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Il y a plus de
deux millénaires, le philosophe grec Aristote observait dans son traité Météorologiques
qu’autour de sa portion de bassin méditerranéen, « il arrive
quelquefois que les sécheresses et les pluies sont tout ensemble abondantes
et répandues dans toute la continuité d'un pays », mais que
« parfois elles n'ont lieu que dans des parties seulement ; souvent une
contrée reçoit tout alentour les pluies ordinaires de la saison ou même
davantage ; et pourtant dans une de ses parties, il y a sécheresse. »
Souvent, également, « toute la contrée environnante n'ayant reçu que peu
de pluie, ou étant plutôt même à sec, il arrive que telle partie reçoive à
elle seule une masse d'eau considérable. »
L’imprévisibilité
du temps d’une période de végétation à une autre était alors, comme c’est
toujours le cas aujourd’hui, un fait inévitable et assez terrifiant de la vie
agricole.
Alors que cela
constituait un problème pour la plupart des gens, certains y ont vu
l’opportunité de faire croire qu’ils pouvaient prédire ou influencer le temps
et identifier les actions humaines qui déclencheraient une chaleur ou un
froid hors saison, des chutes excessives ou insuffisantes de pluie, et des
tendances de réchauffement ou de refroidissement. Au fil des ans, leurs
« boucs émissaires climatiques » allaient des sacrifices
insuffisants aux dieux, de la sorcellerie et de la déforestation aux paratonnerres,
de la télégraphie sans fil et des coups de canon lors de la Première Guerre
mondiale aux essais nucléaires et à la pollution (visible) de l’air.
De nos jours,
bien sûr, de nombreux modélisateurs et activistes climatiques trouvent les
causes du mauvais climat dans l’invisible, inodore et insipide dioxyde de
carbone produit par la combustion de charbon, de pétrole et de gaz naturel.
Les prophètes de
notre époque, comme l’écologiste radical Bill McKibben, nous avertissent donc
que notre échec collectif à réduire la concentration de CO2 dans
notre atmosphère de son niveau actuel de 0,0392% à moins de 0,035% (ou de 392
à 350 parts par million, pour un meilleur effet rhétorique), à travers des
actions drastiques, aura pour conséquence la disparition des glaciers et de
millions de personnes (qui pourraient mourir de soif) ; la propagation
intercontinentale du paludisme et de la dengue portée par les
moustiques ; des sécheresses plus longues et durables qui rendront
impossible l’agriculture dans certaines zones ; la montée des niveaux de
la mer qui engloutiront des villes, des îles et des terres agricoles ;
des océans plus acides qui feront disparaître les poissons et dissoudront les
récifs coralliens ; et une fréquence plus importante de tempêtes de neige
et d’ouragans dévastateurs.
Cependant,
loin de se reposer sur des faits établis, les prédictions proclamées par
McKibben sont fondées sur des « scénarios » concoctés par des
modélisateurs qui n’arrivent même pas à expliquer l’absence de réchauffement planétaire
dans les quinze dernières années. Si on ose quitter le royaume des
conjectures climatiques pour rejoindre le monde de la réalité historique, les
données disponibles suggèrent alors que, paradoxalement, le recours de plus
en plus fréquent de l’humanité aux hydrocarbures a considérablement allégé
son empreinte écologique.
Un cas
d’espèce est le reboisement spectaculaire de nombreuses régions de notre
planète. Par exemple, la France a vu sa superficie forestière s’élargir d’un tiers
entre 1830 et 1960, et d’un autre quart depuis 1960. Cette supposée
« transition forestière » s’est produite dans le contexte d’un
doublement de la population française et d’une augmentation spectaculaire des
niveaux de vie. Le produit national brut français par habitant a été
multiplié par environ 18 au cours de cette période. Le reboisement – ou
l’amélioration de la qualité de la couverture forestière dans des pays comme
le Japon où il n’y a pas d’espace pour la culture agricole – a été réalisé de
la même manière dans toutes les forêts tempérées et boréales et dans tous les
pays avec un PIB par habitant dépassant les 4,600$ – à peu près égal à celui
du Chili – et dans un certain nombre d’économies en voie de développement,
comme la Chine, l’Inde, le Bangladesh et le Vietnam.
L’utilisation
des combustibles fossiles y est pour beaucoup dans ce résultat, notamment
parce que les émissions de CO2 constituent la nourriture des
plantes. Pourtant, ce n’est qu’une infime partie de l’histoire du CO2,
qui est largement sous-estimé.
Malgré une idée reçue assez répandue,
plus de 9/10 de la totalité de la déforestation causée par les êtres humains
depuis l’émergence de la civilisation s’est produite avant 1950, lorsque les
gens avaient besoin de couper des quantités massives de bois afin de
s’approvisionner pour le logement, l’alimentation, le chauffage et la
production d’une multitude d’objets.
Malheureusement,
dans de nombreux endroits où les terres agricoles n’étaient pas très
productives, les technologies primitives utilisées ont eu pour conséquences
qu’il fallait non seulement plus de 16 hectares et une mule pour
approvisionner (pauvrement) un ménage, mais que de nombreux dommages étaient
également causés à l’environnement dans le processus.
Comme
un autre philosophe grec, Platon, l’observait également il y a plus de deux
millénaires, les montagnes de l’arrière-pays d’Athènes étaient « couvertes de sol fertile », les plaines de Phelleus étaient
« remplies de terre riche », et les montagnes affichaient une
« abondance de bois », mais à son époque, les nombreuses montagnes
« ne nourrissaient plus que les abeilles » alors que dans les
petites îles, toutes « les parties grasses et molles de la terre
[avaient] coulé tout autour et il ne [restait] plus que la carcasse nue de la
région. »
Les complaintes similaires à celles de
Platon ont été assez communes à travers l’histoire de l’humanité, jusqu’aux
avancées technologiques inaugurées à l’âge des combustibles fossiles, il y a
plus de deux siècles. Entre autres bénéfices directs pour l’environnement, le
charbon et plus tard le pétrole lourd et les gaz naturels ont remplacé le
bois de chauffage et le charbon de bois. Les moteurs à essence et le diesel
ont éliminé le besoin pour des millions de chevaux et de mules – et leurs
besoins en alimentation et en litière – à la fois dans les fermes et dans les
villes.
Les produits synthétiques fabriqués à
partir de charbon et plus tard de pétrole et de gaz naturel ont rendu caduque
la culture de plantes, comme les arbres de caoutchouc et de quinquina – ce
dernier était à un moment donné le seul remède connu contre le paludisme –
l’indigo et la garance (éléments essentiels dans la production des colorants
bleus et rouges), ainsi que le lin pour les cordes et les tissus. Ces produits
synthétiques réduisaient aussi considérablement la quantité de terre allouée
à la production de coton et de laine tout en réduisant les pressions sur la
faune, comme les baleines et les animaux à fourrure.
Grâce à leur rôle de carburants pour le
transport maritime et terrestre de longue distance, le charbon et plus tard
les carburants à base de pétrole – principalement le diesel et les
hydrocarbures de soute marine – ont encouragé la spécialisation agricole dans
les zones les plus productives de la planète. Le charbon, le gaz naturel et
le pétrole étaient indispensables à l’extraction, à la production, au
transport et à la pulvérisation d’une vaste gamme de produits agricoles –
comme l’eau d’irrigation, les engrais, les pesticides et les serres, qui ont
considérablement augmenté les rendements et réduit les pertes liées aux
parasites et aux maladies.
L’échelle et la
portée des technologies de transport moderne ont également permis d’augmenter
considérablement la taille de nos villes et de concentrer un nombre croissant
de personnes sur des surfaces plus réduites.
Étant donné
que l’espace est limité dans les zones urbaines, les habitants de la ville
conduisent, polluent, consomment, et jettent beaucoup moins que les personnes
qui vivent dans un environnement moins dense. Selon les termes de
l’économiste Ed Glaeser, « résider dans une forêt peut sembler être une
bonne façon de montrer son amour de la nature, mais vivre dans une jungle de
béton est en fait beaucoup plus écologique… Si vous aimez la nature, restez
loin d’elle. »
Pour mettre les choses en perspective,
les villes, les banlieues, les routes et les autoroutes couvrent peut-être
moins de 5% de la superficie terrestre des 48 plus petits États américains.
Sur le plan mondial, les villes occupent approximativement 2% de la surface
terrestre, une zone qui devrait doubler au cours du prochain demi-siècle.
Depuis
plusieurs décennies aux États-Unis et dans à peu près la moitié du monde,
bien davantage de terres agricoles sont retournées à l’état sauvage au lieu
d’être converties en banlieues. Les héros méconnus de ce verdissement de
notre planète ont été les combustibles riches en carbone tant calomniés, dont
l’utilisation affecte considérablement moins les autres espèces végétales et
animales que les alternatives « renouvelables » promues par les
supposés écologistes, qui sont bien plus productrices de famines et qui sont
bien moins efficientes.
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