Il n’y aura pas de réforme de l’Europe et de l’Union européenne ou encore
de la zone euro, car les Allemands n’en veulent tout simplement pas.
Comme à chaque fois, nous annoncerons, avec des trémolos dans la voix,
l’immense succès de la diplomatie qui fait avancer l’Europe, de la force et
de la prescience de ce couple franco-allemand, sans oublier ce nouveau budget
de quelques milliards de la zone euro qui ne correspondra qu’à du recyclage de
fonds déjà engagés et annoncé en 1 seul montant unique alors que ce sera
dépensé sur plusieurs années.
Nous aurons quelques dépêches et autres beaux articles dithyrambiques,
puis le brouhaha médiatique nous fera passer à autre chose et nous oublierons
que l’Europe est en panne.
Il faudra juste que Macron, trouve un moyen pour mener le combat pour les
élections européennes, et vu ce qu’il se passe en Hongrie, en Italie ou
encore en Autriche, il va falloir un régiment entier de courageux et
acrobatiques Mamadou (s) ou (x) (je me pose encore la question sur la bonne
manière d’accorder Mamadou au pluriel).
Bref, ce n’est pas gagné, tant l’Europe n’est plus dans le cœur de nos
concitoyens.
La réforme de l’Europe est à nouveau sur la table alors que Merkel a répondu
de manière plus que mesurée aux ambitions de Macron. À moins de dix jours du
Conseil des ministres franco-allemand, Patrick Moreau, politologue au CNRS à
Strasbourg et spécialiste de l’Allemagne, a analysé la position allemande
pour Sputnik.
En quelques lignes, Angela Merkel a douché les espoirs d’Emmanuel Macron
d’obtenir une réforme ambitieuse de la zone euro.
Patrick Moreau, politologue au CNRS de Strasbourg, analyse pour Sputnik
l’interview donnée le 10 juin dernier par la chancelière. Il estime que le
point d’achoppement est le renforcement de la zone euro.
« Angela Merkel a chiffré ce que l’Allemagne était disposée à donner et elle
parle d’un maximum qui pourrait aller jusqu’à 99 milliards, puisqu’on parle
de deux chiffres. Donc on est très loin des 300 milliards évoqués par Macron.
»
D’après le politologue, la raison est double. D’une part, la chancelière,
à la tête d’une coalition, est « en situation de survie politique, pas du
tout en situation de domination politique comme lors de la crise grecque »,
car soumise à des compromis avec les sociaux-démocrates. D’autre part, les
Allemands sont réticents à s’engager dans une réforme qui serait financée par
Berlin.
Le 26 septembre dernier, Emmanuel Macron avait, lors d’un discours à la
Sorbonne, fait part de sa volonté de « refonder l’Europe » grâce à des
réformes sur six principaux points : l’initiative de défense, la gestion des
réfugiés, l’avenir digital et informatique, les partenariats avec l’Afrique,
l’avenir climatique ainsi que les problématiques liées au droit et aux
demandes d’asile.
Si M. Moreau reconnaît que la France et l’Allemagne ont une vision commune
sur « plusieurs de ces six dimensions », il évoque les limites qui empêchent
le couple franco-allemand d’agir en moteur et déclare :
« Dans son discours de la Sorbonne, Emmanuel Macron parlait de refonder
l’Europe, aujourd’hui il se retrouve à négocier pour obtenir une capacité
d’intervention limitée. »
Et en effet, les obstacles sont nombreux face à l’ambition du chef de
l’État. L’initiative de défense, à laquelle est pourtant favorable le parti
d’Angela Merkel, est freinée par ses alliés du SPD. Sur les dossiers relatifs
à la crise migratoire – qu’il s’agisse de la gestion des réfugiés ou des
politiques d’asile – Emmanuel Macron et Angela Merkel ont beau parler d’une
même voix, ils font face à l’opposition des pays du Nord de l’Europe, en plus
de celle du groupe de Višegrad et de l’Autriche à l’Est, sans parle de
l’Italie au Sud.
« À la fois le Président Macron et madame Merkel sont complètement isolés
en Europe. Tous les pays du Nord sont hostiles à la problématique Macron, les
pays de Višegrad aussi. Personne ne veut réellement d’une superstructure. »
Enfin, sur la réforme de la zone euro, le panorama n’est pas beaucoup plus
dégagé. Alors qu’Emmanuel Macron visait un budget de la zone euro équivalente
à un ou deux points de PIB, soit environ 300 milliards d’euros, la
chancelière a prévenu qu’elle accepterait un budget européen à condition que
celui-ci soit « limité » et que son utilisation soit clairement définie.
« La destination de ces fonds est extrêmement différente. Le Président
Macron a laissé un flou sur la destination des fonds alors que madame Merkel
souhaiterait le faire passer dans le budget de la communauté européenne. »
Des positions éloignées qui rendent difficiles des décisions qui, de
l’aveu de la Chancelière, doivent « être prises avant les Européennes »
d’autant que Paris et Berlin doivent s’accorder avant le Conseil des
ministres franco-allemands le 19 juin prochain. Le temps est compté, et
Emmanuel Macron connaît la position de son homologue.
« Une déclaration très belle, tout à fait intéressante, sur un certain
nombre de points emblématiques, mais qui n’aborde pas la question de
« Comment réformer l’Europe » et c’est un signal de la faiblesse
politique de madame Merkel et de l’isolement relatif du Président Macron. »
Source agence russe Sputnik.com ici