Mes chères contrariées, mes chers contrariens !
Il y a plus d’un an, puisque c’était en janvier 2012, j’avais écrit un
article intitulé « La bataille de l’emploi est définitivement perdue ».
L’idée générale était de montrer que les progrès majeurs réalisés dans le
domaine de la robotique allaient révolutionner le monde du travail… en
supprimant des très nombreux voire trop nombreux postes.
Tous les poncifs
habituels de la religion du « Prôôgrèèès » !
Suite à ce type d’article, vous avez droit à une déclinaison de toutes les
croyances, car il ne s’agit plus d’économie et de faits mais de croyance.
On vous explique que nous allons perdre des emplois bas de gamme,
d’ouvriers et que l’on fera des choses plus intéressantes, plus
passionnantes, avec plus de valeur ajoutée et mieux rémunérées. Je pense que
nous sommes tous d’accord pour atteindre un tel objectif mais les faits
depuis 30 ans donnent désormais tort à cette théorie qui ne repose d’ailleurs
sur rien si ce n’est une observation empirique de ce qui s’est produit
jusqu’à présent.
Depuis en réalité le choc pétrolier de 1975, partout dans le monde, le
chômage structurel augmente inexorablement et la croissance diminue d’année
en année. C’est assez logique.
Vous voyez un progrès vous en économie depuis les Trente Glorieuses ? Moi
non ! Et on commence à avoir du recul, puisque cela fait 30 ans que nous
avons quitté les Trente Glorieuses et nous venons de nous farcir les Trente
Piteuses. Devant vous ? Les Trente Miséreuses vous attendent ! Progrès mon
œil ! Les aïe-trucs ne sont pas un progrès, ils sont de simples technologies.
Le progrès c’est l’évolution harmonieuse des sociétés et là, c’est
franchement raté partout dans le monde.
Le travail est le
mode de redistribution des richesses !
Dans l’économie capitaliste, les rôles de chacun sont bien définis. Il y a
celui qui crée. Celui qui finance avec son capital une entreprise. Il y a le
travailleur, celui qui vend sa force de travail. Il en tire un revenu qui lui
permet d’être un consommateur. C’est la consommation des travailleurs (qui
représentent la plus grande masse) qui va faire tourner les économies et les
usines.
Or depuis 1975 et de façon exponentielle, la redistribution des richesses
via le travail se réduit tendanciellement et de façon exponentielle depuis le
début des années 2000. Poids des délocalisations d’un côté, progrès technologiques
de l’autre, sans oublier les gains de productivité massifs générés par les
technologies Internet au sens large qui commencent juste à donner toute leur
puissance.
Un constat
implacable
Celui qui ne veut pas voir ne verra pas.
Quel que soit le pays, quelle que soit la couleur politique du
gouvernement en place, que l’on parle de l’Allemagne où le chômage est
officiellement bas avec une tripotée de travailleurs pauvres, ou de la France
avec son chômage élevé mais ses « assistés » aussi riches que les
travailleurs pauvres allemands, le problème est le même.
Il n’y a plus assez de travail disponible pour tous. Le constat n’est pas
plus compliqué que cela.
Le Saint-Graal de
la compétitivité : l’esclave électronique, le robot !
Comme je le disais il y a plus d’un an, le Japon est très en avance dans
le domaine de la robotique.
Au moment où la France, avec son ministre du Redressement productif, lance un
plan, tenez-vous bien, de 100 millions d’euros pour soutenir la filière
robotique française (ce qui est pitoyable compte tenu des enjeux), le Japon,
lui, en est déjà au stade de l’exploitation industrielle des humanoïdes avec
retour sur investissement en moins de 24 mois.
Vous pourrez regarder cette vidéo sur le site du Figaro dont je
donne le lien ci-dessous, ou encore la beauté de Mlle UCROA la robotte à la
peau synthétique sur mon article précédent consacré à ce sujet.
Un robot n’a pas sa carte de la CGT.
Un robot ne dort pas.
Un robot ne mange pas.
Un robot n’a pas besoin de pause pipi ni de pause cigarette !
Un robot peut travailler 24h/24, 7j/7, 365 jours par an (moins les quelques
jours de panne).
Un robot ne pose aucune question, il ne pose aucun problème, n’a aucune
exigence.
Un robot n’a pas l’outrecuidance de demander un salaire pour le travail effectué.
Un robot humanoïde coûte désormais pas plus de 60 000 dollars soit au maximum
deux ans de salaires d’ouvrier d’où un retour sur investissement en 24 mois.
Prochainement, très rapidement, les hommes seront remplacés par les robots
partout où ce sera possible.
Cela veut dire qu’il y aura certainement des relocalisations, comme c’est
le cas d’ailleurs aux USA et même en Europe mais uniquement dans le cadre
d’usine ultrarobotisée donc sans emploi ou presque.
Hollande a promis
d’inverser la courbe du chômage
Je crois qu’ils n’ont rien compris, à gauche comme à droite d’ailleurs. La
révolution robotique, dont vous commencez à voir poindre les effets, sera un
tsunami pour l’emploi qui vous déferlera en pleine figure dès 2015.
L’emploi industriel sera rapidement laminé et ne sera plus qu’un souvenir.
Puis ce sera le tour des entreprises de nettoyage qui vont virer tous les
balayeurs du métro au profit d’humanoïdes. Tous les emplois peu qualifiés
vont disparaître. Mais pas ceux qui les occupaient et qu’il faudra bien
occuper.
Le balayeur ne
deviendra pas ingénieur
La courbe du chômage ne va pas s’inverser, elle va s’amplifier. C’est un
changement radical de société auquel nous sommes confrontés. Compte tenu de
l’état des finances des pays, le traitement social ne pourra pas être la
solution puisque les caisses sont vides.
Nous serons tous
des canuts !
Il est et sera de bon ton de faire la comparaison avec les canuts qui ne
voulaient pas disparaître et qui menaient un combat d’arrière-garde perdu
d’avance. Sauf qu’il y a une différence fondamentale qui rend cette
comparaison intellectuellement stupide. La disparition des canuts a eu lieu à
la veille de la révolution industrielle, où le besoin d’hommes et de
main-d’œuvre n’a jamais été aussi grand. C’était le début de la production de
masse, pour une consommation de masse, nécessitant une masse de travailleurs.
Celui qui ne veut
pas voir la différence avec la situation actuelle est tout simplement frappé
de cécité !
Nous sommes capables de faire beaucoup mieux que les « Terminator V1 » que
vous pouvez contempler sur cette vidéo déjà saisissante pour comprendre vers
quoi évoluent les usines maintenant. Pas demain. Actuellement.
Mais, « les robots classiques travaillent vite et avec précision, mais ils
réalisent peu de tâches différentes et n’offrent pas la souplesse et la
finesse des humanoïdes», explique Katsuhiko Maruo, directeur de l’usine qui
se réjouit et ne cache pas son plaisir devant cette main-d’œuvre « mais la
grande différence, c’est qu’ils ne font pas de pause, ils n’ont pas de
week-ends, pas de congés et ils travaillent aussi la nuit ».
Qu’allons-nous devenir et que va devenir le monde sans redistribution par
les salaires ?
Cette mutation historique va avoir un corollaire très complexe. Si les hommes
ne gagnent plus d’argent par les salaires car il n’ont plus travail, et que
les robots s’occupent de tout ou presque alors il n’y aura plus de
consommateurs solvables pour acheter la production des robots… Cela va être
très compliqué à résoudre car toutes les théories économiques, je dis bien
toutes, toutes les actions politiques, je dis bien toutes également, sont
basées sur l’idée cardinale et centrale du travail !
Or le travail, sous vos yeux, va disparaître en tout cas pour 80 à 90 %
des gens. Il restera quelques brillants ingénieurs, quelques plombiers (et
encore pas longtemps), nous aurons même les robocops (les robots policiers en
service 24h/24). Mais pour la majorité des gens il n’y aura plus de travail.
Alors que va-t-on faire sans avoir à travailler ? Comment répartir
production et richesse ? Est-il seulement envisageable de taxer les robots si
nous restons dans un monde ouvert et sans frontières ? Comment financer les
États-providences et les aides sociales (y compris aux USA) lorsque la
fiscalité repose en très grande partie sur le travail (avec les charges
sociales par exemple) ? Peut-on verser de l’argent aux gens à ne rien faire
toute une vie, et regarder des robots travailler pour nous ? Doit-on aller
après les 35 heures vers la semaine de 2 heures ?
La révolution robotique est vertigineuse économiquement mais aussi en
termes sociétaux et philosophique. Il peut en sortir le meilleur. Un monde
d’où la pauvreté serait éradiquée et où l’homme oisif pourrait méditer,
créer, inventer, imaginer en toute indépendance financière.
Il en sortira probablement le pire, avec une période transitoire
d’extrêmes richesses pour une infime minorité et une très grande pauvreté
pour la plus grande majorité sans distinction de classe sociale. Tout le
monde sera touché. Certains résisteront simplement un peu plus longtemps que
les autres. Délinquance et désordres sociaux en seront la conséquence la plus
évidente.
Comment vous
préparer ?
La bonne question à vous poser c’est comment vivre ou survivre dans un
monde où vous n’aurez plus d’argent, plus de travail ? Encore une fois, la
maison à la campagne avec poulailler et potager sera d’une très grands
utilité ainsi que votre PEBC (plan épargne boîtes de conserve), sans oublier
votre kit composé de pièces d’or pour stocker votre richesse. Il ne faut pas
se leurrer. Dans un monde sans emploi, aucun pays ne sera capable de payer
quelques dettes que ce soit.
Pour le moment, il n’est pas trop tard pour acquérir certains savoir-faire
sur lesquels les robots auront du mal en tout cas dans un premier temps à
être performants. Des tâches demandant une finesse technique important ainsi
que de l’analyse. C’est le cas pour de la plomberie chez les gens où les
espaces sont confinés et où il sera compliqué de faire intervenir un
humanoïde pas très souple !! L’ingénierie bien évidemment mais tout le monde
n’en est pas capable surtout que cela deviendra de plus en plus complexe. La
maintenance car il faudra bien réparer ces robots. La distribution de robots,
car je serai le premier acheteur de mon robot domestique (un cadeau pour ma
femme).
Il est également possible d’investir dans les sociétés japonaises qui
conçoivent et produisent ces robots. Certaines sont cotées et promises à un
très bel avenir… jusqu’au moment où les robots auront supprimé suffisamment
de consommateurs (là tout s’effondrera comme un château de cartes).
Voici en tout cas quelques pistes de réflexion que je voulais partager
avec vous sur ce sujet. N’oubliez pas, il y aura une bulle financière sur la
robotique. Personne pour le moment n’en a conscience. Par rapport à la bulle
Internet et pour faire la comparaison, nous en sommes à 1996. Le point le
plus bas avant l’envolée des cours.
Il y a une dernière solution : que l’économie des dettes s’effondre avant
l’arrivée de la révolution humanoïde. En étant tous ruinés, aucune entreprise
ou particulier ne pourra investir dans les robots. D’un autre côté, nous
n’aurions pas plus de travail…
Enfin, soyez tranquilles, votre Président (béni-oui-oui soit son nom) vous
a dit qu’il allait inverser la courbe du chômage. Vas-y François, je te
regarde et je me marre d’avance. Tu vas te planter magistralement mon pauvre.
Il faudrait qu’un de ses communicants lui apprenne à pondérer ses promesses.
Ce n’est pas dur de dire « nous ferons tout pour inverser la courbe du
chômage », plutôt que de promettre « nous allons inverser la courbe du
chômage, c’est sûr »…
Charles SANNAT
Ceci est un
article ‘presslib’, c’est-à-dire libre de reproduction en tout ou en partie à
condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Le Contrarien
Matin est un quotidien de décryptage sans concession de l’actualité
économique édité par la société AuCOFFRE.com. Article écrit par Charles
SANNAT, directeur des études économiques. Merci de visiter notre site. Vous
pouvez vous abonner gratuitement www.lecontrarien.com
Voir la vidéo de l’usine avec robots humanoïdes en
fonctionnement
Voir le site du
fabricant de ces robots
Lire l’article de Charles SANNAT sur « la bataille de
l’emploi est définitivement perdue », déjà sur le thème de la robotique.