C’est à un tsunami de surprise feinte que nous avons eu droit la semaine passée : oh, vertuchou, Volkswagen a bricolé les logiciels embarqués dans ses voitures pour obtenir des résultats brillants aux tests anti-pollution aux États-Unis. Le constructeur a menti, et il a même reconnu l’avoir fait. La pseudo-consternation a atteint rapidement la bourse, où l’action du constructeur a dévissé, et s’étend maintenant sur le marché européen, en touchant rapidement tous les autres constructeurs. Quel monde, mes amis, quel monde !
Ceci posé, revenons un peu sur Terre. Et si je parle de surprise feinte, c’est bien parce que les petites bidouilles des constructeurs pour faire passer leurs engins pour plus propres qu’ils ne le sont étaient connues de pas mal de monde. L’État, déjà, qui a savamment construit les normes, main dans la mains avec les fabricants eux-mêmes, et qui devait bien se douter qu’il y aurait le cas des tests bâtis pour permettre aux modèles de remporter de bonnes notes, et les conditions réelles, franchement éloignées. Les automobilistes ensuite, dont l’écrasante majorité a pu constater l’écart entre la consommation affichée publicitairement, et qu’on ne peut obtenir que dans des conditions de roulage qui frôle la crédibilité par le mauvais côté de la tangente. Les associations écolo enfin, qui, toutes largement subventionnées par l’État, ont su tourner les yeux ailleurs le temps qu’il fallait pour ne pas voir les petits soucis de certaines motorisations.
Avant d’aller plus loin, cela ne retire, évidemment, absolument rien à la faute initiale de Volkswagen dans le cas qui nous occupe. Comme le précise avec raison Vincent Bénard dans son dernier article à ce sujet, le constructeur allemand a bel et bien fraudé, en masquant (de façon logicielle, donc) une production de gaz polluants (des oxydes d’azote, dans ce cas-là) bien au-dessus des normes admises en condition de conduite normale. Il mérite donc ce qui lui arrive actuellement.
Maintenant, ce constat ne permet pas d’éviter de rappeler quelques évidences bien trop vite oubliées tant par la plupart des journalistes que, surtout, par ces politiciens qui commentent l’actualité du haut de leur morale irréprochable et de leur parcours dans leur domaine généralement exempt de toute fraude.
On pourra ainsi pouffer en lisant la demande péremptoire et assez gonflée de « totale transparence » de la part de la ministre de l’écologie, par exemple. C’est bien joli de réclamer la transparence, mais il faudrait aussi pousser les explications techniques un tantinet pour bien faire comprendre exactement l’enjeu, du côté des constructeurs, de respecter des normes anti-CO2 toujours plus drastiques.
En effet, et n’importe quel chimiste pourra le confirmer, l’apparition des oxydes d’azote (NOx) en combustion signifie que le carburant a été brûlé à des températures et des pressions élevées, qui certes contribuent à une diminution de la production de CO2, mais favorisent aussi l’augmentation de la production des NOx. Pour les constructeurs, chaque effort fait pour baisser la quantité de dioxyde de carbone aura donc tendance à augmenter la production des NOx. Cette augmentation est en partie absorbée par des systèmes de catalyse en sortie (notamment à base d’urée), mais on comprend qu’il est très complexe, chimiquement parlant, d’avoir à la fois une baisse constante des émissions d’un gaz qui, rappelons-le, n’est absolument pas nocif comme le CO2, et dans le même temps, une diminution des NOx (qui eux, sont effectivement nocifs pour la santé).
À ce point, on comprend que la course à l’homologation étatique des moteurs provoque le renchérissement des mécaniques vendues (avec l’introduction de systèmes progressivement de plus en plus complexes), ou, moins honnêtement, l’apparition de trucs et astuces pour réussir les conditions, bien calibrées, de tests connus à l’avance. Si la dernière option est clairement punissable, la première laisse songeur quand au bilan de l’action de l’État dans le domaine automobile.
On pourrait évoquer, par exemple, l’apparition de voitures électriques badigeonnées de massives subventions qui, si elles permettent à certains de frimer dans des Tesla agréables à regarder, n’ont toujours pas permis de régler les problèmes d’autonomie (et loin s’en faut), de recharge (longues et épuisantes pour le réseau électrique) ou de recyclage en fin de vie. D’autant que l’État qui subventionne les lubies électriques, c’est d’autant moins pour d’autres technologies, parfois prometteuses mais enterrées.
On pourrait rappeler que le développement en fanfare du diesel sur le sol européen ne doit à peu près rien au hasard et tout à la patte de l’État qui a sciemment encouragé son ascension par des taxations de plus en plus vexatoires sur l’essence. Ici, l’État stratège a bien frappé, et frappe encore : croyant soutenir une industrie automobile en concurrence avec le reste du monde en tabassant l’essence, l’État a introduit un biais énorme en faveur du diesel qui s’est effectivement révélé lucratif pour les constructeurs français… Jusqu’au moment où l’écart fiscal est devenu palpable (la Cour des Comptes évalue le – fameux – manque à gagner à 8 milliard d’euros) et où l’on s’est rendu compte que le diesel était particulièrement médiocre pour l’atmosphère.
On pourrait se rappeler qu’ensuite, l’écologie entrant dans les mœurs et la politique, les normes antipollution se sont mises à pulluler. L’État, toujours aussi stratège, s’est retrouvé avec d’un côté un diesel favorisé et de l’autre une atmosphère à dépolluer, à coup de normes de plus en plus drastiques, et des tests d’homologation idoines (et négociés avec les constructeurs). Là encore, on a du mal à oublier complètement la part de responsabilité de l’État. On pourrait en effet se rappeler qu’il n’y a pas de lobbying sans des individus, des administrations, des élus à « lobbyiser » surtout lorsqu’ils ont un grand pouvoir sur l’avenir d’une filière.
On pourrait enfin se rappeler que c’est encore l’État, au travers de la loi DMCA (protection des droits d’auteurs) qui a directement empêché que la tricherie soit révélée plus tôt : eh oui, selon cette loi, les constructeurs automobiles affirment qu’il est illégal pour des chercheurs indépendants de vérifier le code du logiciel contrôlant les véhicules, et ceci sans l’autorisation du fabricant, et cette interdiction a permis à Volkswagen de conserver ses manipulations à l’abri pendant des années.
L’État qui édicte des normes, l’État qui édicte des interdits, l’État qui pousse certaines motorisations au détriment d’autres … Volkswagen est évidemment coupable (et il l’a reconnu), mais oublier l’État n’est pas oublier un détail de la pièce qui s’est joué, c’est oublier le décor, la musique et le metteur en scène.
Alors, quand, sur tout ce bazar déjà bien glauque, on apprend que l’État envisagerait de redresser les torts causés avec … une bonne grosse interdiction des diesel d’ici 2025 (parce que ça marche, ces trucs là, qu’on vous dit : c’est efficace et ça n’apporte jamais d’intéressants effets de bords), on sait que là, on tient la solution, c’est évident ! Bingo !
Toute cette affaire pue. Elle pue le capitalisme de connivence. Elle pue le lobbyisme débridé. Elle pue les petits arrangements, les compromis douteux, les arrangements entre copains et coquins. Elle pue de l’odeur âcre d’un diesel mal brûlé, elle pue d’une écologie politisée à mort et utilisée à des fins protectionnistes (ici, des USA contre l’Europe, jusqu’au prochain retour de bâton), elle pue l’interventionnisme de l’État à tous les niveaux.
Volkswagen paiera, cher, sa fraude, et c’est tant mieux. Mais cette affaire montre de façon éclatante l’incohérence des pouvoirs publics, tiraillés entre leurs lubies, leurs compromissions et les petits intérêts bien compris de ceux qui les dirigent. Tout ceci démontre encore une fois que la régulation collectiviste ne marche pas. Ceci montre à quel point on est éloigné d’un marché libre où les fraudeurs n’auraient jamais eu la possibilité de faire durer leurs manigances aussi longtemps, où l’État n’aurait jamais pu imposer des normes débiles et des tests ridicules, où le consommateur aurait pu se faire flouer sans rien pouvoir dire.
L’État stratège, quelle bouffonnerie !
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