Il n’aura pas fallu attendre
longtemps après les atrocités qui ont frappé Bruxelles pour que ceux que nous
appelons les experts en sécurité nous expliquent que les Européens devraient
abandonner une partie de leurs libertés afin que leurs gouvernements puissent
les protéger contre le terrorisme. Je suppose que les gens ne sont pas
supposés réaliser que chaque attaque terroriste représente un échec du
gouvernement, et que répondre à chacun de ses échecs par les mêmes politiques
ne fera que nous mener à de nouveaux échecs.
Je suis certain qu’une
population apeurée pourrait trouver attrayante la proposition du gouvernement
de sécurité accrue, et autoriser une surveillance plus importante de sa vie
privée. Mais il est important de réfléchir un instant à ce que les
gouvernements ont fait jusqu’à présent pour nous « protéger ».
Le gouvernement de la France
s’est, par exemple, montré particulièrement agressif dans ses politiques
envers le Proche-Orient. L’ancien président français, Nicolas Sarkozy, a été
l’un des partisans les plus déterminés à un « changement de
régime » en Libye. Cette opération a plongé le pays tout entier dans le
chaos, et une majorité du territoire aujourd’hui entre les mains d’ISIS et
d’Al-Qaeda ne l’était pas avant la « libération ». Comme nous avons
pu l’apprendre la semaine dernière de la boîte mail d’Hillary Clinton,
Sarkozy et le Premier ministre britannique, David Cameron, s’inquiétaient
beaucoup du devenir du pétrole libyen suite au renversement de Kadhafi. La
création d’un foyer de terrorisme susceptible de se retourner contre l’Europe
ne leur importait que très peu. Ils voulaient simplement obtenir des contrats
alléchants pour les sociétés énergétiques françaises et britanniques les
mieux connectées.
De la même manière, les
gouvernements européens ont été très actifs au cours des cinq années
d’intervention des Etats-Unis en Syrie dont l’objectif ultime a été le
renversement du régime d’Assad. Cette intervention inutile a accru le pouvoir
d’ISIS et d’Al-Qaeda dans la région, au point qu’ils contrôlent quasiment le
pays aujourd’hui. Des millions de personnes ont aussi fui leur pays en faveur
d’une Europe qui leur a ouvert ses portes et promis des aides généreuses à
tous ceux qui parvenaient jusqu’à ses frontières. Est-il surprenant que des
centaines de milliers de personnes aient accepté son offre ? Est-il
surprenant que, parmi ces gens, quelques-uns soient intéressés par un peu
plus qu’un appartement et un chèque d’aides sociales ?
Les Européens devraient
demander à ce que leurs gouvernements leur expliquent pourquoi ils s’entêtent
à provoquer les populations du Proche-Orient au travers de leurs politiques
étrangères agressives, pour ensuite ouvrir leurs portes à des millions
d’entre eux. Les dirigeants européens ne sont-ils pas dotés de bon
sens ?
Les experts en sécurité qui
recommandent une surveillance gouvernementale accrue après une attaque terroriste
ont généralement des intérêts à protéger. Ils bénéficient en effet d’une
hausse du budget destiné à la sécurité intérieure. La vulnérabilité des
citoyens est leur gagne-pain. Mais pourquoi se fait-il qu’après une attaque
terroriste, les gouvernements obtiennent davantage d’argent et davantage de
pouvoir sur leurs peuples ? Ne devraient-ils pas plutôt être
punis ?
Comme aux Etats-Unis, la crise
de sécurité européenne est directement liée à de mauvaises politiques.
Jusqu’à ce que ces politiques changent, aucune dose de surveillance, de
profilage racial et de harcèlement policier ne pourra protéger la population.
Les Européens semblent déjà le comprendre, comme nous avons récemment pu le
voir lors des élections allemandes, avec l’abandon par les citoyens des
partis qui ne leur promettent toujours que les mêmes politiques à des fins
différentes. J’espère que les Américains demanderont eux-aussi un changement
de nos politiques étrangères avant que des attaques terroristes ne viennent
frapper leur territoire.