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Au
fur et à mesure que l’étau se resserre sur le
gouvernement grec, avec l’assentiment de François Hollande, les
dirigeants espagnols redoublent leurs efforts pour ne pas avoir à
connaître le même sort et retardent le moment où ils vont
devoir faire leur demande. Le rapport sur la Grèce de la Troïka
est de son côté reporté à début octobre, le
plus tard possible, afin d’en faire autant des décisions la
concernant. Après Antonis Samaras, Mariano Rajoy va entamer un ballet de séduction
auprès des dirigeants européens afin d’obtenir une remise
de peine, tandis qu’Olli Rehn,
commis à la toujours désastreuse communication de Bruxelles,
évoque la possibilité que l’Espagne puisse éviter
d’entrer dans la logique infernale d’un plan de sauvetage,
fondant ses espoirs dans un événement qui doit intervenir
entretemps.
Mais
que peut-il donc se passer en septembre, dont l’annonce est à ce
point attendue et qui doit changer si radicalement la donne ? S’il
s’agit de l’intervention de la BCE, tout ce monde risque de
déchanter. Que celle-ci calme durablement le marché, le
coup n’est pas gagné !
Se
démarquant de ses petits camarades de la Bundesbank, le gouverneur
Jörg Asmussen (sans entrer dans des
détails qui sont l’enjeu des discussions en cours) réfute
l’idée que cette intervention reviendrait à une
création monétaire destinée au financement des Etats. On
attend avec intérêt et curiosité sa démonstration,
après avoir apprécié la créativité dont
avait fait preuve Jean-Claude Trichet lorsqu’il avait justifié
les achats obligataires de la BCE sur le marché par les obstacles mis
à la « transmission de la politique monétaire ». Il
faudrait faire mieux.
Mais,
trêve d’ironie, il se confirme qu’il va falloir donner de
sérieux gages pour emporter l’affaire, même a minima, et
que les contreparties dans le domaine de la rigueur budgétaire ne vont
pas manquer. Cela augure de quelques difficultés pour François
Hollande et le gouvernement français, malgré leur tentative
très en amont de contrôle du groupe parlementaire socialiste et
leur report le plus loin possible du vote du traité de rigueur
budgétaire à l’Assemblée.
Ils
y parviendront normalement, si l’on peut dire, mais, à
enregistrer l’évolution négative brutale de la côte
du président dans les enquêtes de satisfaction, les
conséquences dans l’opinion vont être une autre affaire.
Le chômage monte, la croissance baisse, le déficit en subit les
effets. Le vocabulaire du premier ministre devient guerrier mais tombe
à plat. Ah, si les postures étaient un recours et la
communication une politique !
Wolfgang
Schäuble et Pierre Moscovici, les ministres allemand et français, viennent
d’annoncer la création d’un groupe de travail, en
application d’une décision prise par Angela Merkel
et François Hollande lors de leur dernière rencontre. Celui-ci
va non seulement se pencher sur les décisions à prendre
concernant la Grèce et l’Espagne, le tout-venant si l’on
peut dire, mais également aborder les questions plus structurelles de
l’union bancaire et de l’intégration européenne, le
grand sujet. Après l’invitation sans suite et sans effets des
ministres des finances aux conseils des ministres du partenaire, voilà
une nouvelle tentative de relancer le moteur franco-allemand, car
aucun des deux partenaires ne peut jouer la course en solitaire, tous les politologues
vous le diront.
«
Nous voulons rapprocher nos points de vue, qui ne sont d’ailleurs pas
éloignés… », a fait valoir Pierre Moscovici, sans
plus de précision sur la durée des travaux qui vont être
entrepris ni sur ce qu’il en est précisément attendu, une
fois réaffirmée la volonté commune d’assurer la
pérennité de l’euro, des fois qu’il serait question
d’en douter. Quelle va être la nature de cette nouvelle structure
? Une énième opération de communication destinée
à montrer contre toute évidence qu’il y a un pilote dans
l’avion ? Une cellule de crise permanent
creuset des compromis qui peinent à être passés ? Un
laboratoire d’idées pour des équipes en mal de
renouvellement de leur stratégie ? Sans doute un peu de tout cela, ce
qui résume bien le vide actuel.
Deuxième
grande nouvelle ! Pressé de donner sa vision de l’Europe
pour défendre désormais l’adoption d’un
traité budgétaire auparavant très critiqué,
François Hollande a choisi la conférence des ambassadeurs pour
la donner. Côté forme, il entend renforcer le rôle de
l’eurogroupe et obtenir la tenue de sommets
plus fréquents. Tout est sans doute dans la méthode.
Côté contenu, l’objectif respecte les lois du genre : la
réalisation d’une « intégration solidaire »,
qui vise à parvenir, mais « à terme », à
« une mutualisation des dettes afin de résorber dans les
meilleures conditions pour chacun les stocks de dette existant ». Les
étapes intermédiaires et le calendrier n’ont pas
été mentionnés et seront, nul n’en doute,
communiqués plus tard.
Billet
rédigé par François Leclerc
Son livre,
Les CHRONIQUES DE LA GRANDE PERDITION vient de
paraître
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