C’est un article assez « interpellant » de l’AFP, qui n’est pas réputée
pour ses capacités intellectuelles profondément transgressives, sur les
monnaies uniques en gestation, qui à force de « gestationner
» n’arrivent pas à naître !
Alors que l’aventure de l’euro était la première monnaie unique de
l’histoire économique post-Seconde Guerre mondiale, l’intégration
économique et la globalisation auraient dû faire que l’euro ne soit pas la
seule monnaie unique mais bien la première d’une longue série.
À la fin des années 90, les projets de monnaies communes
fleurissaient.
« Des ambitions contrariées dans les pays du Golfe, un débat qui s’enlise
en Amérique du Sud… Les projets d’union monétaire, autrefois florissants, ont
aujourd’hui du plomb dans l’aile, dans un contexte de défiance envers l’euro
et son modèle économique.
Plusieurs États, une seule monnaie : voilà l’avenir auquel semblaient
promises plusieurs régions du monde lors de la création de l’euro, la monnaie
commune européenne, mise en circulation le 1er janvier 2002 après dix ans de
gestation.
“Il y avait à l’époque la volonté de mettre fin à l’instabilité des
changes, à l’origine de plusieurs crises. Les monnaies uniques étaient
perçues comme un gage de succès”, rappelle Fabien Tripier, économiste au
Centre d’études prospectives et d’informations internationales (Cepii).
D’autres monnaies supranationales, à cette époque, étaient pourtant déjà
en place : le franc CFA, créé en 1945 et utilisé par 15 pays d’Afrique
subsaharienne ; et le dollar des Caraïbes orientales, lancé en 1965 dans huit
pays et territoires des Antilles.
Mais le projet européen était perçu comme inédit, au regard de son
ambition. “L’objectif, c’était de créer une monnaie de référence, avec une
politique monétaire indépendante et non pas arrimée à d’autres devises”,
explique M. Tripier.
États en quête de leadership, pays émergents, “micro-nations”… Ce modèle,
pour beaucoup, a fait figure d’exemple à suivre. “On était dans un contexte
de recomposition lié à la chute du Mur. La monnaie était vue comme un
instrument géopolitique”, rappelle Xavier Ragot, professeur à la Paris School
of Economics (PSE) ».
Partout des projets, partout le même refus devant l’obstacle. La
faute à l’euro !
Dans le monde entier donc, il y avait des projets d’union monétaire.
En Amérique du Sud, entre les pays du « Mercosur », en Asie, entre les
pays de l’ASEAN, en Afrique, entre différents pays y compris utilisant le
Franc CFA ou en remplacement du Franc CFA, sans oublier le CCG, qui est le
Conseil de coopération du Golfe (CCG), réunissant les six monarchies du
Golfe.
Chaque groupe portait un projet de monnaie unique.
Or l’intérêt, au fil du temps, s’est émoussé, et les raisons sont assez
simples : une union monétaire demande beaucoup de temps, car les problèmes
sont les mêmes pour toutes les zones, et le premier d’entre eux consiste à
coller une monnaie unique sur une zone et des pays hétérogènes.
Avec l’exemple de l’euro, tous les candidats potentiels à de telles
aventures ont pu mesurer, dans le cadre d’une expérimentation grandeur
nature, dans l’une des zones les plus riches du monde, les difficultés
intrinsèques à un tel processus ainsi que la nécessité de l’abandon total de
la souveraineté monétaire, qui est une composante essentielle de la
souveraineté d’une nation.
Comprenez bien que la souveraineté n’a pas de sens en soi. La souveraineté
doit se comprendre et s’entendre comme une marge de manœuvre, une possibilité
d’action, une liberté d’agir comme bon vous semble, le bon vous semble devant
à un moment rejoindre ou s’apparenter avec les intérêts de son peuple.
Même l’AFP reconnaît qu’une monnaie c’est tellement dur, qu’en fait pour
le moment c’est presque impossible.
Et c’est assez passionnant de voir l’AFP nous expliquer que l’idée de
monnaies uniques semble s’être émoussée.
« Les unions monétaires sont compliquées à construire, mais aussi à
maintenir en place »
Ou encore « pendant presque une décennie, les Européens ont souffert de
difficultés économiques”, avec pour certains pays des moments de terrible
récession et un chômage très élevé ».
C’est vrai que dit de cette façon-là, cela ne donne pas envie.
Plus grave encore cette phrase que l‘on croirait sortie des colonnes
d’Insolentiae alors qu’elle prend place dans une dépêche de l’AFP : « Les
gains de croissance n’ont pas été au rendez-vous. On pensait que la monnaie
unique allait entraîner une convergence économique. Mais les pays de la zone
euro ont divergé comme jamais depuis la Seconde Guerre mondiale. »
Mazette !!
Mais ce n’est pas tout. L’AFP enterre même l’avenir des monnaies
uniques ou communes.
« L’avenir des devises supranationales appartient-il donc au passé ? À
court terme, peu probable de voir surgir une nouvelle monnaie commune. Ce
processus implique de renoncer à sa souveraineté monétaire, ce que les pays
concernés ne sont pas prêts à faire. »
La réalité c’est qu’aucun pays ne veut plus se lancer dans un tel
processus pour le moment, totalement échaudés par les difficultés impliquées
par l’euro, la perte de souveraineté que cela nécessite et le renoncement à
toute forme d’action politique nationale.
À travers le refus des autres pays de lancer des projets similaires, ce
que vous contemplez, c’est l’échec sans appel de l’euro qui n’a pas fini de
faire souffrir les peuples d’Europe.
Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu. Préparez-vous !