chaque pays a sa manière de présenter sa dette sous son meilleur jour, les Espagnols étant maintenant sous le feu des projecteurs en raison de celles de leurs régions.

José Socrates, le premier ministre, a hier appelé les dirigeants européens à « être à la hauteur » en se mettant d’accord sur le dossier du fonds de stabilité, dans l’espoir qu’une détente de la situation sur le marché obligataire en résultera, lui permettant de ne pas demander à en bénéficier. Le retour de flamme risque d’être brutal à la suite de cette révélation qui rappelle l’épisode grec. Fernando Texeira dos Santos, le ministre portugais des finances a immédiatement annoncé de nouvelles restrictions budgétaires touchant la santé, les prestations sociales et les entreprises publiques, afin d’être en meilleure posture pour affronter les discussions de Bruxelles.

De son côté, le premier ministre grec George Papandréou a demandé que « des décisions fortes » soient prises, afin de « calmer les marchés ». Car la situation devient infernale pour tous les pays de la zone des tempêtes. Au chapitre des bricolages inventés pour essayer de contenir la pression des marchés, après l’utilisation de la formule des émissions syndiquées (dont des banques assurent le placement), les Grecs viennent d’innover et de prévoir une émission destinée à la diaspora.

Du côté des agences, la fête bat par contre son plein. Après la dégradation de la Grèce, puis de ses banques, sont intervenues celle de l’Espagne et de certaines de ses régions, dont la Catalogne. Une déclaration de Christine Lagarde à ce propos justifie encore une fois de s’y arrêter. « Noter et dégrader la note d’un pays comme la Grèce, c’est franchement hors de propos quand on sait qu’ils sont sous contrôle actuellement ». Elle a renchéri ainsi : « Les agences de notation ne devraient pas intervenir et noter des pays qui sont sous contrat avec la Commission européenne, le Fonds monétaire international et la Banque centrale européenne », demandant également que les mesures d’encadrement des agences de notation soient réétudiées afin d’aller plus loin que les mesures déjà décidées par la Commission en 2010.

Olli Rehn, commissaire en charge des affaires économiques, et Michel Barnier, commissaire des services financiers, ont pour leur part réagi en annonçant de nouvelles mesures « avant la fin de l’été », avec ce commentaire dans leur déclaration commune : « Il est clair que des objectifs des réformes seront de mettre de la diversité dans ce secteur très concentré, de réduire la trop grande confiance accordée aux notes, d’améliorer la notation de la dette souveraine, de régler les conflits d’intérêt. »

En d’autres termes, les dirigeants européens ne sont pas content de ces pressions abusives des agences, qui contribuent à restreindre leurs marges de manœuvre au sein du lent processus d’élaboration de leurs compromis politiques. N’acceptant que les signaux des marchés qui leur conviennent et pas ceux qui les bousculent. Mais quelle faiblesse dans leur réaction ! Christine Lagarde aurait en effet pu croiser le fer plus efficacement en faisant remarquer que ce qui était vrai pour la notation des agences – quel risque présentent les pays sous le parapluie européen ? – l’était tout autant pour les taux exorbitants exigés sur le marché obligataire, qui n’ont pas davantage de justification financière intrinsèque…

Si les dirigeants sont pris en tenaille, que dire des salariés, des chômeurs et des retraités ? Depuis Bruxelles, la Confédération européenne des syndicats (CES), vient de publier une déclaration selon laquelle elle considère « profondément injuste que les travailleurs paient pour les folies des marchés financiers », expliquant que c’est « tout le concept de l’Europe sociale qui est menacé » par le projet de pacte de compétitivité.

Après avoir mis tant de temps à prendre en compte la situation des travailleurs émigrés, qu’ils préféraient à l’époque ignorer, les syndicats seraient fondés à s’intéresser non seulement au sort des « travailleurs », syndiqués ou non, mais également à tous ceux qui trouvent dans les petits boulots au noir les moyens de leur survie. A mesurer l’ampleur de ce que l’on appelle l’économie informelle, un phénomène que l’on croyait réservé aux pays émergents et dont on commence à comprendre qu’il se propage et se développe dans les pays les plus atteints par la crise : en Grèce, en Espagne, au Portugal, ainsi que traditionnellement en Italie… comme dans les quartiers déshérités des grandes villes des pays du Nord de l’Europe !

Faute de se mettre d’accord, les dirigeants européens vont une fois de plus afficher des principes généraux. Repoussant au sommet de l’Union européenne des 24 et 25 mars l’annonce d’un nouveau dispositif. Enfermés dans leurs contradictions, ils continuent de créer de nouveaux problèmes en prétendant résoudre les précédents qu’ils ont eux-mêmes crées. Quand les mâchoires se referment, la corde se tend…



 

 Billet rédigé par François Leclerc

 

Paul Jorion

 

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.   

 

 

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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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