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Dans cette crise dont les
développements ne cessent de surprendre les observateurs, rien ne
semble se passer comme les uns et les autres l'avaient prévu. Ainsi
par exemple, l'équipe Obama estimait que sans "stimulus", le
chômage atteindrait 9.2%, mais qu'il ne dépasserait pas 8% avec:
nous en sommes à 10.2%, et encore cela ne compte t'il pas
l'énorme réservoir de travailleurs en temps partiel subi, et
l'accroissement du nombre de personnes considérées comme
"sorties" de la force de travail.
source
Et ce n'est qu'un
indicateur parmi d'autres. Bien peu avaient prévu que les
"injections" de monnaie de la FED n'iraient pas provoquer un rebond
des prix dans l'économie réelle mais une bulle totalement
décorrélée de l'économie réelle sur les
marchés d'actions. Quant à ce qui va se passer demain...
Impossible de
trouver un consensus sur ce que sera l'avenir. Entre ceux qui "voient la
reprise", et ceux qui pensent que nous n'avons vécu que le
premier acte de la fin du monde, une gamme complète de scénarii
se fait jour, inflationnistes, déflationnistes, à la japonaise,
à la façon de 1929, avec ou sans effondrement du dollar, ou de
l'Euro, et que sais-je encore.
Le propos de ce qui suit n'est pas
d'expliquer ce qui va se passer (si je le savais, je serais riche), mais
d'examiner les scénarios les plus négatifs et positifs
possibles, et surtout, d'imaginer quelles sont les décisions
politiques qui pourraient les favoriser ou les empêcher. Gardez en
outre à l'esprit que nous autres, libéraux, avons une
fâcheuse tendance à sous estimer le temps que notre
système politico-financier vermoulu peut tenir, de
rafistolage en "Quantitative Easing". Nous nous doutons bien que la
trajectoire actuelle nous mène dans un mur, mais avons tendance
à le voir plus proche qu'il ne l'est réellement. A moins que
cette fois ci, nos lunettes ne soient correctement calibrées ?
Point de départ
des trois scénarios: poursuite de la crise bancaire
Le fait est que les banques américaines
ne sont pas sorties de la crise et n'en sortiront pas de sitôt. On
attend une nouvelle vague de lourdes pertes liées aux
"resets" contractuels des prêts prime à taux variable,
Alt-A, ARM... Sans oublier des difficultés croissantes du
côté des opérations de firmes de Private Equity
financées par la dette (LBO), et des craintes lourdes du
côté de l'immobilier commercial. Et, cerise sur le gâteau,
le scandale MERS, qui
pourrait gravement compliquer l'exécution des faillites bancaires.
Pour s'en tenir à l'immobilier résidentiel, environ 60% des
maisons américaines étaient assorties d'une hypothèque,
le crédit ayant soit servi à payer la maison, soit servi
à consommer divers biens et services en apportant la maison comme
garantie. Sachant que 8 de ces hypothèques sur 10 ont
été originées ou rechargées pendant la bulle, on
peut considérer que si les prix immobiliers reviennent à leur
niveau d'avant bulle, voire, comme cela est probable, font un passage en
dessous, alors une bonne moitié des maisons américaines seront
assorties d'une hypothèque restant due supérieure à la
valeur de la maison... Pas rassurant, quand on sait que les ménages
"underwater" sont fortement incités, dans un tel contexte,
à se mettre en défaut. Naturellement, tous les prêts
"underwater" ne finiront pas en forclusion. Mais il n'y a aucune
raison de penser que le pourcentage de ménages en retard ou en
cessation de paiement de crédit se retourne prochainement.
Face aux premières difficultés, la réaction des pouvoirs
publics a été assez consternante: alors que la crise a
été provoquée par un excès de crédit, la
maison blanche a relancé
fiscalement l'achat de maisons et de voitures... par le
crédit, évidemment, et la FED a baissé ses taux
directeurs à zéro. Accessoirement, l'état a fait voter
des dispositions encourageant les emprunteurs qui peuvent "difficilement
payer" à se mettre en défaut. Et surtout, l'état a
"sauvé" nombre de grosses institutions privées en
transmettant leurs dettes aux contribuables: de cette façon, il
empêche durablement le dégonflement rapide de la bulle de
crédit à l'origine de la crise.
Résultat: tout cet argent artificiellement injecté dans les
banques n'aura pas servi à financer le crédit non
subventionné, toujours atone. Par contre, à ce prix là,
les banques ont pu se lancer dans des opérations de "carry
trade" en empruntant à zéro et en spéculant sur des
titres ou en achetant des bons du trésor à 3% et plus. Alors
que l'économie réelle souffre, les grands établissements
qui achètent de la dette publique US réalisent des marges
miraculeuses sans effort, traduites par des rallyes boursiers
spectaculaires... Mais ces valorisations ne correspondent à aucune
création de valeur réelle: attention à la chute.
Résultat, deux bulles, l'une
obligataire, l'autre sur les actions, se sont formées. Tout le monde
se demande pourquoi la multiplication par trois de la base monétaire
des USA par la FED n'a pas provoqué d'inflation: c'est parce
l'inflation monétaire a eu pour symptôme, cette fois ci, un
rallye totalement artificiel et déconnecté de l'économie
réelle sur les marchés d'actions, et a permis aux banques de
prêter de quoi financer les plans TARP et assimilés, dont le
produit n'irrigue encore que très partiellement l'économie
réelle.
En revanche, l'assèchement du crédit privé provoque une
déflation immobilière en chaine: chute des prix des maisons
-> panique des emprunteurs -> moins d'achats -> moins de ventes
-> plus d'entreprises en difficulté -> plans de réduction
des coûts... Tout ceci se traduit par une explosion du chômage.
Scénario
noir: écroulement déflationiste généralisé
puis sortie par l'hyper-inflation
Le premier scénario pourrait s'intituler "la loi de Murphy au
carré", ou le "stellar black swan".
Pour sortir d'une vaste crise de
déflation de l'économie non subventionnée, les
entreprises existantes doivent d'urgence réduire leurs coûts ou
périr. Leurs ressources sont donc consacrées à la
réduction des coûts en priorité.
Pour que les chômeurs ainsi licenciés aient un espoir de
retrouver du travail, il faudrait que d'autres entreprises se créent
avec des offres tellement meilleures que ce qui existe actuellement que
même en période de crise, le public ne puisse y résister,
ou que les entreprises existantes, non contentes de réduire les
coûts sur leurs lignes existantes, continuent d'innover.
Tout ceci demande de l'argent. Or, le crédit est coupé, puisque
les banques anticipent de nouvelles pertes: elles conservent
désespérément le cash que leur injecte la FED et coupent
le robinet du crédit pour réduire à la hache leur total
de bilan. Le récent passage des taux de crédit à la
consommation à 29.99% par CitiGroup en est un
révélateur.
Donc les entreprises qui voudraient investir dans le futur ne pourront pas le
faire à crédit. Pourront elles le faire par augmentation de
captital ? Rien n'est moins sûr, car les besoins d'aspiration de
l'épargne privée par un trésor US qui augmente son
endettement à un rythme jamais connu jusqu'ici provoquent ce que l'on
appelle un "effet d'éviction". Autrement dit, Tout ce que
l'état fédéral aspire pour ses plans de
"sauvetage" et de "relance" est perdu pour le financement
de l'investissement privé.
Par conséquent, tant que le "deleveraging" de
l'économie ne sera pas achevé, le chômage va s'accroitre,
des personnes perdront leurs revenus, leur crédit deviendra trop
lourd...
Ajoutons à cela que la période "d'accomodation
comptable" des banques par la suppression des normes "Mark To
Market" prend fin bientôt.
Il est trop tôt pour dire ce que sera la norme
"réformée", mais il est probable que les banques
devront recommencer à reporter de façon plus consistante
qu'actuellement leurs pertes, réelles ou latentes.
Un scénario noir commencerait par une nouvelle grande faillite
bancaire liée à ces conditions économiques
désastreuses. Citi Group ou Bank of America sont deux bons candidats
au massacre. Quand ? courant 2010 ? Début 2011 ?
Cela provoquerait une nouvelle vague de panique qui ferait tomber les
marchés d'actions à des niveaux peut être encore plus bas
qu'en Mars 2009, massacrant les bilans bancaires et ceux des hedge funds et
des fonds de Private equity. Paradoxalement, cela prolongerait encore un peu
la capacité de l'état américain à creuser son
déficit, le trésor étant alors perçu comme une
valeur "refuge". Mais très vite, les taux auxquels le
trésor américain pourrait emprunter augmenteraient. Car
l'état tenterait désespérément de sauver ce qui
peut l'être par une fuite en avant dans les déficits, alors
même que les recettes fiscales subiraient un nouveau recul massif.
L'arrivée en fin de droits de nombreux chômeurs, une nouvelle
chute des rentrées fiscales obligeant états et cités
à licencier massivement leurs services publics, et l'augmentation
corrolaire du nombre de SDF, pourraient laisser, à terme, 25% de la
population sans revenus.
Naturellement, ces gens créeront leur propre emploi, et accepteront
des boulots en dessous du minimum fédéral simplement pour
pouvoir manger, ou se chauffer l'hiver. Les salariés encore
employés n'auront, quant à eux, aucun pouvoir de
négociation sur leurs salaires qui stagneront ou diminueront.
Cela ne serait pas sans conséquences sur le maintien de l'ordre
public.
L'on pourrait même voir un phénomène étrange: une
fois la déflation du crédit achevée, et
l'économie en miettes, le nombre de dollars remis en circulation par
la FED se révélerait incroyablement supérieur à
l'offre productive sur le marché: nous pourrions donc assister non pas
à une "stagflation", comme dans les années 70, mais
à une récé-flation, comme au Zimbabwe... Les
détenteurs de dette américaine seront bien sûr
spoliés par cette inflation.
On peut même s'interroger si, dans une telle éventualité,
certains états plus vertueux que d'autres ne verraient pas des
revendications sécessionnistes se faire jour. Après tout,
pourquoi le Texas, bien moins mal géré que la Californie ou la
Floride, devrait-il supporté les conséquences d'un désastre
créé par d'autres ?
Les USA renonçant, faute d'argent, à jouer les gendarmes du
monde, celui ci devient plus instable. Un conflit nucléaire majeur
éclate au moyen orient, seul notre complexe de
supériorité occidental et notre prudente tenue à
l'écart feront que ce conflit ne sera pas baptisé "troisième
guerre mondiale". Le terrorisme connaît une nouvelle vague plus
meurtrière que les précédentes.
De là à dire que le
capitalisme cogéré par les élites financières et
la haute fonction publique pourrait connaître une fin aussi dure que le
communisme, je n'y crois pas, même dans mes moments de déprime
les plus intenses. Le peuple américain est resté
remarquablement discipliné lors des années 30. Mais des
épisodes "durs" ne sont pas impensables, avec des
conséquences internationales assez imprévisibles.
Mais rassurons nous, ce scénario de fin du monde n'est pas,
malgré les difficultés observables, absolument certain, ni
même sans doute le plus probable, car la capacité de
réaction des américains a toujours été
exceptionnelle par le passé face à l'adversité.
Simplement, ces scénarios ne sont pas aujourd'hui totalement
impensables, ce qui devrait nous inciter à sérieusement
réfléchir sur la façon de les éviter. Le pompier
est d'autant plus efficace qu'il s'est entraîné contre les
incendies avant qu'ils ne se déclenchent...
Scénario
Rose: des inflexions politiques salvatrices
Ce second scénario repose sur l'espoir d'un éclair de
lucidité de l'administration Obama, lucidité fondée sur
l'écart entre les prévisions économiques et les
résultats observés, et le désir impérieux de tout
politicien de se faire réélire. Il fait suite à une
séance de réflexion basée sur une question simple:
qu'est-ce qui pourrait faire rebondir l'économie américaine ?
La courbe
ininterrompue de la hausse du chômage et l'amoncèlement de
nuages sur les dettes bancaires, et sur la dette publique, fait prendre
conscience à M.Obama que les conseils qu'il a écoutés
jusqu'alors étaient mauvais. De plus, les négociations avec le
congrès pour relever les limites du plafond d'endettement admissible
de l'état prennent un tour inattendu: une majorité bipartisane
exige de l'administration un vrai plan d'austérité
budgétaire pour accepter un tel relèvement, que
l'administration doit accepter pour éviter le défaut de
paiement sur sa dette.
De
surcroît, des barrières juridiques tombent, et des membres du
congrès sont soumis à des enquêtes pour de
supposées malversations durant la bulle des subprimes. Notamment, ceux
qui ont bénéficié de trop de largesses du PDG de
CountryWide, Angelo Mozilo, sont dans l'oeil du cyclone, ainsi que Tim
Geithner, l'ex patron de la FED de New York, englué dans le
scandale AIG, qui est viré peu après les
élections de Mid Term.
Les tea-parties
reprennent de plus belle et lors de ces élections de Mi-mandat, une
dizaine de candidats libertariens, indépendants ou avec l'investiture
du GOP, sont envoyés au sénat, et un nombre plus important
encore à la chambre. D'ailleurs, ces candidats sont le plus souvent
des ex-républicains qui comprennent qu'ils doivent sortir de
l'ornière néo-conservatrice.
Dans ce contexte, une coalition
d'économistes, et d'officiels tels que la patronne du FDIC, Sheila
Bair, réussissent à provoquer un changement doctrinal pour
faire promulguer des textes très forts interdisant
le sauvetage gouvernemental des "too big to fail".
Une réforme importante du chapitre 11 appliquée aux
établissement financiers, qu'ils soient assurés ou non par la
FDIC, est adoptée à la quasi-unanimité des deux
chambres. Promue par des économistes en vue tels que Luigi Zingales,
Nassim taleb ou Janet Tavakoli, elle systématise les apurements de
passifs de bilans bancaires par échanges de dette contre capital, ce
qui pousse les établissements financiers à rechercher
des négociations préalables d'urgence avec
actionnaires et créanciers avant la survenance de problèmes
graves. Entre 2011 et 2015, cette stratégie divise par plus de deux la
montagne des dettes privées américaines. Les faillites
bancaires qui surviennent avant ces réformes sont gérées
suivant ces principes, car le trésor n'a plus les moyens ni la
possibilité législative de lancer des bailouts massifs, et le
système financier tient, cahin caha, mais tient quand même
l'année charnière 2010, après être
passé à un cheveu de la catastrophe.
Résultat: l'amélioration des bilans des entreprises permet
dès 2011 un très fort redémarrage de l'investissement.
La Chine, dont les excédents commerciaux avec les USA se
réduisent, mais restent conséquents, multiplie les messages
d'avertissement aux américains, forçant encore ceux ci à
se montrer budgétairement plus raisonnables, ce qui redonne confiance
aux détenteurs internationaux de capitaux dans le futur de
l'Amérique. Barrak Obama lui même comprend que sa
réélection dépend de sa capacité à mettre
en sourdine ses pulsions socialisantes, et passe un accord budgétaire
bipartisan avec les libertariens du GOP et hors GOP, prévoyant une
réduction rapide et drastique des dépenses et du
déficit, grâce notamment à l'arrêt des aventures
militaires étrangères tous azimuths, et la mise en place de
chèques éducations partiellement financés par des
fondations privées au plan national, qu'il fait avaler à son
popre parti. Une réforme majeure de la "social security"
(premier étage de retraite par répartition) est
également adoptée, mettant à l'abri de la banqueroute
pure et simple le trésor public.
Ce mouvement de maître achèvera de semer un peu plus la division
au sein du GOP et assure à Obama une facile et assez brillante
réélection en 2012, alors que tout le monde le donnait à
la rue après les élections de Mid term 2010. Quelques
années plus tard, dans ses mémoires d'ex président,
premier livre vendu sous différentes formes à plus d'un
milliard d'exemplaires dans le monde, Obama écrira que ce changement
stratégique lui a été inspiré par l'étude
des changements de cap stratégiques de François Mitterrand en
France lors de ses mandats, et par cette célèbre citation de
Keynes: "When the facts change, I change my mind".
Les investisseurs internationaux parient à nouveau sur les USA, non
pas par charité pro-américaine, mais parce que les entreprises
des pays émergents, comme la Chine, le Brésil, et l'Inde,
décident d'investir massivement leurs excédents commerciaux
dans le principal secteur susceptible de faire de leurs entreprises des
"major players" dans le monde de demain, et non de simple copistes
doués des recettes occidentales du passé. Ce secteur
providentiel, c'est la fantastique R&D américaine, qui a tenu bon,
grâce à des universités toujours à la pointe du
progrès technologique, des fondations privées toujours actives
malgré la crise, et des grandes entreprises qui ont soutenu à
bout de bras cet actif vital dans les moments difficiles.
D'ailleurs, des progrès technologiques sidérants sont accomplis
dans la deuxième moitié de la décennie 2010-2020, ce qui
popularise les théories de "l'accélération
perpétuelle du progrès". Notamment, le stockage bon
marché de l'électricité devient une
réalité, occasionnant une véritable révolution
énergétique. Les nano-technologies permettent de remplacer des
métaux rares dans des dizaines d'applications. Des piles à
combustibles à faible coût, des algues fabricant des
pétroles de substitution, et bien d'autres nouveautés,
révolutionnent les secteurs de l'énergie, des transports...
Malgré l'abandon des politiques anti-CO2 sous la pression de
révélations continuelles de fraudes scientifiques et
financières ayant entouré la polémique du changement
climatique, qui rejoint le trou dans la couche d'ozone au panthéon des
grandes peurs millénaristes oubliées, le paysage
énergétique mondial est paré pour un changement radical
à l'aube des années 20.
Mais la santé et le génie agricole ne sont pas en reste, pour
le plus grand profit, là encore, du décollage économique
des pays émergents. Le spectre des grandes pénuries de
ressources constamment agité par les ennemis du progrès sont
à chaque fois repoussés. Une fois de plus, le progrès
technologique aura sauvé l'Amérique et le monde. Seulement, les
USA ne sont plus l'unique puissance dominante mais doivent composer avec
l'émergence des pays "new big and rich", pour le plus grand
bien de l'humanité.
Le Chômage se résorbe, lentement certes à partir de mi
2011, puis à un rythme saisissant à partir de 2014, grâce
à ces progrès. Une réforme discrète mais
essentielle va y contribuer: sous l'impulsion d'économistes de renom,
l'impôt sur les sociétés américaines voit son taux
baissé mais sa base élargie des intérêts versés
aux prêteurs (voir
l'intérêt d'une telle réforme ici) ce
qui fondera la croissance future sur la formation brute de capital et non sur
les montages à base de fortes dettes tellement vulnérables aux
aléas conjoncturels. On s'aperçoit par ailleurs que ce mode de
croissance, plus sain, réduit la volatilité de la plupart des
marchés financiers.
Les leçons de la crise sont en partie tirées, et les nouvelles
régulations monétaires et financières, sans parvenir
à l 'idéal Hayekien ou Rothbardien, rendent plus difficile la
reconstitution de bulles de crédit. Seuls point noirs: D'une part, les
Smart Growth Policies, dont le rôle a été totalement sous
estimé par la plupart des économistes après la crise, ne
sont pas ou peu abrogées, et l'amélioration des conditions de
vie des américains moyens provoquent de nouvelles bulles
immobilières, moins fortes que celle que nous avons vécu, mais
suffisantes pour maintenir dans la difficulté une frange
résiduelle importante de la population américaine.
D'autre part, la monnaie reste une affaire planifiée, malgré
les efforts des libertariens nouvellement élus au congrès pour
abolir la FED. L'accord passé avec Obama ne va pas jusqu'à
achever la FED. Des lois obligeant cette dernière à mieux
appliquer certaines formules prudentielles évitent cependant de
retomber dans les excès de l'économie à taux
zéro. Mais à partir de 2020, de nouvelles bulles se reforment
quand même, donnant au monde la désagréable impression que
"décidément, le capitalisme ne se sortira jamais de ses
crises".
En 2016, après deux mandats, Barrak Obama quitte la maison Blanche
avec un statut de héros de l'Amérique, surpassant Roosevelt et
Reagan en popularité, et se résout à accepter la dure
condition d'ex président qui n'a pu mener à bien son programme,
mais qui a su en changer au bon moment. Ses tarifs de conférence
d'après mandat atteignent des sommets. Obama est le prénom le
plus donné aux USA en 2019.
Ce scénario me parait aussi peu probable que la fin du monde, mais il
a le mérite de rester possible, au point ou nous en sommes: oui, les
USA, et par la même le monde, peuvent encore se sortir du marasme, avec
douleur, certes, mais sans passer par des épisodes aussi noirs que
dans les années 30... Ou la guerre de sécession ! Si un conseiller francophone de M.
Obama passe par ici, mes tarifs de conseiller politique sont disponibles sur
simple demande.
Ma crainte, toutefois, est que même si l'administration Obama changeait
de cap, elle le fasse trop peu et trop tard. Ce qui nous amènera aux
scénarios gris...
Scénario Gris
: une sorte de stagflation japonaise
Ce troisième scénario, c'est vous qui le bâtirez, en
mélangeant les ingrédients des deux premiers. Dire que c'est le
plus probable, dans ces conditions, relèverait de l'escroquerie
intellectuelle: la plage de scénarios "gris" rendus
possibles par cet artifice fait que la réalité se situera avec
un intervalle de confiance de plus de 9 chances sur 10 dans ce ventre mou.
Dans les grandes lignes:
Les USA verront
la bulle de crédit se dégonfler lentement, faute de politique
de désendettement claire de l'état et de la sphère
financière, qui louvoiera entre keynesiannisme idéologique et
rémissions pragmatiques partielles dictées par l'état
des finances et les menaces d'emballement des taux obligataires. Le change
Euro-Dollar sera plus volatile que jamais, sans qu'on y fasse plus
guère attention. Faute de s'attaquer à la bulle de
crédit à la hache, la crise trainera en longueur, des phases de
rémission de l'économie financière alternant avec des
rechutes dépressionnaires.
Cette politique du louvoiement de Barrak
Obama lui vaudra un désaveu des électeurs en 2012, mais son
successeur, un illustre inconnu républicain conservateur mou sans
saveur ni convictios, surgi de nulle part, ne vaudra guère mieux, le
mouvement libertarien n'ayant pas encore pu établir des bases
politiques suffisantes pour s'imposer. Ce n'est qu'à partir de 2020,
dans un monde rendu instable et en proie à plusieurs conflits de
moyenne intensité, que le travail d'éducation patient et
inlassable des économistes et philosophes libéraux autrichiens
commencera à payer, et que le monde marchera à nouveau vers
l'avant.
Les
avancées technologiques permettront de réaliser des gains de
productivité tout juste suffisants pour permettre à
l'économie de tenir cahin-caha, comme cela a été le cas
pour le Japon pendant ces 20 dernières années.
Pour les détails, qui vivra verra.
Et la vieille
Europe, dans tout cela ?
Je l'avoue: bien qu'y vivant encore et n'ayant guère de perspectives
de la quitter, je n'arrive pas du tout à m'intéresser à
l'Europe, et aux économies européennes dans leur ensemble. En
fait, une divergence profonde entre pays correctement gérés
pendant la crise et pays budgétairement déficients parait plus
que probable, mais les barrières linguistiques et
réglementaires à la libre circulation des citoyens rendront
l'adaptation géographique plus difficile qu'en Amérique,
où quitter la Californie pour le Texas est une opération assez
simple. Considérer l'Europe comme un ensemble économique
unifié me parait encore être une simplification abusive.
Par conséquent, les conditions du scénario rose des
différents pays sont plus difficiles à analyser.
Notre bonne vieille France, quant à elle, est menacée par Fitch
de
perdre sa note AAA sur sa dette, mais nos gouvernants ne
parlent que de "grand emprunt". Quel symbole de désordre
intellectuel de nos élites ! Ce pays magnifique mais
pitoyablement géré par des cliques politiques trop lâches
pour mener les vraies réformes qu'elles savent pourtant
nécessaires vivra forcément, dans les années à
venir, des chocs économiques de grande ampleur, qu'ils soient subis,
ou provoqués par un sursaut d'austérité gouvernementale
contraint et forcé par le spectre
de la banqueroute.
Malgré le génie créatif qui semble encore animer quelques
entrepreneurs de nouvelle génération - Mais pour combien de
temps encore ? - le scénario rose de l'économie
Française parait, dans l'état de délabrement politique
qui est le notre, difficile à imaginer.
Il va falloir se préparer à des temps très, très
difficiles.
Vincent
Bénard
Objectif Liberte.fr
Egalement par Vincent Bénard
Vincent Bénard, bientôt la quarantaine,
a une formation d'ingénieur et est un ancien militant syndical de
Force Ouvrière, passé graduellement au libéralisme entre
94 et 2000, ayant fini par déduire de ses multiples expériences
personnelles et professionnelles que l'intervention de l'état ne
résolvait que rarement les problèmes de société
qu'elles prétendait combattre, mais qu'elle était au contraire
en grande partie le problème.
Vincent Bénard est Président de l'institut Hayek
(Bruxelles) et Senior Fellow de Turgot
(Paris), deux thinks tanks francophones dédiés à la
diffusion de la pensée libérale, et sympathisant des deux seuls
partis libéraux français, le PLD et AL.
Publications
:
"Logement: crise publique,
remèdes privés", dec 2007, Editions Romillat
Avec
Pierre de la Coste : "Hyper-république,
bâtir l'administration en réseau autour du citoyen",
2003, La doc française, avec Pierre de la Coste
Publié avec
l’aimable autorisation de Vincent Bénard – Tous droits
réservés par Vincent Bénard.
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